SECTION V

LES MASQUES DE LA SCIENCE

 

Physique ou métaphysique ?

 

Si le progrès existe sur cette terre, la Science sera  obligée d'abandonner un beau jour, nolens volens, les idées monstrueuses que représentent ses lois physiques qui se dirigent  d'elles-mêmes, sans posséder ni Ame ni Esprit et de se tourner vers les Enseignements Occultes. Elle l'a déjà fait, quelque altérés que soient les titres et les éditions corrigées du Catéchisme Scientifique. Il y a maintenant plus d'un demi-siècle, en comparant la pensée moderne avec la pensée ancienne, on a découvert que, si différente que notre Philosophie puisse paraître, comparée à celle de nos ancêtres, elle n'en est pas moins uniquement composée d'additions et de soustractions à l'ancienne philosophie et transmises goutte à goutte au travers du filtre des antécédents.

Ce fait était bien connu de Faraday et d'autres éminents savants. Les Atomes, l'Ether, l'Evolution elle-même, tout vient à la Science moderne des notions antiques, tout est basé sur les conceptions des notions archaïques. "Conceptions" pour le profane, sous forme d'allégories ; vérités pures enseignées aux Elus durant l'Initiation, qui ont été en partie divulguées par les écrivains grecs et sont parvenues jusqu'à nous. Cela ne veut pas dire que l'Occultisme ait jamais eu, sur la Matière, les Atomes et l'Ether, les mêmes idées que celles que l'on trouve dans l'exotérisme des auteurs classiques grecs. Pourtant, si nous croyons Tyndall, Faraday lui- même était Aristotélicien et plutôt un Agnostique qu'un Matérialiste. Dans son ouvrage intitulé Faraday, le découvreur 478, l'auteur nous montre le grand Physicien employant de "vieilles réflexions d'Aristote" que l'on "retrouve sous une forme concise dans quelques-uns de ses ouvrages". Cependant Faraday, Boscovitch et tous les autres, qui voient dans les Atomes et les molécules des "centres de forces" et dans les éléments correspondants la Force, constituant ELLE-MEME UNE ENTITE, sont peut-être bien plus près de la vérité que ceux qui s'élèvent contre eux, en même temps que contre "l'antique théorie corpusculaire Pythagoricienne – théorie qui, par parenthèse, n'est jamais passée à la postérité telle que le [II 255] grand Philosophe l'a réellement enseignée – sous prétexte qu'elle est basée sur "l'illusion en vertu de laquelle les éléments de la matière que l'on peut concevoir peuvent être reconnus comme étant des entités distinctes et réelles".

478 Faraday as a Discoverer, p. 123.

 

La principale et la plus fatale des erreurs commises par la Science, aux yeux des Occultistes, réside dans l'idée que l'on peut admettre la possibilité de l'existence dans la Nature de Matière inorganique ou morte. Une chose morte ou inorganique peut-elle être susceptible de se transformer ou de changer, demande l'Occultisme ? Et existe-t-il sous le soleil une seule chose qui demeure immuable ou sans changement ?

[Qu'une chose soit morte, implique qu'elle a été vivante à un moment quelconque. Quand ? A quelle période de la cosmogonie ? L'Occultisme prétend que la Matière n'est jamais plus active que lorsqu'elle semble inerte. Un bloc de bois ou de pierre est immobile et impénétrable à tous égards. Néanmoins et de facto, ses particules sont animées  d'un mouvement vibratoire incessant, éternel, qui est si rapide que, pour les yeux physiques, le corps semble absolument dépourvu de mouvement et l'espace qui sépare ces particules dans leur mouvement vibratoire est – vu d'un autre plan d'être et de perception – aussi grand que celui qui sépare des flocons de neige ou des gouttes de pluie ; mais la Science Physique considérera cela comme une absurdité.]

Nulle part on ne trouve de meilleure preuve de ce faux raisonnement que dans l'ouvrage scientifique d'un Savant allemand, le professeur Philip Spiller. Dans son traité de cosmologie, l'auteur cherche à prouver :

qu'aucun des constituants matériels d'un corps, aucun atome, n'est originellement doué lui-même de force, mais que chacun de ces atomes est absolument mort et ne possède aucun pouvoir pour agir à distance 479.

479 Der Weltœther als Kosmische Kraft, p. 4.

 

Cette affirmation n'empêche pourtant pas Spiller d'énoncer une doctrine et un principe Occultes. Il affirme l'indépendante substantialité de la Force et la décrit comme une "matière incorporelle" (unkörperlicher Stoff) ou une Substance. Or, en Métaphysique, la Substance n'est pas la Matière et l'on peut, dans l'intérêt de la discussion, admettre que l'expression est mal choisie, mais cela est dû à la pauvreté des langues européennes et, surtout, à la rareté des termes scientifiques.  Spiller identifie donc cette "chose" avec l'Æther. En employant le langage Occulte, on peut dire plus correctement que cette "Force-Substance" est l'Ether positif phénoménal et toujours actif – Prakriti ; tandis que l'Æther omniprésent et imprégnant tout est le Noumène du premier, [II 256] le substratum de tout, ou l'Akâsha. Stallo tombe pourtant sur Spiller, comme sur tous les Matérialistes. Il est accusé de "méconnaître complètement la corrélation fondamentale de la Force et de la Matière" au sujet desquelles la Science n'a aucune donnée certaine. Aux yeux de tous les autres Physiciens, cette "demi-conception hypostatique" est non seulement impondérable, mais encore dépourvue de forces cohésives, chimiques, thermiques, électriques et magnétiques, forces dont, selon l'Occultisme, l'Ether est la Source et la Cause.

C'est pourquoi Spiller, malgré toutes ses erreurs, fait preuve de plus d'intuition que tout autre Savant moderne, à l'exception, peut-être, du docteur Richardson, théoricien de la "Force Nerveuse" ou Ether  Nerveux et de la "Force du Soleil et de la Force de la Terre480". L'ÆTHER, dans l'Esotérisme, est la quintessence même de toute énergie possible et c'est certainement à cet Agent Universel (composé de nombreux agents) que sont dues toutes les manifestations d'énergie dans les mondes physique, psychique et spirituel.

Que sont, en réalité, l'électricité et la lumière ? Comment la Science peut-elle savoir que l'une est un fluide et l'autre  un  "mode  de mouvement" ? Pourquoi n'explique-t-on pas le motif de la différence que l'on établit entre elles, puisqu'on les considère toutes deux comme des corrélations de forces ? L'électricité, nous dit-on, est un fluide immatériel et non moléculaire – bien que Helmholtz soit d'un autre avis – et la preuve en est que nous pouvons le mettre en bouteille, l'accumuler et la conserver en réserve. Ce doit donc être simplement de la Matière et non pas un "fluide" spécial. Ce n'est pas non plus un simple "mode de mouvement", car on emmagasinerait difficilement du mouvement dans une bouteille de Leyde. Quant à la lumière, c'est un "mode de mouvement" encore plus extraordinaire, puisque, "si étrange que cela puisse sembler, la lumière [elle aussi] peut effectivement être emmagasinée en vue d'être employée", comme cela a été démontré par Grove, il y a près d'un demi-siècle.

