STANCE IX
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L'EVOLUTION FINALE DE L'HOMME
- Les créateurs se repentent.
- Ils expient leur négligence.
- Les hommes deviennent doués d'un mental.
- La Quatrième Race développe le langage parfait.
- Chaque unité androgyne est séparée et devient bisexuée.
Shloka 33. Les créateurs se repentent.
Voyant cela 463 les Lhas 464 qui n'avaient pas construit des hommes 465 pleurèrent en disant :
463 Le péché commis avec les animaux.
464 Les Esprits, les "Fils de la Sagesse".
465 Qui avaient refusé de "créer".
Shloka 34. Ils expient leur négligence.
"Les Amânasa 466 ont souillé nos futures demeures. C'est Karma. Habitons dans les autres. Instruisons-les mieux, de peur qu'il n'arrive pire." Ils le firent...
466 Sans-mental.
Shloka 35. Les hommes deviennent doués d'un mental.
Alors tous les hommes furent doués de Manas 467. Ils virent le péché des dépourvus de mental. [III 239]
Mais ils étaient déjà séparés avant que le rayon de raison divine n'eût illuminé les sombres régions de leur mental assoupi jusque-là et ils avaient péché. C'est-à-dire qu'ils avaient fait le mal inconsciemment, en produisant un effet qui n'était pas naturel. Pourtant, comme les six autres races sœurs primitives, cette septième race désormais dégénérée, qui devra attendre l'heure de son développement final, à cause du péché commis – cette race elle-même, dis-je, se trouvera au dernier jour sur l'une des Sept Voies. Car :
Les Sages 468 veillent sur l'ordre de la nature ; ils assument d'excellentes formes en secret. 469
467 Le Mental.
468 Ce verset du Rig Véda (X, 5, 6) : "Les Sept Sages [Rayons de Sagesse, Dhyânis] façonnent Sept Sentiers [ou Lignes et aussi Races dans un autre sens]. Les mortels malheureux pourront atteindre l'une de celles-ci" – verset qui, interprété au seul point de vue astronomique et cosmique, est l'un des plus riches en signification occulte. Les "Sentiers" peuvent signifier des Lignes (Maryâdâh), mais ce sont originairement des Rayons de Lumière, tombant sur les Sentiers qui conduisent à la Sagesse (Voyez le Rig Véda, IV, 5-13). Cela veut dire des "Voies" ou sentiers. Bref, ce sont les sept Rayons qui tombent librement du Centre Macrocosmique, les sept Principes dans le sens métaphysique et les sept Races, dans le sens physique. Tout dépend de la clef que l'on emploie.
469 Rig Véda, X, 10, 5, 2.
Mais il nous faut voir si les "animaux" auxquels ils s'étaient mêlés, étaient du même genre que ceux que connaît la Zoologie.
La "Chute" se produisit, suivant le témoignage de la Sagesse antique et des vieilles archives, aussitôt que Daksha – le Créateur réincarné des hommes et des choses du commencement de la Troisième Race – eut disparu pour faire place à la portion de l'humanité qui s'était "séparée". Voici comment sont expliqués, dans un Commentaire, les détails qui précédèrent la "Chute" :
Durant la période initiale de la Quatrième Evolution, le règne humain se ramifia dans plusieurs directions différentes. La forme extérieure de ses premiers spécimens n'était pas uniforme, car les véhicules [les coques extérieures ovoïdes, dans lesquelles se faisait la gestation du futur homme complètement humain], avant d'avoir durci, se mêlaient souvent à d'énormes animaux, d'une espèce aujourd'hui inconnue, qui était le produit des efforts tentés par la Nature. Il en résulta des races intermédiaires de monstres, mi-animaux et mi-hommes. Mais comme elles étaient des insuccès, il ne leur fut pas permis de respirer longtemps et de vivre, bien qu'en raison [III 240] de ce que le pouvoir de la nature psychique, intrinsèquement souverain sur la nature physique, fût encore très faible et à peine établi, les Fils "Nés-de-l'Œuf" se fussent accouplés avec plusieurs de leurs femelles et eussent donné naissance à d'autres monstres humains. Plus tard, les espèces animales et les races humaines s'étant graduellement équilibrées, elles se séparèrent et ne s'accouplèrent plus. L'homme ne créa plus – il engendra. Mais au temps jadis, il engendra des animaux aussi bien que des hommes. Aussi les Sages [ou hommes sages] qui parlent de mâles qui n'avaient plus de progénitures conçues par la volonté, mais qui engendraient divers animaux, en même temps que les Dânavas [Géants], avec des femelles d'autres espèces – animaux qui étaient pour eux comme des fils putatifs [ou du même genre] et [eux les mâles humains] refusant, le temps venu, qu'on les considérât comme les pères [putatifs] des créatures muettes – ces Sages parlaient avec véracité et sagesse. En voyant cela [cet état de choses], les Rois et les Seigneurs des dernières Races [de la Troisième et de la Quatrième] mirent le sceau de la prohibition sur ces rapports coupables. Cela dérangeait le Karma, cela développait du nouveau [Karma] 470. Eux [les Rois Divins] frappèrent les coupables de stérilité. Ils détruisirent la race Rouge et la race Bleue 471.
470 Il est presque impossible de traduire littéralement certains de ces antiques Commentaires. Nous sommes souvent obligés de n'en donner que le sens et par suite, de traduire à nouveau les traductions littérales.
471 Roudra, en qualité de Koûmara, est Nîlalohita – rouge et bleu.
Dans un autre Commentaire, nous trouvons :
Il existait des hommes-animaux à la face bleue et à la face rouge, même à des époques postérieures ; ils ne provenaient pas de rapports sexuels réels [entre les espèces humaine et animale], mais étaient des descendants.
Dans un autre passage encore, on mentionne :
Des hommes au teint basané, aux cheveux rouges, qui allaient à quatre pattes, qui se courbaient et se redressaient [se tenaient debout, puis retombaient sur leurs mains], qui parlaient comme leurs aïeux et qui couraient sur leurs mains comme leurs aïeules géantes.