Prenez une gravure qui ait été conservée dans l'obscurité pendant quelques jours et exposez-la en plein soleil, c'est-à-dire soumettez-la pendant quinze minutes à l'influence du soleil. Appliquez-la sur du papier sensible, dans une chambre obscure et au bout de vingt-quatre heures elle sera imprimée sur le papier sensible, les blancs apparaissant en noir... Il semble qu'il n'y ait pas de limites pour la reproduction des gravures 481.

480 Voyez Popular Science Review, Vol. V, pp. 329-334.

481 Voir Correlation of Physical Forces, p. 110.

 

Qu'est donc ce qui reste fixé, cloué, pour ainsi dire, sur le [II 257] papier ? C'est certainement une Force qui a fixé la chose, mais cette chose, dont le résidu reste sur le papier, qu'est-elle ?

Nos érudits s'en tireront avec quelques savants mots techniques, mais qu'est-ce qui est intercepté de façon à laisser une petite portion de lui- même sur du verre, du papier ou du bois ? Est-ce "Mouvement" ou est-ce "Force" ? Nous dira-t-on que ce dont il reste trace, n'est que l'effet de la Force ou du Mouvement ? La Force ou Energie est une qualité, mais toute qualité doit appartenir à quelque chose ou à quelqu'un. En Physique, on décrit la Force comme étant "ce qui modifie ou tend à modifier toute relation physique entre des corps, que cette relation soit mécanique, thermique, chimique, électrique, magnétique, etc." Ce n'est ni cette Force ni ce Mouvement qui restent sur le papier, lorsque la Force ou le Mouvement a cessé d'agir et pourtant quelque chose, que nos sens physiques ne peuvent percevoir, y a été laissé pour devenir à son tour une cause et produire des effets. Qu'est-ce ? Ce n'est pas de la Matière, telle que la définit la Science, c'est-à-dire de la Matière dans l'un des états qui lui sont propres. Un Alchimiste dirait que c'est une sécrétion spirituelle et l'on se moquerait de lui. Pourtant, lorsque les Physiciens ont déclaré que l'électricité emmagasinée est un fluide ou que la lumière fixée sur le papier est toujours la lumière solaire, c'était de la Science. [Les autorités les plus récentes ont, il est vrai, repoussé ces explications comme étant des "théories condamnées" et ont maintenant divinisé le "Mouvement" comme leur seule idole. Mais sûrement eux et leur idole partageront un jour le sort de leurs prédécesseurs.] Un Occultiste plein d'expérience, qui a vérifié toute la série des Nidânas, des causes et des effets qui finissent par produire leur dernier effet sur ce plan de manifestation où nous sommes, quelqu'un qui a suivi la Matière à la trace jusqu'à son Noumène, est d'avis que l'explication donnée par les Physiciens équivaudrait à appeler  la colère, ou ses effets – les exclamations qu'elle provoque – une sécrétion ou un fluide, et l'homme, sa cause et son conducteur matériel.  Ainsi que Grove l'a prophétiquement fait remarquer, le jour approche rapidement où l'on confessera que les Forces que nous connaissons ne sont que les manifestations phénoménales de Réalités au sujet desquelles nous ne savons rien – mais que les Anciens connaissaient et auxquelles ils vouaient un culte.

Il a fait une autre remarque encore plus suggestive, qui aurait dû devenir la devise de la Science ; ce qui n'a pas eu lieu. Sir William Grove a dit que : "La Science ne devrait avoir ni désirs ni préventions. La Vérité devrait être son seul objectif."

En attendant, les Savants sont, de nos jours, plus opiniâtres [II 258] dans leurs idées et plus bigots que le Clergé lui-même, car ils servent la "Force-Matière" qui est leur Dieu Inconnu, si même ils ne l'adorent pas. On peut juger à quel point ce Dieu est inconnu, par les nombreux aveux des Physiciens et des Biologistes les plus éminents, Faraday tout le premier. Non seulement il a dit qu'il n'assumerait jamais la responsabilité de décider si la Force est une propriété ou une fonction de la Matière, mais encore qu'il ne savait réellement pas ce que l'on entendait par le mot matière.

Il fut un temps, ajoutait-il, où il croyait savoir quelque chose au sujet de la Matière, mais plus il, avançait dans la vie, plus il étudiait avec soin et plus il se sentait convaincu de son ignorance au sujet de la nature de la matière 482.

482 Voyez Electric Science de BUCKWELL.

 

[Cette confession de mauvais augure fut faite, croyons-nous, durant un Congrès Scientifique réuni à Swansea. Faraday partageait pourtant la même opinion, ainsi que le déclare Tyndall :

 A part sa force, que savons-nous an sujet de l'atome ? Vous imaginez un noyau central que l'on peut appeler  a et vous l'entourez de forces que l'on peut appeler m ; pour moi a, le noyau central, disparaît et la substance est constituée par la puissance de m. En effet, quelle idée pouvons-nous faire du noyau  central, indépendamment de sa puissance ? Quelles sont les pensées qui subsistent et auxquelles ont peut rattacher l'idée d'un a indépendants les forces reconnues ?]

On comprend souvent mal les Occultistes parce que, faute  de meilleurs termes, ils appliquent à l'Essence de la Force, sous certains aspects, l'épithète descriptive de Substance. Or les noms des variétés de "Substance", sur les différents plans de la perception et de l'être, sont légion. L'Occultisme oriental a un nom différent pour chaque sorte, mais la Science n'en a qu'un seul pour toutes – comme l'Angleterre qui, selon le dire d'un plaisantin Français, est gratifiée de trente-six religions et d'une seule sauce de poissons – et ce seul nom est "Substance". De plus, ni les Physiciens orthodoxes, ni leurs critiques, ne semblent être très sûrs de leurs prémisses et confondent les effets aussi facilement qu'ils confondent les causes. Par exemple, il n'est pas exact de dire, comme le fait Stallo, que "l'on ne peut pas plus se faire une idée de la matière ou la concevoir comme une simple présence positive dans l'espace, que sous forme d'une concrétion de forces", ou que "la force n'est rien sans la masse et la masse rien sans la force", car l'une est le Noumène et l'autre le phénomène. De même, Shelling, lorsqu'il a dit :

C'est une simple illusion de l'imagination que de croire que [II 259] quelque chose, dont nous ignorons la nature, subsiste après que l'on a dépouillé un objet de tous les attributs qui lui appartiennent 483.

483 SHELLING, Ideen, etc., p. 18.

 

n'a jamais pu songer à appliquer cette remarque au royaume de la Métaphysique transcendantale. Il est vrai que la pure Force n'est rien dans le monde de la Physique, mais elle est TOUT dans le domaine de l'Esprit. Stallo dit :

  Si nous réduisons à zéro la masse sur laquelle agit une force donnée si petite qu'elle soit – ou, pour employer un langage mathématique, si nous la réduisons jusqu'à ce qu'elle devienne infiniment petite – cela aura pour conséquence que la vélocité du mouvement qui en résultera sera infiniment grande et que la "chose"... ne se trouvera, à un moment donné, ni ici, ni là, mais partout, qu'il n'existe plus de présence réelle. Il est conséquemment impossible de construire de la matière au moyen d'une synthèse de forces 484.

Cela peut être vrai dans le monde phénoménal, d'autant plus que la réflexion illusoire de l'Unique Réalité du monde super-sensuel peut sembler vraie à un Matérialiste aux conceptions étroites. C'est tout à fait inexact lorsque l'on applique l'argument aux choses qui se trouvent dans ce que les cabalistes appellent les sphères super-mondaines. La prétendue Inertie est une Force, selon Newton 485, et la plus puissante des Forces Occultes aux yeux de l'étudiant des Sciences Esotériques. Ce n'est qu'à titre de supposition, sur ce plan illusoire seulement, qu'un corps peut être considéré comme privé de ses relations avec d'autres corps qui, suivant la physique et la mécanique, donnent naissance à ses attributs. En fait, il ne peut jamais être ainsi séparé, car la mort elle-même est incapable de le dépouiller de ses relations avec les Forces Universelles, dont la FORCE UNIQUE OU VIE est la synthèse : les relations se poursuivent simplement sur un autre plan. Pourtant, si Stallo a raison, que peut vouloir dire le docteur James Croll lorsqu'en parlant de "la Transformation de la Pesanteur", il met en avant les idées soutenues par Faraday, Waterston et autres ? Il dit, en effet, très clairement que la pesanteur est une force répandue dans tout l'Espace, extérieure aux corps et que lorsque les corps se rapprochent les uns des autres, cette force n'est pas accrue comme on le suppose généralement, mais que les corps passent simplement dans un milieu où cette force règne avec une intensité plus grande 486. [II 260]

 484 Op. Cit., p. 161.

485 Princ., Def. III.

486 Philosophical Magazine, Vol. II, p. 252.

 

  Personne ne niera qu'une Force, telle que la pesanteur, l'électricité ou toute autre Force, qui existe hors des corps et dans l'Espace – que cet espace soit l'Ether ou le vide – doit être quelque chose et non pas un rien, lorsqu'on la conçoit indépendamment de la masse. Autrement il serait difficile qu'elle existât dans un endroit avec une "intensité" plus grande et dans un autre avec une moindre. G. A. Hirn dit la même chose dans sa Théorie Mécanique de l'Univers. Il essaie de démontrer :

que l'atome du chimiste n'est pas une entité purement conventionnelle ou simplement un mode explicatif, mais qu'il existe réellement, que son volume est inaltérable et, qu'en conséquence, il n'est pas élastique (! !). Donc la force ne réside pas dans l'atome ; elle réside dans l'espace qui sépare les atomes entre eux.

Les idées que nous venons de citer, et qui sont exprimées par deux Savants très haut placés dans leurs pays respectifs, prouvent qu'il n'est pas le moins du monde antiscientifique de parler de la substantialité des prétendues Forces. Quitte à recevoir plus tard un nom spécifique quelconque, cette Force est de la Substance d'un certain genre et ne saurait être autre chose. Il se peut que la Science soit un jour la première à adopter de nouveau le terme ridiculisé de phlogiston. Quel que soit le nom qu'on lui donnera plus tard, il est suffisamment scientifique de soutenir que cette Force ne réside pas dans les Atomes, mais dans "l'espace qui les sépare" ; pourtant cela n'est point exact. Aux yeux d'un Occultiste, cela équivaudrait à dire que l'eau ne réside pas dans les gouttes qui forment l'océan, mais dans l'espace qui sépare ces gouttes !

L'objection consistant à dire qu'il y a deux catégories distinctes de Physiciens, dont l'une regarde cette force comme une entité substantielle indépendante, qui n'est, ni une propriété de la matière, ni essentiellement en rapport avec la matière 487. n'est guère de nature à aider le profane à comprendre plus clairement. Au contraire, cette objection aurait plutôt pour effet de rendre la question plus confuse que jamais, car la Force ne serait alors ni ceci ni cela. La théorie, en vertu de laquelle on la considère comme une "entité substantielle indépendante", tend une main amie à l'Occultisme, tandis que l'étrange idée contradictoire d'après laquelle cette Force n'est "reliée à la Matière que par le pouvoir qu'elle a d'agir sur elle 488", conduit la Science Physique aux hypothèses [II 261] contradictoires les plus absurdes. Que ce soit une "Force" ou un "Mouvement" (l'Occultisme ne voyant aucune différence entre les deux hypothèses ne cherche jamais à les séparer), cela ne peut agir d'une certaine façon pour ceux qui adhèrent à la théorie atomo- mécanique, à d'une autre façon pour l'école rivale. Il n'est pas non plus possible que, dans un cas, les Atomes aient uniformément la même dimension et le même poids et que, dans l'autre, leur poids soit variable (loi d'Avogadro), car, suivant les paroles du même savant critique :

487 Concepts of Modern Physics, XXXI, Introduction de la 2ème édition.

 

Tandis que l'égalité absolue des unités primordiales de la masse forme ainsi une partie essentielle de la base même de la théorie mécanique, la chimie moderne tout entière est basée sur un principe directement opposé – principe au sujet duquel nous avons dit récemment "qu'il occupait dans la chimie la même place que la gravitation dans l'astronomie 489". Ce principe est connu sous le nom de loi d'Avogadro ou d'Ampère 490.

Cela prouve que la Chimie et la Physique modernes ont des principes fondamentaux absolument faux. En effet, si l'on déclare absurde la supposition de l'existence d'Atomes de densités différentes, en se basant sur la théorie atomique de la Physique et si, pourtant, la Chimie obtient au sujet de cette même supposition "des vérifications expérimentales infaillibles", dans la formation et la transformation des composés chimiques, il devient évident que c'est la théorie atomo-mécanique qui est insoutenable. L'explication que celle-ci donne en disant que "les différences de poids ne sont que des différences de densité et que les différences de densité sont causées par les différences dans la distance qui sépare les particules comprises dans un espace donné", cette explication, dis-je, n'a réellement pas de valeur, car avant qu'un Physicien puisse prétendre pour la défendre que "les atomes [II 262] ne renfermant ni des particules multiples ni un espace vide, il en résulte que toute différence dans la densité ou le poids est impossible dans le cas des atomes", il faut d'abord qu'il sache ce que c'est, en réalité, qu'un Atome et c'est justement ce qu'il ne peut savoir. Il faudrait qu'il le soumît à l'observation de l'un de ses sens physiques au moins – et il ne le peut, pour la raison bien simple que personne n'a jamais vu, senti, entendu, touché ou goûté un "Atome". L'Atome est entièrement du domaine de la Métaphysique. C'est une abstraction transformée en entité – au moins aux yeux de la Science Physique – et qui n'a, strictement parlant, rien à faire avec la Physique, puisque l'on ne peut jamais la soumettre à l'épreuve de la cornue on de la balance. La conception mécanique devient donc un pêle-mêle de  théories et de dilemmes tout à fait contradictoires dans, l'esprit des nombreux Savants qui sont en désaccord sur ce point comme sur d'autres, et les Occultistes Orientaux, qui suivent cette lutte scientifique, assistent à son évolution avec la plus grande stupéfaction.

488 Loc. cit.

489 J.P. COOKE, The New Chemistry, p. 13.

490 "On suppose que des volumes égaux de toutes les substances, lorsqu'elles sont à l'état gazeux et dans les mêmes conditions de pression et de température, contiennent le même nombre  de molécules ; d'où il résulte que le poids des molécules est proportionnel au poids spécifique des gaz, que ces poids spécifiques étant différents, le poids des molécules doit l'être aussi et, comme les molécules de certaines substances élémentaires sont monoatomiques (ou ne sont composées que d'un seul atome), tandis que les molécules de diverses autres substances contiennent le même nombre d'atomes, il en résulte également que les atomes primordiaux de ces substances ont un poids différent." (Concepts of Modern Physics, p. 34.) Comme on le démontre plus loin dans le même ouvrage, ce principe primordial de la chimie théorique moderne ne peut absolument pas se concilier avec la première proposition de la théorie atomo-mécanique, c'est-à-dire l'égalité absolue des unités primordiales des masses.