Les Hæckeliens reconnaîtraient peut-être dans ces spécimens, non pas le Homo Primigenius mais quelques tribus inférieures, comme certaines tribus de sauvages Australiens. Néanmoins, même ceux-ci ne descendent eux-mêmes pas des [III 241] singes anthropoïdes, mais de pères humains et de mères à demi-humaines, ou, pour être plus exact, de monstres humains – les "insuccès" dont fait mention le premier Commentaire. Les véritables anthropoïdes, les Catarrhiniens et les Platyrrhiniens de Hæckel, apparurent bien plus tard, vers la fin de la période atlantéenne. L'Orang- Outang, le Gorille, le Chimpanzé et le Cynocéphale sont les évolutions purement physiques les plus récentes des mammifères anthropoïdes. Ils ont en eux une étincelle de l'essence purement humaine ; l'homme, par contre, n'a pas dans ses veines une seule goutte de sang pithécoïde 472. Ainsi l'affirment la Sagesse antique et la tradition universelle.
472 Cela sans tenir compte de l'évolution matérialiste moderne, dont les spéculations sont les suivantes : "La forme humaine primitive, du sein de laquelle nous pensons qu'ont jailli toutes les espèces humaines, a péri depuis longtemps. [Nous nions cela : elle a seulement diminué de taille et changé de texture]. Mais bien des détails nous amènent à conclure qu'elle était poilue et dolichocéphale. [Les races Africaines sont, même maintenant, dolichocéphales dans une large mesure, mais le crâne paléolithique de Neanderthal, le plus ancien que nous connaissions, est de grande taille et ne se rapproche pas plus de la capacité du crâne d'un gorille, que celui de n'importe quel homme vivant actuel]. Appelons, pour le moment, cette espèce hypothétique homo primigenius... Cette première espèce, ou homme-singe, l'ancêtre de tous les autres, naquit, probablement, dans les régions tropicales du monde ancien, de singes anthropoïdes." Si on lui demande des preuves, l'Evolutionniste répond, sans se laisser démonter le moins du monde : "De ces espèces aucun vestige fossile ne nous est encore connu, mais elles étaient probablement apparentées au Gorille et à l'Orang de nos jours." On mentionne ensuite le nègre Papou, comme un descendant probable en première ligne. (Pedigree of Man, p. 80.) [E. Hæckel, La Descendance de l'Homme, V. trad. française.]
Hæckel s'attache à la Lémurie qu'il mentionne, avec l'Afrique Orientale et l'Asie Méridionale, comme pouvant avoir été le berceau de l'Homme-singe primitif. Beaucoup de Géologues en font autant. M. A.R. Wallace en admet la réalité, bien que dans un sens plutôt modifié, dans sa Geographical Distribution of Animals. Les Evolutionnistes ne devraient pas cependant parler aussi légèrement du volume comparatif du cerveau de l'homme et du singe, car c'est très antiscientifique, surtout lorsqu'ils prétendent ne trouver aucune différence entre les deux, ou, du moins, n'en trouver que très peu. En effet, Vogt lui-même a établi que, tandis que le plus élevé des singes, le Gorille, possède un cerveau dont le volume n'est que de 30 à 51 pouces cubiques [un pouce cubique vaut 16,38 centimètres cubes], le cerveau du plus inférieur des aborigènes Australiens a un volume de 99 35 pouces cubiques. Le cerveau du Gorille n'atteint donc pas "la moitié du volume du cerveau d'un enfant nouveau-né", dit Pfaff.
Comment la séparation des sexes s'effectua-t-elle, demande-t-on ? Devons-nous croire à l'antique fable Juive de la côte d'Adam qui produisit Eve ? Une telle croyance serait elle-même plus logique et plus raisonnable que la descente de l'homme des Quadrumanes, acceptée sans réserves ; car celle-là cache une vérité ésotérique sous une version fabuleuse, [III 242] tandis que celle-ci ne recèle rien de plus que le désir de faire accepter à l'humanité une fiction matérialiste. La côte est un os et lorsque nous lisons dans la Genèsequ'Eve fut formée d'une côte, cela veut simplement dire que la Race pourvue d'os fut produite par une ou plusieurs Races antérieures qui étaient "dépourvues d'os". C'est une doctrine Esotérique répandue partout. Elle est presque universelle sous ses différentes formes.
Une tradition Tahitienne dit que l'homme fut créé avec l'Aræa "la terre rouge". Taaroa, le Pouvoir Créateur, le Dieu principal, "met l'homme en sommeil durant de longues années, durant plusieurs existences". Cela se rapporte à des périodes raciales et c'est une allusion à son sommeil mental comme nous l'avons indiqué ailleurs. Durant ce temps, la divinité tira de l'homme un Ivi (os) qui devint une femme 473.
473 Polynesian Resaurches, d'Ellis, vol. II, p. 38. Les Missionnaires semblent avoir fondu sur ce nom d'Ivi et en avoir fait Eve, mais, comme le démontre le professeur Max Muller, Eve n'est pas le nom hébreu, mais une transformation européenne de הוה, Châvah, vie, ou mère de tous les vivants, "tandis que le mot tahitien ivi et le mot maori wheva voulaient dire os et pas autre chose". (Introduction to the Science of Religion, p. 304.)
Néanmoins, quel que soit le sens de l'allégorie, elle nécessite, même dans son sens exotérique, un Constructeur divin de l'homme – un "Progéniteur". Croyons-nous donc à l'existence de pareils Etres "surnaturels" ? Nous répondons : Non ! L'Occultisme n'a jamais cru à l'existence de quoi que ce soit d'animé ou d'inanimé en dehors de la Nature. Nous ne sommes pas non plus des Cosmolâtres ou des Polythéistes, parce que nous croyons à "l'Homme Céleste" et aux Hommes Divins, attendu que nous pouvons nous appuyer en cela sur les témoignages accumulés des temps passés et sur les éléments de preuves invariables qu'ils nous fournissent sur tous les points essentiels, c'est-à-dire sur la Sagesse des Anciens et sur la tradition UNIVERSELLE. Nous repoussons cependant les traditions sans fondement qui ont dépassé la mesure de la stricte allégorie et du symbolisme, bien qu'elles aient pu être acceptées dans les croyances exotériques. Par contre, tout ce que nous a conservé la tradition unanime ne saurait être repoussé que par ceux qui sont volontairement aveugles. Nous croyons donc à l'existence de races d'Etres autres que dans la nôtre, durant des périodes géologiques d'une antiquité très reculée ; à l'existence de races d'Hommes éthérés, qui vinrent après les Hommes incorporels (Aroupa), ayant une forme mais pas de substance solide, géants qui vinrent avant nous pygmées ; à l'existence de Dynasties d'Etres Divins, Rois et [III 243] Instructeurs de la Troisième Race dans les arts et les sciences, en présence desquels notre petite Science moderne, si on la comparait à eux, ferait moins bonne figure que l'arithmétique élémentaire, devant la géométrie.