 

Arrivons à une conclusion au sujet de la pesanteur. Comment la Science peut-elle croire qu'elle ait sur elle des données certaines ? Comment peut-elle défendre ses idées et ses hypothèses contre celles des Occultistes qui ne voient dans la pesanteur que sympathie et antipathie ou attraction et répulsion, causées par la polarité physique de notre plan terrestre et par des causes spirituelles qui échappent à son influence ? Comment les Savants peuvent-ils être en désaccord avec les Occultistes, avant d'être d'accord entre eux ? On entend parler, il est vrai, de la Conservation de l'Energie, et du même coup de la complète dureté et du manque d'élasticité des Atomes ; de la théorie kinétique des gaz, en vertu de laquelle ceux-ci seraient identiques à la prétendue "énergie potentielle" et, en même temps, des unités élémentaires des masses comme étant absolument dures et sans élasticité ! Un Occultiste ouvre un ouvrage scientifique et y lit ce qui suit :

 L'atomisme physique tire toutes les propriétés qualitatives de la matière, des formes du mouvement atomique. Les atomes eux-mêmes restent des éléments absolument dépourvus de qualités 491.

Et ailleurs :

La chimie sous sa forme ultime doit être de la mécanique atomique 492.

Puis, un peu plus tard, on lui dit que : [II 263]

Les gaz sont composés d'atomes qui se comportent comme des sphères solides, parfaitement élastiques 493.

Finalement, et pour couronner le tout, on constate que Sir  W. Thomson déclare que :

La théorie moderne de la conservation de l'énergie nous interdit de croire à l'absence d'élasticité ou à quoi que ce soit hormis à la parfaite élasticité des molécules ultimes, tant de la matière ultra-mondaine que de la matière mondaine 494.

Que disent de tout cela les véritables Savants ! Par  "véritables Savants" nous entendons ceux qui attachent trop de prix à la vérité et trop peu de prix à la vanité personnelle, pour dogmatiser sur quoi que ce soit comme le fait la majorité. Il y a plusieurs hommes parmi eux – peut-être sont-ils plus nombreux que ceux qui avouent ouvertement leurs conclusions secrètes et cela, à cause de la crainte d'entendre crier "Qu'on le lapide !" – il y a, dis-je, plusieurs hommes auxquels leur intuition a permis de franchir l'abîme qui sépare l'aspect terrestre de la Matière et l'aspect qui, pour nous, sur notre plan d'illusions, est subjectif, c'est-à-dire celui de la SUBSTANCE   TRANSCENDANTALEMENT OBJECTIVE et les a conduits à proclamer son existence. N'oublions pas que, pour   l'Occultiste, la Matière est cette totalité des existences dans le cosmos qui sont comprises dans l'un quelconque des plans de la perception possible. Nous ne savons que trop bien que les théories orthodoxes du son, de la chaleur et de la lumière sont contraires aux Doctrines Occultes, mais il ne suffit pas aux Savants et à leurs défenseurs de dire qu'ils ne nient pas la puissance dynamique de la lumière et de la chaleur et de citer, en guise de preuve, le fait que le radiomètre de M. Crookes n'a bouleversé aucune théorie. S'ils veulent comprendre la nature finale de ces Forces, il leur faut d'abord admettre leur nature substantielle, quelque super-sensorielle que soit cette nature. Les Occultistes ne nient pas non plus la justesse de la théorie vibratoire 495. Ils se bornent à en limiter les fonctions à notre Terre, en affirmant son impuissance sur d'autres plans que le nôtre, puisque les Maîtres des Sciences Occultes perçoivent les Causes qui provoquent les vibrations éthériques. Si toutes ces choses n'étaient que des [II 264] fictions d'Alchimistes ou des rêves de Mystiques, il faudrait considérer des hommes tels que Paracelse, Philalethes, Van Helmont et bien d'autres, comme pires que des visionnaires ; ils deviendraient des imposteurs et des mystificateurs volontaires.

491 WUNDT, Die Theorie der Materie, p. 381.

492 NAZESMANN, Thermochemie, p. 150.

493 KRŒNIG, CLAUSIUS MAXWELL, etc., Philosophical Magazine, Vol. XIX, p. 18.

494 Philosophical Magazine, Vol. XIV, p. 321.

 495 Parlant de "l'Aura", un des Maîtres dit dans Le Monde Occulte :

"Comment pourriez-vous vous faire comprendre et, par le fait, vous faire obéir par ces forces semi- intelligentes dont les moyens de communiquer avec nous ne consistent pas en mots articulés, mais se composent de sons et de couleurs en corrélation avec les vibrations des deux." C'est cette "corrélation" qui est inconnue à la Science moderne, bien qu'elle ait été souvent expliquée par les Alchimistes.

496 Toutefois, la Substance de l'occultiste est à la Substance la plus subtile du Physicien, ce que la Matière Rayonnante est au cuir des souliers du Chimiste.

 

 

Les Occultistes sont pris à partie parce qu'ils donnent le nom de Substance à la Cause de la lumière, de la chaleur, du son, de la cohésion, du magnétisme, etc. 496. Clerk Maxwell a établi que la pression d'une puissante lumière solaire sur un mille carré est d'environ 3 livres 1/4. C'est, leur dit-on, "l'énergie des myriades d'ondes éthérées" et lorsqu'ils l'appellent une Substance qui heurte cette surface, on déclare que leur explication est antiscientifique.

Rien ne justifie une semblable accusation. Ainsi que nous l'avons déjà établi plus d'une fois, les Occultistes ne se refusent en aucune façon à admettre que les explications de la Science donnent la solution des agents objectifs immédiats qui sont à l'œuvre. La Science ne se trompe qu'en croyant que, parce qu'elle a découvert dans les ondes vibratoires la cause la plus proche de ces phénomènes, elle a, par cela même, révélé TOUT ce qui se trouve au-delà du seuil des Sens. Elle ne fait que suivre la succession des phénomènes sur le plan des effets, qui sont des projections illusoires provenant de régions où l'Occultisme a pénétré depuis longtemps. Or l'Occultisme affirme que les remous éthériques ne sont pas produits, comme le prétend la Science, par les vibrations de molécules de corps connus, Matière relevant de notre conscience terrestre objective, mais que nous devons chercher les Causes ultimes de la lumière, de la chaleur, etc., dans la MATIERE qui existe dans des états super-sensoriels, états qui sont, toutefois, aussi pleinement objectifs, pour l'œil spirituel de l'homme, qu'un cheval ou un arbre le sont pour le mortel ordinaire. La lumière et la chaleur sont les fantômes ou les ombres de la Matière en mouvement. Ces états peuvent être perçus par le Voyant ou l'Adepte durant les heures de transe, sous le Rayon de Soushoumnâ, le premier des sept Rayons Mystiques du Soleil 497. [II 265] Nous mettons ainsi en avant l'enseignement Occulte qui soutient la réalité d'une essence super-substantielle et supersensible de cet Akâsha – non pas l'Ether, qui n'est que l'un de ses aspects – dont on ne peut déduire la nature, de ses manifestations les plus éloignées, de la simple phalange phénoménale d'effets, sur ce plan terrestre. La Science, au contraire, nous fait savoir que l'on ne peut considérer la chaleur comme étant de la Matière sous une forme concevable quelconque. [Citons un critique très impartial dont personne ne mettra l'autorité en doute, pour rappeler aux dogmatistes Occidentaux que la question ne peut en aucune façon être considérée comme résolue.