Non, certainement non ! Nous ne croyons pas à l'existence d'intelligences surnaturelles, mais seulement à celle d'intelligences super-humaines ou plutôt inter-humaines. On comprend aisément la répugnance qu'éprouverait une personne instruite à se voir classer parmi les superstitieux et les ignorants et l'on se rend compte de la grande vérité qu'a exprimée Renan lorsqu'il a dit :
Le surnaturel est devenu, tout comme le petit péché originel, une tache dont il semble que tout le monde ait honte – même les personnes les plus religieuses, qui, de nos jours, refusent d'accepter, dans toute leur crudité, fût- ce une faible partie des miracles de la Bible et qui, cherchant à les réduire à un minimum, les cachent dans les recoins les plus éloignés du passé. 474
474 Chaire d'Hébreu au Collège de France, p. 20.
Mais le "surnaturel" de Renan relève des dogmes et de leur lettre morte. Il n'a aucun rapport avec leur esprit ou avec la réalité des faits de la Nature. Sila Théologie nous invite à croire, qu'il y a quatre ou cinq mille ans seulement, les hommes vivaient 900 ans et plus et qu'une partie de l'humanité, comprenant exclusivement les ennemis du peuple d'Israël, était composée de géants et de monstres, nous refusons d'admettre l'existence d'un pareil fait dans la Nature, il y a cinq mille ans seulement. En effet, la Nature ne procède jamais par sauts ; la logique et le sens commun, sans parler de la Géologie, de l'Anthropologie et de l'Ethnologie, se sont révoltés à juste titre contre de pareilles assertions. Mais si cette même Théologie, abandonnant sa chronologie fantastique, venait nous dire que les hommes vivaient 969 ans – l'âge de Mathusalem – il y a cinq millions d'années, nous n'aurions aucune objection à faire, car, à cette époque, la charpente physique de l'homme comparée au corps humain actuel, en différait autant qu'un Mégalosaure d'un lézard ordinaire.
Un Naturaliste suggère une autre difficulté. L'espèce humaine est la seule qui puisse, quelque inégales que soient ses races, se reproduire entre elles. "Il n'est pas question de sélection parmi les races humaines, disent les Antidarwinistes" et aucun Evolutionniste ne peut nier la valeur de cet argument – qui établit triomphalement l'unité spécifique. Comment l'Occultisme peut-il donc insister sur ce fait qu'une [III 244] partie de la Quatrième Race engendra des petits avec ces femelles appartenant à une autre race, qui n'était qu'à demi-humaine, sinon tout à fait animale et que les êtres hybrides résultant de cette union, non seulement enfantèrent librement, mais encore donnèrent naissance aux ancêtres des singes anthropoïdes modernes ? La Science Esotérique répond que cela se passait au moment où l'homme physique venait à peine de paraître. Depuis lors, la Nature a changé de méthode et la stérilité est le seul résultat du crime de bestialité commis par l'homme. Nous en avons, même de nos jours, des preuves. La DOCTRINE SECRETE enseigne que l'unité spécifique de l'humanité comporte des exceptions, même maintenant. Il existe, en effet, ou plutôt il existait il y a quelques années, des descendants de ces tribus ou races mi-animales, d'origine antique Lémurienne et d'origine Lémuro- Atlantéenne. Le monde les connaît sous le nom de Tasmaniens (aujourd'hui éteints), d'Australiens, d'insulaires des îles Adaman, etc. La ligne de descente des Tasmaniens peut être presque prouvée par un fait qui frappa vivement Darwin, sans qu'il fût capable d'en tirer quelque chose. Ce fait mérite d'être décrit.
De Quatrefages et d'autres Naturalistes, qui cherchent à établir la Monogenèse, en s'appuyant sur le fait que chacune des races de l'humanité est susceptible de se croiser avec toutes les autres, n'ont pas tenu compte, dans leurs calculs, des exceptions qui, dans ce cas, ne confirment pas la règle. Les croisements humains peuvent avoir été la loi générale à partir du moment de la séparation des sexes, mais cela n'empêche pas une autre loi de s'affirmer : celle de la stérilité entre deux races humaines, exactement comme entre deux espèces animales différentes, dans les rares cas où un Européen, condescendant à traiter une femelle de tribu sauvage en compagne, laisse tomber son choix sur un membre d'une de ces tribus mêlées 475. Darwin signale ce cas dans une tribu [III 245] Tasmanienne, dont les femmes furent soudainement frappées de stérilité, en masse, quelques temps après l'arrivée parmi elles de colons Européens. Le grand Naturaliste chercha à expliquer ce fait par un changement de régime, par les conditions alimentaires, etc., puis finit par renoncer à trouver la solution de ce mystère. Pour l'Occultiste, la chose est très claire. Le "croisement", comme l'on dit, d'Européens avec des femmes Tasmaniennes – c'est-à-dire avec les représentantes d'une race dont les progéniteurs furent des monstres "sans Ame" 476 et sans mental, accouplées avec des hommes vraiment humains, bien que toujours aussi dépourvus de mental – provoqua la stérilité et cela, non seulement comme conséquence d'une loi physiologique, mais encore en vertu d'un décret de l'évolution Karmique au sujet de la prolongation de l'existence d'une race anormale. La Science n'est pas encore préparée à accepter un seul des points que nous venons d'exposer – mais, à la longue, il faudra qu'elle en vienne là. La Philosophie Esotérique, ne l'oublions pas, ne fait que combler les lacunes laissées par la Science et corrige les erreurs de ses prémisses.