497 Les noms des sept rayons – qui sont Soushoumnâ, Harikesha, Vishvakarman, Vishvatryarchâs, Sannaddha, Sarvâvasou et Svarâj – sont tous mystiques et chacun a son emploi distinct dans un état de conscience spécial et pour des buts Occultes. Le Soushoumnâ qui ne sert, ainsi qu'il est dit  dans le Niroukta (II, 6), qu'à éclairer la Lune, est néanmoins le Rayon qu'affectionnent les Yogis initiés. La totalité des Sept Rayons répandus dans tout le Système Solaire constitue, pour ainsi dire, l'Oupâdhi physique (la Base) de l'Ether de la Science : dans cet Oupâdhi, la lumière, la chaleur, l'électricité, etc., c'est-à-dire les Forces de la Science orthodoxe, entrent en corrélation pour produire leurs effets terrestres. En ce qui concerne leurs effets psychiques et spirituels, ils émanent de l'Oupâdhi super-solaire où ils prennent naissance, dans l'Ether de l'occultiste, ou Akâsha.

 

Il n'y a aucune différence fondamentale entre la lumière et la chaleur... chacune des deux n'est qu'une simple métamorphose de l'autre....La chaleur, c'est de la lumière dans un repos complet. La lumière, c'est de la chaleur en mouvement rapide. Dès que la lumière est combinée avec un corps, elle devient chaleur, mais lorsqu'elle est rejetée de ce corps, elle devient de nouveau lumière 498.

498 Fluid Theory of Light and Heat de LESLIE.

499 History of Civilisation de BUCKLE, Vol. III, p. 384.

  

Nous ne pouvons dire si cela est vrai ou faux, et bien des années, peut- être bien des générations, passeront avant que nous ne soyons en état de le dire 499.] On nous dit aussi que les deux grands obstacles contre lesquels se heurte la théorie fluidique (?) de la chaleur sont incontestablement :

  1. La production de la chaleur par le frottement ; l'excitation du mouvement moléculaire ;
  2. La transformation de la chaleur en mouvement mécanique.

La réponse que l'on donne, c'est qu'il y a des fluides de diverses sortes. On appelle l'électricité un fluide et il en était de même de la chaleur tout récemment encore, mais c'est parce que l'on supposait que la chaleur était une sorte de substance impondérable. Cela se passait à l'époque de la suprématie autocratique de la Matière. Lorsquela Matière fut détrônée et que le MOUVEMENT fut proclamé l'unique souverain maître  de l'Univers, la chaleur devint un "mode  de  mouvement". Ne  désespérons pas ; il est possible qu'elle devienne quelque chose d'autre demain. Tout comme l'Univers, la Science devient sans cesse et ne peut jamais dire "Je suis ce que je suis". D'autre part, la Science Occulte a ses traditions invariables depuis les temps préhistoriques. Elle [II 266] peut se tromper dans les détails ; elle ne peut jamais se rendre coupable d'une erreur dans les questions de la Loi Universelle, pour la raison bien simple que cette Science, que la Philosophie qualifie avec raison de "Divine", est née sur des plans supérieurs et a été apportée à la Terre par des Etres plus éclairés que ne le sera l'homme, même durant la Septième Race de la Septième Ronde. Cette Science maintient que les Forces ne sont pas ce que l'enseignement moderne voudrait en faire, c'est-à-dire que le magnétisme n'est pas un "mode de mouvement" et dans ce cas particulier, au moins, la Science moderne exacte est certaine d'éprouver un beau jour des déceptions. Rien, au premier abord, ne peut sembler plus ridicule, plus outrageusement absurde, que de dire, par exemple : Le Yogi Hindou initié en sait réellement dix fois plus que le plus grand Physicien européen – sur la nature ultime et la constitution de la lumière, tant solaire que lunaire, cependant, pourquoi le Rayon de Soushoumnâ est-il considéré comme étant celui qui fournit à la Lune sa lumière d'emprunt ? Pourquoi est-il "le Rayon bien-aimé des Yogis initiés" ? Pourquoi ces mêmes Yogis considèrent-ils la Lune comme la Divinité du Mental ? C'est, dirons-nous, parce que la lumière, ou, plutôt, toutes ses propriétés Occultes, toutes ses combinaisons et ses corrélations avec d'autres forces, mentales, psychiques et spirituelles, étaient parfaitement connues des anciens Adeptes.

En conséquence, bien que la Science Occulte puisse être moins bien informée que la Chimie moderne, sur le comportement des éléments composés, dans des cas divers de corrélation physique 500, elle n'en est pas moins, par sa connaissance des états Occultes ultimes de la Matière et de la vraie nature de la Matière, immensément supérieure à tous les Physiciens et tous les Chimistes que notre époque peut rassembler.

500 Dans l'édition de 1888 le texte est : En conséquence, quoique la science occulte puisse être moins bien informée du comportement des éléments composés dans divers cas de corrélation physique, dans sa connaissance de la constitution ultime de la matière, ou dans la prétendue analyse ultime, par opposition à l'analyse proche en chimie...

 

Or si nous disons la vérité ouvertement et en toute sincérité, à savoir que les anciens Initiés possédaient une connaissance de la Physique, comme Science de Nature, bien plus étendue que celle que possèdent nos Académie des Sciences, toutes ensemble, l'assertion sera considérée comme une impertinence et une absurdité, car on estime que les Sciences Physiques ont atteint, à notre époque, le summum de la perfection. C'est ce qui a provoqué la question pleine de critique : Les Occultistes peuvent-ils expliquer d'une manière satisfaisante ces deux points

  1. la production de la chaleur par le frottement, l'excitation du mouvement moléculaire – [II 267] et
  2. la transformation de la chaleur en mouvement mécanique, s'ils s'en tiennent à la théorie antique et condamnée qui veut que la chaleur soit une substance ou un fluide ?

Pour répondre à cette question, il faut d'abord faire observer que les Sciences Occultes ne considèrent ni l'électricité ni aucune des Forces auxquelles elle est supposée donner naissance, comme de la Matière dans l'un des états que connaît la Science Physique. Pour parler plus clairement, aucune de ces prétendues "forces" n'est ni un solide, ni un gaz, ni un fluide. N'était la crainte de paraître pédant, un Occultiste s'opposerait même à ce que l'électricité fût appelée un fluide – attendu que c'est un effet et non une cause. Par contre, il dirait que son Noumène est une Cause Consciente. Il en est de même pour la "Force" et pour "l'Atome". Voyons ce qu'un Académicien éminent, le Chimiste Butlerof, a à dire au sujet de ces deux abstractions. Ce grand Savant s'exprime ainsi :

Qu'est-ce que la Force ? Qu'est-ce au point de vue strictement scientifique et comme le certifie la loi de conservation de l'énergie ? Nos conceptions de la Force se résument dans notre conception de tel ou tel mode de mouvement. La Force est donc simplement le passage d'un état de mouvement à un autre ; la transformation de l'électricité en chaleur et lumière, de la chaleur en son ou en une fonction mécanique et ainsi de suite 501. La première fois que le fluide électrique fut produit par l'homme sur la terre, cela a dû être par frottement ; c'est donc, on le sait bien, la chaleur qui le produit, en détruisant l'équilibre de son état  zéro 502  et l'électricité, per se, n'existe pas plus sur la terre que la chaleur, la lumière ou toute autre force. Elles sont toutes des corrélations comme dit la Science. Lorsqu'une quantité donnée de chaleur, à l'aide d'une machine à vapeur, est transformée en travail mécanique, nous parlons de la puissance de la vapeur ou (force). Lorsqu'un corps qui tombe rencontre un obstacle sur sa route et que cela donne naissance à de la chaleur et à du son, nous appelons cela la puissance de la collision. Lorsque l'électricité décompose l'eau ou chauffe un fil de platine, nous parlons de la force du fluide électrique. Lorsque les rayons du soleil sont interceptés par le réservoir d'un thermomètre et que le mercure qu'il renferme se dilate, nous parlons de l'énergie calorique du soleil. Bref, lorsqu'un état de mouvement, d'une intensité déterminée, cesse, un autre état de mouvement, équivalent au précédent,  prend  sa  place  et  le  résultat  d'une  pareille transformation ou corrélation est – la Force. Dans tous les cas où une transformation de ce genre, c'est-à-dire le passage d'un état de mouvement à un autre, [II 268] fait entièrement défaut, il n'y a pas de force possible. Admettons pour un instant un état absolument homogène de l'Univers et notre conception de la Force se réduit à zéro.

501 Il peut en être ainsi sur le plan de la manifestation et de la matière illusoire ; non pas que cela ne soit rien de plus, car c'est énormément plus.

502 Neutre, ou Laya.

 

Il devient donc évident que la Force, que le Matérialisme considère comme la cause de la diversité qui nous entoure, n'est en réalité qu'un effet, un résultat de cette diversité. En se plaçant à ce point de vue, la Force n'est pas la cause du mouvement, mais un résultat, tandis que la cause de cette Force ou de ces forces n'est pas la Substance ou Matière, mais le Mouvement lui-même. La Matière doit être ainsi écartée et, avec elle, le principe qui sert de base au Matérialisme et qui est devenu inutile, puisque la Force, ramenée à un état de mouvement, ne peut donner aucune idée de la Substance. Sila Force est le résultat du mouvement, il devient alors impossible de comprendre pourquoi ce mouvement deviendrait le témoin de la Matière et non pas de l'Esprit ou d'une essence Spirituelle. Il est exact que notre raison ne peut concevoir l'idée d'un mouvement sans quelque chose qui se meut (et notre raison est dans le vrai), mais la nature ou être de ce quelque chose qui se meut demeure absolument inconnue à la Science et, dans un cas pareil, le Spiritualiste a autant de droits de l'attribuer à un "Esprit", que le Matérialiste de l'attribuer à la Matière créatrice et toute-puissante. Un Matérialiste ne jouit d'aucun privilège en pareil cas et n'a le droit d'en réclamer aucun. Il est démontré, comme on le voit, que la loi de conservation de l'énergie émet dans ce cas des prétentions qui ne sont pas légitimes. Le "grand dogme" : Pas de force sans matière et pas de matière sans force, s'effondre et perd complètement la signification solennelle que le Matérialisme s'est efforcé  de lui donner. La conception de la Force ne donne encore aucune idée de la Matière et ne nous oblige en aucune façon à voir en elle "l'origine de toutes les origines 503".

503 Scientific Letters, par le professeur A. Butlerof.

 

On nous assure que la Science moderne n'est pas Matérialiste et notre propre conviction nous porte à croire qu'elle ne peut l'être, lorsque son savoir est réel. Il y a de bonnes raisons pour cela, bien précisées par quelques Physiciens et Chimistes. Les Sciences Naturelles ne peuvent aller de pair avec le Matérialisme. Pour être à la hauteur de leur mission, les Savants doivent repousser jusqu'à la possibilité que les doctrines Matérialistes aient quoi que ce soit à faire avec la Théorie Atomique et nous constatons que Lange, Butlerof, du Bois Reymond – ce dernier sans doute inconsciemment – et plusieurs autres, l'ont prouvé. C'est, en outre, démontré par ce fait que Kanâda, en Inde, Leucippe et Démocrite, en Grèce, puis après eux Epicure – les premiers Atomistes en Europe – tout en propageant leur doctrine des proportions déterminées, croyaient en des Dieux ou entités super-sensorielles. Leurs idées sur la Matière différaient donc de celles qui ont cours aujourd'hui. On nous permettra de rendre notre exposé [II 269] plus clair au moyen d'un court examen synoptique des opinions des Philosophies anciennes et modernes sur les Atomes et de prouver ainsi que la Théorie Atomique tue le Matérialisme.

En se plaçant au point de vue du Matérialisme qui ramène l'origine de tout à la Matière, l'Univers est composé, en entier, par des Atomes et du vide. Même en laissant de côté l'axiome enseigné par les Anciens et dont la justesse est aujourd'hui absolument démontrée par le télescope et le microscope, axiome qui dit que la Nature a horreur du vide, qu'est-ce qu'un Atome ? Le professeur Butlerof écrit :

C'est, nous dit la Science, la division limitée de la Substance, la particule indivisible de Matière. Admettre la divisibilité de l'atome, équivaut à admettre une divisibilité infinie de la substance, ce qui revient à déduire la Substance a nihil ou au néant. Obéissant simplement au souci de sa propre conservation, le Matérialisme ne peut admettre la divisibilité infinie, autrement il lui faudrait rompre à jamais avec son principe de base et signer ainsi sa propre condamnation à mort 504.

504 Ibid.

 

Par exemple, Büchner, en vrai dogmatiste du Matérialisme qu'il est, déclare que :

Accepter la divisibilité infinie est absurde et équivaut à mettre en doute l'existence même de la Matière.

L'Atome est donc indivisible, dit le Matérialisme ! Très bien. Butlerof répond à cela :

Voyez donc jusqu'à quelle curieuse contradiction ce principe fondamental des Matérialistes les conduit. L'atome est indivisible et en même temps nous savons qu'il est élastique. On ne peut songer un instant à le dépouiller de son élasticité ; ce serait absurde.  Des atomes absolument non-élastiques ne produiraient pas un seul des nombreux phénomènes qui sont attribués à leurs corrélations. Sans élasticité, les atomes ne pourraient pas manifester leur énergie et la Substance des Matérialistes resterait privée de toutes forces. Il en résulte que si l'Univers est composé d'atomes, ceux-ci doivent être élastiques. C'est là que nous nous trouvons en présence d'un obstacle insurmontable. En effet, quelles sont les conditions requises pour la manifestation de l'élasticité ? Une balle élastique, lorsqu'elle est projetée contre un obstacle, est aplatie et se contracte, ce qu'il lui serait impossible de faire si cette balle n'était pas composée de particules dont la position relative subit un changement temporaire, au moment du choc. On peut dire cela de l'élasticité en général ; il n'y a pas d'élasticité possible sans changement dans la position des particules qui composent un corps élastique. Ceci veut dire qu'un corps élastique est changeant et [II 270] qu'il est composé de particules, ou, en d'autres termes, que l'élasticité est une propriété qui ne peut appartenir qu'aux corps qui sont divisibles. Or l'atome est élastique 505.