475 Les seuls survivants de ces êtres semi-animaux que connaisse l'Ethnologie, sont les Tasmaniens, une partie des Australiens et une tribu de montagnards de Chine, dont les hommes et les femmes étaient entièrement couverts de poils. C'étaient les derniers descendants en ligne directe des derniers Lémuriens semi-animaux dont il a été question. Il existe, toutefois, un nombre considérable de représentants des peuplades mélangées Lémuro-Atlantéennes produits par divers croisements avec ce stock semi-humain – par exemple les hommes sauvages de Bornéo, les Veddahs de Ceylan, classés par le professeur Flower parmi les Aryens (!), la majeure partie du reste des Australiens, les Bushmen, les Négrites, les insulaires des îles Adaman, etc.
Les Australiens du Golfe de Saint-Vincent et des environs d'Adélaïde sont très velus et le duvet brun, qui recouvre la peau des petits garçons de cinq à six ans, revêt l'aspect d'une fourrure. Si dégradés qu'ils soient, ce sont cependant des hommes ! Ils n'ont pas le moindre rapport avec l'homme "pithécoïde" comme l'affirme sans ménagement Hæckel. Une partie seulement de ces hommes représente un reliquat Lémurien. (Cf. Bouddhisme Esotérique, pp. 64 et seq.
476 En qualifiant les animaux de "sans Ame" nous n'entendons pas dépouiller les bêtes, depuis la plus humble jusqu'à la plus haute, de la possession d'une Ame, mais seulement de celle d'une Ame- Ego consciente et qui survit, c'est-à-dire de ce principe qui survit à l'homme et se réincarne dans un homme semblable. L'animal possède un Corps Astral qui survit à la forme physique pendant une courte période de temps, néanmoins sa Monade (animale) ne se réincarne pas dans la même espèce, mais dans une espèce supérieure et ne jouit d'aucun "Dévachan", bien entendu. Elle renferme en elle les germes de tous les principes humains, mais ils sont à l'état latent.
Pourtant, dans ce cas particulier, la Géologie et même la Botanique et la Zoologie, appuient les Enseignements Esotériques. De nombreux Géologues ont émis l'opinion que l'origine de l'aborigène Australien – qui cœxiste avec une faune et une flore archaïques – doit remonter à une antiquité excessivement reculée. Tout ce qui entoure cette race mystérieuse, sur l'origine de laquelle l'Ethnologie garde le silence, témoigne de l'exactitude du point de vue ésotérique. Comme le dit Jukes :
Un fait très curieux, c'est que non seulement ces marsupiaux [les mammifères trouvés dans les champs de pierres schisteuses de l'Oxfordshire], mais encore plusieurs des coquillages – comme, par exemple, les Trigonias et même quelques-unes des plantes fossiles trouvées dans les roches Oolithiques – se rapprochent beaucoup plus de ceux qui existent actuellement en Australie, que de toutes formes vivantes de n'importe quelle autre partie du globe. On pourrait l'expliquer en supposant que depuis la période Oolithique [Jurassique], les changements ont été moindres en [III 246] Australie que partout ailleurs et, qu'en conséquence, la faune et la flore Australiennes ont conservé quelque chose du type Oolithique, alors que ce type aurait été complètement supplanté et remplacé sur le reste du globe [!!]. 477
Or, pourquoi les changements ont-ils été moindres en Australie qu'ailleurs ? Quelle est la raison d'être d'une pareille "malédiction de retard" ? C'est simplement parce que la nature du milieu ambiant se développe pari passu avec la race qu'il concerne. Les correspondances règnent partout. Les survivants des derniers Lémuriens, qui échappèrent à la destruction qui atteignit leurs compagnons lorsque le continent principal fut submergé, devinrent les ancêtres d'une partie des tribus aborigènes actuelles. Comme ils appartenaient à une sous-race très inférieure, à l'origine engendrée d'animaux, de monstres, dont les fossiles eux-mêmes reposent maintenant à des kilomètres sous le fond de la mer, leur groupe a vécu, depuis lors, dans un milieu fortement soumis à la loi de retardement. L'Australie est l'une des plus anciennes des terres actuellement émergées et elle a atteint la décrépitude sénile de la vieillesse, en dépit de son "sol vierge". Elle ne put produire aucune forme nouvelle, à moins d'être aidée par de nouvelles races et par une culture et un élevage artificiels.
Revenons-en encore une fois à l'histoire de la Troisième Race, les "Nés-de-la-Sueur", les "Ovipares" et les Androgynes. Presque asexuée, à ses premiers débuts, elle devint bisexuée ou androgyne ; graduellement, cela va sans dire. Le passage de la première à la dernière transformation nécessita d'innombrables générations, au cours desquelles la cellule simple qui émana du premier ancêtre (les deux en un), se développa d'abord en un être bisexué, puis la cellule, devenant un œuf régulier, donna naissance à une créature unisexuée. L'Humanité de la Troisième Race est la plus mystérieuse de toutes les cinq races qui se sont développées jusqu'à présent. Le mystère du "Comment" se produisit la génération des sexes distincts doit, bien entendu, rester ici obscur, car cette question est du ressort de l'embryologiste et du spécialiste ; l'ouvrage que nous écrivons ne donne qu'une faible esquisse du processus. Mais il est évident que les unités humaines de la Troisième Race commencèrent à se séparer dans leurs coquilles pré-natales, ou œufs 478 et en sortirent [III 247] sous forme de petits enfants, distinctement mâles et femelles, des âges après l'apparition de leurs premiers progéniteurs. A mesure que s'écoulaient les périodes géologiques, les sous-races nouvellement nées commencèrent à perdre leurs capacités natales. Vers la fin de la quatrième sous-race de la Troisième Race, le petit enfant perdit la faculté de marcher aussitôt qu'il était sorti de sa coquille et vers la fin de la cinquième, l'humanité naquit dans les mêmes conditions que nos générations historiques et en vertu d'un processus identique. Il fallut naturellement des millions d'années pour en arriver là. Le lecteur a été mis au courant des chiffres approximatifs ; tout au moins en ce qui concerne les calculs exotériques 479.
477 Manual of Geology, p. 302.
478 Les "fables" et les "mythes", au sujet de Léda et de Jupiter et autres du même genre, n'auraient jamais pu jaillir de l'imagination des gens, si l'allégorie n'avait été basée sur un fait de la Nature. L'évolution, transformant graduellement l'homme en un mammifère, ne fit pour lui que ce qu'elle faisait pour les autres animaux, mais cela n'empêche pas l'homme d'avoir toujours marché en tête du monde animal et des autres espèces organiques et d'avoir précédé le monde animal.