Cela suffit à démontrer à quel point il est absurde d'admettre simultanément la non-divisibilité et l'élasticité de l'Atome. L'Atome est élastique, donc l'Atome est divisible et doit être composé de particules ou de sous-atomes. Que sont donc ces sous-atomes ? Ou bien ils ne sont pas élastiques, et dans ce cas ils n'ont aucune importance dynamique, ou bien ils sont élastiques aussi, et dans ce cas ils sont, eux aussi, susceptibles d'être divisés. Il en est ainsi ad infinitum, mais la divisibilité infinie des Atomes réduit la Matière à de simples centres de Force, c'est-à-dire écarte la possibilité de concevoir la Matière comme une substance objective.

Ce cercle vicieux est fatal au Matérialisme. Il se trouve pris dans ses propres filets et le dilemme est, pour lui, sans issue possible. S'il dit que l'Atome est indivisible, la mécanique lui posera l'embarrassante question suivante :

Dans ce cas comment l'Univers se meut-il et comment ses forces entrent-elles en corrélation ? Un monde composé d'atomes absolument non-élastiques est comme une machine sans vapeur ; il est condamné à l'éternelle inertie 506.

505 Ibid.

506 Ibid.

 

Acceptez les explications et les enseignements de l'Occultisme et – comme l'aveugle inertie de la Science Physique se trouvera remplacée par les Puissances actives et intelligentes qui sont derrière le voile de la Matière – le mouvement et l'inertie seront subordonnés à ces Puissances. Toute la Science de l'Occultisme se construit sur la doctrine de la nature illusoire de la Matière et de la divisibilité infinie de l'Atome. Elle ouvre des horizons sans limites à la substance par le souffle divin de son Ame, dans tous les états les plus ténus où elle peut se trouver, états dont les Chimistes et les Physiciens les plus portés à la spiritualité n'ont même pas encore rêvé.

Les vues ci-dessus ont été énoncées par un Académicien qui est le plus grand Chimiste de Russie et dont l'Europe elle-même reconnaît la supériorité, feu le professeur Butlerof. Il est vrai qu'il prenait la défense des phénomènes spirites, les matérialisations, comme on les appelle, auxquelles il croyait, tout comme les professeurs Zöllner et Hare, ainsi qu'y croient encore A. Russel Wallace, le professeur W. Crookes et bien d'autres Membres de la Société Royale, que ce soit ouvertement ou en secret. Toutefois, son argument en ce qui concerne la nature de l'Essence qui agit derrière les [II 271] phénomènes physiques de lumière, de chaleur, d'électricité, etc., n'en est pas pour cela moins scientifique, n'en  a pas moins d'autorité et s'applique admirablement à la question actuelle. La Science n'a pas le droit de refuser aux Occultistes de se réclamer d'une plus profonde connaissance des dites Forces qui, disent-ils, ne sont que les effets de causes générées par des Puissances substantielles, mais pourtant super-sensorielles et situées au-delà de tous les genres de Matière que les Savants ont appris à connaître jusqu'à présent. Tout ce que la Science peut faire, c'est de prendre et de conserver une attitude Agnostique. Elle peut alors dire : Votre position n'est pas plus prouvée que la nôtre, mais nous reconnaissons qu'en réalité nous ne savons rien de la Force ou de la Matière, ou de ce qu'il y a au fond de ce qu'on appelle la corrélation des Forces. Par suite, le temps seul peut prouver qui a raison et qui a tort. Attendons patiemment et, jusque là, faisons preuve de mutuelle courtoisie au lieu de nous moquer les uns des autres.

Pour faire cela, il faut avoir un amour infini de la vérité et renoncer au prestige de cette infaillibilité, si fausse qu'elle soit, que la masse des profanes, ignorante et légère, bien que cultivée, prête aux hommes de Science. Le mélange des deux Sciences, l'Archaïque et la Moderne, nécessite en premier lieu l'abandon des tendances Matérialistes actuelles. Ce mélange réclame une sorte de Mysticisme religieux et même l'étude de l'antique Magie, que nos Académiciens ne voudront jamais entreprendre. Cette nécessité s'explique facilement. Exactement comme la vraie signification des Substances et des Eléments qui sont mentionnés dans les anciens ouvrages d'Alchimie est cachée sous les métaphores les plus ridicules, la nature physique, psychique et spirituelle des Eléments (du Feu, par exemple) est cachée, dans les Védas et surtout dans les Pourânas, sous des allégories que les initiés, seuls, sont capables de comprendre. Si ces allégories n'avaient aucune signification, toutes ces longues légendes et ces allégories au sujet du caractère sacré des trois types de Feu et des quarante-neuf Feux originaux, personnifiés par les Fils des Filles de Daksha et par les Richis, leurs maris, "qui constituent les Quarante-neuf Feux, avec le premier Fils de Brahmâ et ses trois descendants", ne seraient plus qu'un verbiage idiot, mais il n'en est pas ainsi. Chaque Feu a une fonction et une signification distinctes dans les mondes physique et spirituel. Il a, de plus, dans sa nature essentielle, une relation qui correspond à l'une des facultés psychiques de l'homme, sans parier de ses pouvoirs chimique et physiques bien déterminés, lorsqu'il entre en contact avec de la Matière différenciée comme elle est sur la terre. La Science n'a aucune théorie à offrir au sujet du Feu per se, tandis [II 272] que l'Occultisme et l'antique Science religieuse en ont. Cela est prouvé, même par la phraséologie maigre et intentionnellement voilée des Pourânas où, comme dans la Vâyou Pourâna, beaucoup des qualités des Feux personnifiés sont expliquées. Ainsi Pâvaka est le Feu Electrique ou Vaidyouta ; Pavamâna, le Feu produit par frottement ou Nirmathya ; et Shouchi, le Feu Solaire ou Saura 507 – et tous ces feux sont les fils d'Abhimânin, l'Agni (Feu), le fils aîné de Brahmâ et de Svâhâ. De plus, Pâvaka est représenté comme le parent de Kavyavâhana, le Feu des Pitris : Shouchi comme celui de Havyavâhana, le Feu des Dieux ; et Pavamâna comme celui de Saharaksha, le Feu des Asouras. Tout cela montre que les auteurs des Pourânas étaient parfaitement au courant des Forces de la Science et de leurs corrélations, comme des diverses qualités de ces dernières, dans leur action sur les phénomènes psychiques et physiques auxquels la Science Physique ne croit pas et qui lui sont inconnus. Tout naturellement, lorsqu'un Orientaliste, surtout un de ceux dont les tendances sont matérialistes, dit que ce ne sont que des noms donnés au Feu et employés dans les invocations et les rituels, il appelle cela "une superstition et une mystification Tântrika" et apporte plus de soins à éviter une erreur d'orthographe qu'à rechercher les significations secrètes attachées à ces personnifications, ou à en trouver l'explication dans les corrélations physiques des Forces, en tant que celles-ci sont connues. On croit, en vérité, si peu au savoir des anciens Aryens, que même des passages aussi lumineux que celui de la Vishnou Pourâna, que nous donnons ci-dessous, ne sont nullement remarqués. Pourtant que peut vouloir dire cette phrase ?