479 Voyez la Section qui traite de la "Chronologie des Brahmanes", p. 82.
Nous approchons du point tournant de l'évolution des Races. Voyons ce que dit la Philosophie Occulte, au sujet de l'origine du langage.
Shloka 36. La Quatrième Race développe le langage parfait.
La Quatrième Race développa la parole.
Les Commentaires expliquent que la Première Race – la Race éthérée ou les Fils astrals du Yoga, appelés aussi les "Autogénérés" – était, au sens que nous donnons à ce mot, dépourvue de langage, car elle était dépourvue de mental sur notre plan. La Seconde Race possédait un "langage composé de sons", c'est-à-dire des sons chantants composés uniquement de voyelles. La Troisième Race développa d'abord un genre de langage qui ne constituait qu'un léger perfectionnement des divers sons de la Nature, des cris des gigantesques insectes et des premiers animaux qui, toutefois, naissaient à peine à l'époque des "Nés-de-la-Sueur", ou début de la Troisième Race. Dans la seconde moitié, quand les "Nés-de-la-Sueur" donnèrent naissance aux "Nés-de-l'Œuf", c'est-à-dire durant la Troisième Race moyenne, et lorsque ceux-ci, au lieu "d'éclore" – que le lecteur me pardonne cette expression plutôt ridicule, à notre époque, lorsqu'elle s'applique à des humains – sous forme d'êtres androgynes, commencèrent à se séparer en mâles et femelles et que la même loi d'évolution les amena à se reproduire d'une manière sexuelle – acte qui obligea les Dieux Créateurs, poussés par la loi Karmique, à s'incarner dans des hommes sans mental ; alors seulement le langage se développa. La race humaine tout entière, à cette époque, "parlait une seule et unique [III 248] langue". Cela n'empêcha pas les deux dernières sous-races de la Troisième Race 480 de bâtir des villes et de répandre au loin les premiers germes de la civilisation, sous la direction de leurs Divins Instructeurs 481 et sous l'impulsion de leur mental déjà éveillé. Que le lecteur n'oublie pas que si chacune des sept Races se divise en quatre âges – les Ages d'Or, d'Argent, de Bronze et de Fer – il en est de même de la plus petite division de chacune d'elles. Le langage se développa alors, suivant l'Enseignement Occulte, dans l'ordre suivant :
- Langage Monosyllabique : Langage des premiers êtres humains qui furent à peu près complètement développés à la fin de la Troisième Race-Racine, des hommes "dorés", au teint jaune, après leur séparation en sexes et l'éveil complet de leur mental. Avant cela, ils communiquaient entre eux au moyen de ce que nous appellerions la "transmission de pensée", bien qu'à l'exception de la Race appelée les "Fils de la Volonté et du Yoga"
– la première dans laquelle s'étaient incarnés les "Fils de la Sagesse" – la pensée ne fût que très peu développée chez l'homme physique naissant et ne s'élevât jamais au-dessus d'un bas niveau terrestre. Les corps physiques appartenant à la Terre, les Monades restèrent entièrement sur un plan plus élevé. Le langage ne pouvait se bien développer avant l'acquisition et le développement complet de la faculté de raisonnement. Ce langage monosyllabique fut, en quelque sorte, le père vocalique de la langue monosyllabique, mêlée de consonnes dures, qui est encore en usage parmi les races jaunes connues des Anthropologues 482.
480 Pour éviter toute confusion, que le lecteur se souvienne que le terme de Race-Racine s'applique à l'une des sept grandes Races, celui de sous-race à l'une de ses grandes Branches et celui de famille à l'une de ses subdivisions qui comprennent des nations et des grandes tribus.
481 Dans la Section qui traite de la "Cinquième Race et ses Divins Instructeurs", dans le Commentaire sur la Stance XII, la nature de ces "Instructeurs" est expliquée.
482 Les races jaunes actuelles descendent, toutefois, des premières branches de la Quatrième Race. Quant à la Troisième, ses seuls descendants purs et directs sont représentés, comme nous l'avons dit plus haut, par une partie des Australiens déchus et dégénérés, dont les ancêtres éloignés appartenaient à une division de la septième sous-race de la Troisième. Le reste a une origine mêlée, Lémuro-Atlantéenne. Ils ont, depuis lors, complètement changé au point de vue de la stature et des capacités intellectuelles.
483 Le langage est certainement contemporain de la raison et n'aurait jamais pu être développé avant que les hommes ne se fussent unifiés avec les principes animants qui étaient en eux – ces principes qui fécondèrent et éveillèrent à la vie l'élément manasique dormant, chez l'homme primitif. En effet, comme nous le dit le professeur Max Muller dans sa Science of Though : "la Pensée et le Langage sont identiques". Mais il est un peu aventureux d'ajouter que les pensées, qui sont trop profondes pour pouvoir être exprimées par des mots, n'existent, en réalité, pas du tout, attendu que les pensées imprimées sur les tablettes astrales existent éternellement, qu'elles soient exprimées ou non. Logos veut dire à la fois raison et discours, mais le langage qui procède par cycles, n'est pas toujours apte à exprimer des pensées spirituelles. De plus, dans un certain sens, le mot grec Logos équivaut au mot sanscrit Vâch, "l'immortel (intellectuel) rayon de l'esprit" et le fait que Vâch (en temps que Dévasénâ, aspect de Saravastî, la Déesse de la Sagesse Occulte) est l'épouse de l'éternellement vierge Koumâra, dévoile un rapport suggestif, bien que dissimulé, avec les Koumâras, qui "refusèrent de créer", mais furent contraints, plus tard, à compléter l'Homme divin en s'incarnant en lui. Tout cela sera complètement expliqué dans les Sections suivantes.