Alors l'éther, l'air, la lumière, l'eau et la terre, unis individuellement aux propriétés du son et du repos, existaient   et pouvaient être distingués suivant leurs qualités... mais, possédant des énergies nombreuses et variées et n'étant pas reliés entre eux, ils ne pouvaient, sans combinaison, créer des êtres vivants, ne s'étant pas encore mélangés les uns aux autres. C'est pourquoi, s'étant combinés entre eux, ils revêtirent, en vertu de leur association mutuelle, le caractère d'une masse unique d'entière unité, et sous la direction de l'esprit, etc. 508

Cela veut dire, bien entendu, que les auteurs connaissaient parfaitement la corrélation et étaient bien renseignés sur l'origine du Cosmos tiré du "Principe non différencié", Avyaktânougrahena, qu'on applique conjointement à Parabrahman et à Mūlaprakriti et non à "Avyakta, Cause Première ou Matière", comme le dit Wilson. Les antiques Initiés [II 273] ne connaissaient aucune "création miraculeuse", mais enseignaient l'évolution des Atomes, sur notre plan physique et leur première différenciation de Laya en Protyle, nom suggestif que  M. Crookes a donné à la Matière ou substance primordiale au-delà de la ligne zéro, là où nous plaçons Mūlaprakriti, le principe radical des Matériaux Terrestres et de tout dans le Monde.

Cela peut être facilement démontré. Prenez, par exemple, le catéchisme, récemment publié, des Védantins Vishishthâdvaita, système orthodoxe et exotérique qui était pourtant pleinement énoncé et enseigné au onzième siècle 509, à une époque où la "Science" européenne croyait encore à la Terre carrée et plate de Cosmas Indicopleustes du sixième siècle. Ce système enseigne qu'avant le début de l'évolution, Prakriti, la Nature, était dans un état Laya ou état d'homogénéité absolue, car "la matière existe sous deux formes, la Soûkshma, ou forme latente et non différenciée et la Sthoûla, ou forme différenciée". Elle devient alors Anou, ou atomique. Ce même système nous parle de Souddasattva, "substance qui n'est pas soumise aux qualités de la matière, dont elle diffère complètement" et ajoute que c'est de cette substance que sont formés les corps des Dieux, les habitants de Vaikounthaloka, le Ciel de Vishnou. Il nous enseigne que chaque fragment ou atome de Prakriti renferme Jîva (vie divine) et constitue le Sharîra (corps) de ce Jîva qu'il renferme, tandis que chaque Jîva est à son tour le Sharîra de l'Esprit Suprême,  car  "Parabrahman pénètre chaque Jîva de même que chaque fragment de matière". Quelque dualiste et anthropomorphique que soit la philosophie des Vishishthâdvaita, lorsqu'on la compare à celle des Advaita – les non- dualistes – elle est d'une logique et d'une philosophie incomparablement plus élevées que la Cosmogonie qui est acceptée, tant par la Chrétienté que par son grand adversaire la Science moderne. Disciples d'une des plus grandes intelligences qui aient jamais paru sur la terre, les Védantins Advaita sont appelés des Athées, parce qu'ils regardent tout comme illusoire, sauf Parabrahman, le sans second ou l'Absolue Réalité. Pourtant les plus sages Initiés, comme aussi les plus grands Yogîs, sont sortis de leurs rangs. Les Oupanishads prouvent qu'ils ne se bornaient très certainement pas à savoir ce qu'est la substance causale dans les effets de frottement et que leurs ancêtres connaissaient, non seulement la transformation de la chaleur en force mécanique, mais encore le Noumène de tous les phénomènes, tant spirituels que cosmiques.

508 I, II (Wilson, I, 38).

509 Son fondateur, Râmânoujâchârya, naquit en 1017 après J.-C

 

En vérité, le jeune Brâhmane qui gagne avec les plus grands honneurs ses diplômes dans les Universités et les [II 274] Collèges de l'Inde, qui entre dans la vie en qualité de M. A. ou de L. L. B. 510, avec toute la série des lettres, depuis Alpha jusqu'à Oméga, à la suite de son nom et avec un mépris pour ses Dieux nationaux proportionnel aux honneurs qu'il a conquis dans ses études des Sciences Physiques, en vérité, ce jeune Brâhmane n'a qu'à lire, en s'inspirant de ces dernières et en ne perdant pas de vue la corrélation des Forces physiques, certains passages de ses Pourânas, s'il veut apprendre à quel point ses ancêtres en savaient plus qu'il n'en saura jamais – à moins qu'il ne devienne un Occultiste.  Qu'il se reporte à l'allégorie des Pouroûravas et du Gandharva céleste 511  qui fournit aux premiers un récipient plein de feu céleste. La méthode primitive d'obtenir du feu par le frottement a son explication scientifique dans les Védas, et elle est grosse de sens pour celui qui lit entre les lignes. La Tretâgni (triade sacrée des feux) obtenue au moyen de l'attrition de bâtons taillés dans le bois de l'arbre Ashvattha, l'arbre Bo de la Sagesse et du Savoir, bâtons "ayant la longueur d'autant d'épaisseurs de doigts qu'il y a de syllabes dans la Gâyatrî", doit avoir une signification secrète, sans quoi les auteurs des Védas et des Pourânas n'auraient pas été des écrivains sacrés, mais des mystificateurs. Les Occultistes Hindous sont la preuve qu'il y a une telle signification, et eux seuls sont capables d'éclairer la Science sur la question de savoir pourquoi et comment le Feu, qui était unique à l'origine, a été fait triple (tridhâ) dans notre Manvantara actuel, par le fils d'Ilâ (Vâch), la Femme Primordiale après le Déluge, l'épouse et fille de Vaivasvata Manou. L'allégorie est suggestive, quelle que soit la Pourâna dans laquelle on puisse la lire et l'étudier.

 

510 M. A., maître ès arts ou licencié ès lettres : L. L. B., bachelier en droit (Note du traducteur).

511 Le Gandharva de la Védaest la divinité qui connaît et révèle aux mortels les secrets du ciel et les vérités divines. Au point de vue cosmique, les Gandharvas représentent l'agrégat des Pouvoirs du Feu Solaire et constituent ses Forces ; au point de vue psychique, ils représentent l'Intelligence résidant dans la Soushoumnâ, le Rayon Solaire, le plus élevé des Sept Rayons ; au point de vue mystique, ils représentent la Force Occulte de Soma, la Lune ou plante lunaire et la boisson qui en est tirée ; au point de vue physique et au point de vue spirituel, ils représentent les causes respectivement phénoménales et nouménales du Son et la "Voix de la Nature". C'est pourquoi ils sont appelés les 6.333 chanteurs et musiciens célestes du Loka d'Indra, qui personnifient, même en nombre, les divers et multiples sons de la Nature, tant en haut qu'en bas. Dans les plus récentes allégories, on leur attribue un pouvoir mystique sur les femmes et un penchant pour elles. La signification Esotérique est évidente. Ils constituent l'une des formes, sinon les prototypes des Anges d'Enoch, les Fils de Dieu, qui reconnurent que les filles des hommes étaient belles (Genèse, VI), les épousèrent et enseignèrent aux filles de la Terre les secrets du Ciel.

[II 275]