- Langage Agglutinant : Ces caractéristiques du langage formèrent, en se développant, les langues agglutinantes. Celles-ci étaient parlées par quelques races Atlantéennes, tandis que d'autres ancêtres de la Quatrième race conservèrent la langue mère. Comme les langues ont leur évolution cyclique, leur enfance, leur pureté, leur croissance, leur chute [III 249] dans la matière, leur mélange avec d'autres langues, leur maturité, leur déclin et enfin leur mort 483, la langue primitive des races Atlantéennes les plus civilisées – cette langue à laquelle il est fait allusion dans les anciens ouvrages Sanscrits, sous le nom de Râkshasî Bhâshâ – tomba en décadence et s'éteignit presque complètement. Tandis que la "crème" dela Quatrième Race s'élevait de plus en plus vers le sommet de l'évolution physique et intellectuelle, laissant ainsi àla Cinquième Race(Aryenne) naissante, en guise d'héritage, des langues hautement développées, le langage agglutiné déclina et ne subsista que comme idiome fragmentaire fossile, aujourd'hui éparpillé et presque limité aux tribus aborigènes de l'Amérique.
- Langage à flexions : La racine du Sanscrit – appelé, bien à tort, la "sœur aînée" du grec, au lieu d'être appelé sa mère – fut la première langue de la Cinquième Race et c'est aujourd'hui le langage de mystère des Initiés. Les langues "Sémitiques" sont les descendantes bâtardes des premières corruptions phonétiques, des plus anciens enfants du Sanscrit primitif. La Doctrine Occulte n'admet pas de division en Aryens et en Sémites et n'accepte même les Touraniens qu'en faisant d'amples réserves. Les Sémites, et spécialement les Arabes, sont des Aryens plus récents – dégénérés au point de vue spirituel et perfectionnés au point de vue matériel. A cette catégorie appartiennent tous les Juifs et les Arabes. Les premiers sont une tribu qui descend des Chandâlas de l'Inde, des hors-caste, dont un grand nombre étaient d'ex- Brahmanes, qui cherchèrent refuge en Chaldée, dans le Scinde [Sind] et dans l'Aria (Iran) et ils naquirent effectivement de leur père A-Bram (Non-Brahmane) quelque 8.000 ans avant J.-C. Les [III 250] derniers, les Arabes, sont les descendants des Aryens qui ne voulurent pas aller aux Indes, à l'époque de la dispersion des nations et dont quelques-uns demeurèrent sur ses frontières, dans l'Afghanistan et à Kaboul 484, et le long de l'Oxus, tandis que d'autres pénétrèrent dans l'Arabie en envahisseurs. Toutefois, cela se produisit après que l'Afrique eut émergé et fut devenue un continent.
En attendant, il nous faut suivre d'aussi près que nous le permettra l'espace limité dont nous disposons, l'évolution graduelle de l'espèce, maintenant vraiment humaine. Pour trouver l'origine des anthropoïdes, nous devons étudier l'arrêt subit de l'évolution de certaines sous-races et leur déviation vers une ligne purement animale, au moyen de croisements artificiels, absolument analogues aux procédés d'hybridation que nous avons appris à utiliser dans le règne végétal et le règne animal.
Dans ces monstres velus et roux, fruits de rapports contre-nature entre des hommes et des animaux, les "Seigneurs de Sagesse" ne s'incarnèrent pas, comme nous le voyons. Ainsi, une longue série de transformations dues à des croisements contre-nature – à une "sélection sexuelle" anti- naturelle – finit, avec le temps, par donner naissance aux spécimens les plus bas de l'humanité, tandis qu'une bestialité plus complète [III 251] et le fruit de leurs premiers efforts animaux de reproduction, engendrèrent une espèce qui, en se développant, devint, bien plus tard, les singes mammifères 485.
484 Ptolémée, parlant dans sa neuvième table des Kabolitæ ou tribus de Kaboul, les appelle les Άριστόφυλοι, Aristophyli, les tribus aristocratiques ou nobles. Les Afgans se donnent à eux-mêmes le nom de Ben-Issraël, enfants de Is-(sa)-raël, de Issa, "femme et aussi terre", les fils de notre Mère la Terre ; mais si vous appeliez un Afghan Yahoudi (Juif), il vous tuerait. Les noms des douze tribus supposées des Juifs et des véritables tribus des Afghans, sont les mêmes. Comme les Afghans (ou du moins leur fond arabe) sont beaucoup plus anciens que les Israélites, personne ne doit être surpris de trouver parmi eux des noms de tribus comme les Youssoufzic, fils de Joseph, dans le Punjcaure et le Boonere ; les Zablistani (Zabulon) ; les Benmanassé, fils de Manassé parmi les Tartares Khojar ; les Isaguri (Issachar), aujourd'hui les Ashnagor en Afghanistan, etc. Les douze noms des prétendues douze tribus ne sont autres que les noms des signes du Zodiaque, comme c'est pleinement établi aujourd'hui. En tout cas les noms des plus anciennes tribus Arabes, lorsqu'on les retranslitère, donnent les noms des signes du Zodiaque, et il en est de même de ceux des fils mythiques de Jacob. Où retrouve-t-on les traces des douze tribus juives ? Nulle part, mais il existe des traces et des traces profondes que les Juifs ont essayé de tromper le monde à l'aide de ces noms. Voyez, en effet, ce qui se passa bien des siècles après que les dix tribus eurent complètement disparu de Babylone. Ptolémée Philadelphe, désirant que la Loi hébraïque fut traduite pour lui en Grec (la fameuse version des Septante), écrivit à Eléazar, grand prêtre des Juifs, de lui envoyer six hommes de chacune des douze tribus et les soixante-douze représentants (dont soixante étaient apparemment des fantômes) se rendirent en Egypte auprès du roi et traduisirent la Loi au milieu de miracles et de merveilles. Voyez Horæ Bibliæ, de Butler, Josèphe et Philon le Juif.
485 Le Commentaire explique que les singes sont les seuls de tous les animaux qui montrent, graduellement et dans chaque génération et variété, une tendance à retourner de plus en plus au type primitif de leurs ancêtres mâles – les sombres et gigantesques Lémuriens et Atlantéens.
Quant à la séparation des sexes, elle ne se produisit pas soudainement, comme on pourrait le croire. La Nature procède lentement dans tout ce qu'elle fait.
Shloka 37. Chaque unité androgyne est séparée et devient bisexuée.
L'un 486 devint deux ; de même toutes les choses vivantes et rampantes qui étaient encore unes, les poissons géants, les oiseaux et les serpents à têtes couvertes d'écailles.
486 L'Androgyne.
Cela a évidemment trait à ce que l'on appelle l'âge des reptiles amphibies, durant lequel la Science nie que l'homme ait existé ! Mais que pouvaient savoir les Anciens au sujet des animaux et des monstres préhistoriques et antédiluviens ? Néanmoins, dans le Livre VI des Commentaires se trouve un passage qui, traduit librement, est ainsi conçu :
Lorsque la Troisième se sépara et tomba dans le péché en procréant des animaux hommes, ceux-ci [les animaux] devinrent féroces et les hommes et eux devinrent mutuellement destructeurs. Jusqu'alors il n'y avait pas eu de péché, pas de meurtre. Après [la séparation], le Satya [Youga] prit fin. Le printemps éternel devint soumis à de constants changements et les saisons se succédèrent. Le froid obligea les hommes à construire des abris et à imaginer des vêtements. L'homme fit alors appel aux Pères supérieurs [les Dieux ou Anges supérieurs]. Les Nirmânakâyas des Nâgas, les sages Serpents et Dragons de Lumière vinrent, ainsi que les précurseurs des Illuminés [les Bouddhas]. Des Rois Divins descendirent et enseignèrent aux hommes les sciences et les arts, car l'homme ne pouvait vivre plus longtemps dans la première terre [Adi-Varsha, l'Eden des premières Races], qui était devenue un cadavre blanc et glacé.
Ce qui précède est suggestif. Nous verrons ce que l'on peut déduire de ce bref exposé. Quelques personnes pourraient être [III 252] portées à penser qu'il renferme plus que ce qui se voit au premier coup d'œil.
EDENS, SERPENTS ET DRAGONS
D'où vient l'idée et la véritable signification du mot "Eden" ? Les Chrétiens soutiendront que le Jardin d'Eden est le saint Paradis, l'endroit profané par le péché d'Adam et d'Eve ; l'Occultiste refusera d'admettre cette interprétation de la lettre morte et prouvera le contraire. On n'a pas besoin de croire à la Bibleet de la considérer comme une révélation divine, pour dire que cet antique livre, si on le lit ésotériquement, est basé sur les mêmes traditions universelles que les autres écritures anciennes. Ce qu'était l'Eden est partiellement exposé dans Isis Dévoilée, où il est dit que :
Le Jardin d'Eden, en tant que localité, n'est pas du tout un mythe ; c'est un de ces points de repère de l'histoire qui font parfois voir à l'étudiant que la Biblen'est pas tout entière une simple allégorie. "Eden, ou le mot hébreu ןדע- ןג, Gan-Eden, qui veut dire Pare ou Jardin d'Eden, est un nom archaïque de la contrée arrosée par l'Euphrate et ses nombreux affluents, depuis l'Asie et l'Arménie jusqu'à la mer Erythrée." 487 Dans le Livre des Nombres Chaldéen, son emplacement est désigné numériquement et dans le manuscrit chiffré Rosicrucien, laissé par le Comte de Saint-Germain, il est complètement décrit. Dans les Tablettes Assyriennes, il est désigné sous le nom de Gan- duniyas. "Vois, dit le םיהלא Elohim, de la Genèse, l'homme est devenu comme l'un de nous". Elohim peut être accepté, dans un sens, comme voulant dire dieux ou pouvoirs et, dans un autre sens, comme signifiant Aleim, ou prêtres – les hiérophantes initiés au bien et au mal de ce monde ; il existait, en effet, un collège de prêtres appelés les Aleim, tandis que le premier de leur caste, ou chef des hiérophantes, était connu sous le nom de Java- Aleim. Au lieu de devenir un néophyte et d'obtenir graduellement ses connaissances ésotériques par l'initiation régulière, un Adam, ou Homme, emploie ses facultés intuitives et poussé par le serpent – Femme et Matière – goûte illégalement aux fruits de l'Arbre de la Science, la doctrine ésotérique ou secrète. Les prêtres d'Hercule, ou Mel-Karth, le "Seigneur" de l'Eden, portaient tous "des vêtements de peau". Le texte dit : "Et Java-Aleim fit pour Adam et son épouse des רועתונתכ, CHITONUTHOUR". Le premier mot hébreu, Chiton, est le mot grec Χιτὼν (Chiton). Cela devint un mot Slavon, adopté de la Bible, et cela veut dire un manteau, un vêtement extérieur. [III 253]
487 Docteur A. Wilder, qui dit que Gan-duniyas est un des noms de la Babylonie.
Bien qu'elles renferment le même substratum de vérité ésotérique que toute Cosmogonie primitive, les Ecritures Hébraïques portent ostensiblement les traces d'une double origine. Leur Genèse est, purement et simplement, une réminiscence de la captivité de Babylone. L'origine des noms des localités, des hommes et même des objets, que renferme le texte original, peut être retrouvée chez les Chaldéens et les Akkadiens, progéniteurs et instructeurs Aryens des premiers. On conteste fortement que les tribus Akkad de Chaldée, de Babylonie et d'Assyrie aient eu un lien de parenté quelconque avec les Brahmanes de l'Indoustan, mais les preuves en faveur de cette opinion sont plus nombreuses que les preuves contraires. Les Shémites ou Assyriens auraient, peut-être, dû être appelés des Touraniens, et les Mongols des Scythes ; mais si les Akkadiens ont jamais existé, autrement que dans l'imagination de certains Philosophes et Ethnologues, ils n'ont certainement jamais constitué une tribu Touranienne, comme certains Assyriologues ont cherché à nous le faire croire. C'étaient simplement des émigrants des Indes, berceau de l'humanité, en route pour l'Asie Mineure, et leurs adeptes sacerdotaux restèrent en arrière pour civiliser et initier un peuple barbare. Ha'évy a prouvé la fausseté de la manie Touranienne, en ce qui concerne le peuple Akkadien... et d'autres savants ont établi que la civilisation Babylonienne n'est pas née dans ce pays et ne s'y est pas développée. Elle fut importée des Indes et les importateurs étaient des Hindous Brahmaniques 488.
488 Isis Dévoilée, vol. II, p. 399, 400.
Et maintenant, dix ans après que cela a été écrit, nous voyons nos dires corroborés par le professeur Sayce, qui dit, dans la première de ses Hibbert Lectures, que la culture de la ville babylonienne d'Eridou était "d'importation étrangère". Elle lui vint des Indes.
Une grande partie de la théologie fut empruntée par les Sémites aux non-Sémites Akkadiens ou Proto-Chaldéens, qu'ils supplantèrent et dont ils n'avaient ni le désir, ni le pouvoir de déraciner les cultes locaux. En vérité, durant le cours de longs âges, les deux races des Sémites et des Akkadiens vécurent côte à côte, tandis que leurs notions et leurs cultes des Dieux se mélangeaient insensiblement.
Ici, on qualifie les Akkadiens de "non-Sémites", ainsi que nous l'avons soutenu dans Isis Dévoilée, et c'est une nouvelle corroboration. Nous ne sommes pas moins dans le vrai en soutenant toujours que l'histoire biblique Juive était une compilation de faits historiques, tirés de l'histoire des autres peuples et arrangés à la mode Juive – sauf la Genèse, qui [III 254] est de l'Esotérisme pur et simple. C'est réellement entre le Pont- Euxin et le Cachemire et au-delà que la Science doit chercher le berceau – ou plutôt l'un des principaux berceaux – de l'humanité et des fils de Ad- ah ; surtout aux époques postérieures, lorsque le Jardin d'Ed-en sur l'Euphrate devint le Collège des Astrologues et des Mages, des Aleim.
Toutefois, ce "Collège" et cet Eden appartiennent à la Cinquième Race et ne constituent que de faibles réminiscences de l'Adi-Varsha, de la Troisième Race primitive. Quel est le sens étymologique du mot Eden ? En Grec, c'est ὴδουή, qui veut dire "volupté". Sous cet aspect, ce n'est rien de mieux que l'Olympe des Grecs, le Ciel d'Indra, Svarga sur le mont Mérou et même le Paradis plein de Houris, promis par Mahomet aux fidèles. Le Jardin d'Eden n'a jamais été la propriété des Juifs, car la Chine, que l'on ne saurait guère suspecter d'avoir eu la moindre connaissance des Juifs 2.000 ans avant J.-C., avait, dans l'Asie Centrale, un Jardin primitif de ce genre, habité par les "Dragons de Sagesse", les Initiés et, suivant Klaproth, la carte hiéroglyphique, tirée d'une encyclopédie japonaise, qui se trouve dans le livre intitulé Foè-Kouè-Ki 489, place le "Jardin de Sagesse" sur le Plateau de Pamir, entre les pics les plus élevés de la chaîne des Himalayas. Après l'avoir décrit comme le point culminant de l'Asie Centrale, on nous montre les quatre fleuves – l'Oxus, l'Indus, le Gange et le Silo – jaillissant d'une source commune, le "Lac des Dragons".
Ce n'est cependant pas l'Eden de la Genèse, pas plus que le Jardin Cabalistique de l'Eden. Le premier, en effet – l'Eden Illa-ah – signifie dans un certain sens Sagesse, un état analogue à celui de Nirvâna, un Paradis de Béatitude, tandis que dans un autre sens il se rapporte à l'Homme Intellectuel lui-même, à celui qui contient en lui-même l'Eden dans lequel pousse l'Arbre de la Science du bien et du mal, dont l'homme est le Connaisseur.
Renan et Barthélémy Saint-Hilaire, se basant "sur les plus solides inductions", estiment qu'il est impossible de douter plus longtemps et placent tous deux le berceau de l'humanité "dans la région du Timaus". Finalement, le Journal Asiatique 490 conclut que :
489 Foè-Kouè-Ki ou Relations des Royaumes Bouddhiques, par Chy Fa-hian ; traduit par Abel Rémusat.
490 Septième année, 1855.
Toutes les traditions de la race humaine qui rassemblent ses familles primitives dans leur lieu de naissance, nous les montrent groupées autour des contrées où la tradition juive place le Jardin [III 255] d'Eden ; là où les Aryens [Zoroastriens] établissent leur Airyana Vaêjô ou le Mérou [?]. Ces contrées sont bordées au Nord par les régions voisines du Lac d'Aral et au Sud par le Baltistan ou Petit Thibet. Tout concourt à prouver que là se trouvait la demeure de cette humanité primitive de laquelle nous descendons.
Cette "humanité primitive" en était à sa Cinquième Race, lorsque le "Dragon aux quatre bouches", le lac dont il nous reste que fort peu de vestiges, était la demeure des "Fils de la Sagesse", les premiers Fils Nés- du-Mental de la Troisième Race. Pourtant, ce ne fut ni l'unique ni le premier berceau de l'humanité, bien que ce fût, en vérité, la copie du berceau des premiers Hommes divins pensants. Ce fut le Paradésha, les hautes terres du premier peuple parlant le Sanscrit, le Hédone, la contrée de délices des Grecs, mais ce ne fut pas le "Berceau de Volupté" des Chaldéens, car ce dernier n'en était qu'une réminiscence ; ce ne fut pas là non plus que se produisit la Chute de l'homme après la "séparation". L'Eden des Juifs fut copié sur la copie Chaldéenne.
Le fait que la Chute de l'Homme dans la génération se produisit durant la première partie de ce que la Science appelle l'époque Mésozoïque, ou époque des reptiles, est établi par la phraséologie de la Bibleen ce qui concerne le serpent, dont la nature est expliquée dans le Zohar. La question n'est pas de savoir si l'incident d'Eve avec le serpent tentateur est allégorique ou textuel, car personne ne peut mettre en doute qu'il soit allégorique, mais de montrer l'antiquité du symbolisme d'après son apparence même et de prouver que ce n'était pas une idée Juive, mais une idée universelle.
Or nous trouvons dans le Zohar une très étrange assertion, qui est calculée de façon à faire rire le lecteur aux éclats, à cause de sa grotesque absurdité. On y dit que le Serpent qui fut employé par Shamaël, le Satan supposé, dans le but de séduire Eve, était une sorte de "chameau volant" – καµηλοµορψον 491.
Un "chameau volant" c'en est vraiment trop pour l'esprit le plus libéral parmi les F.R.S. 492. Néanmoins, le Zohar, que l'on ne peut guère s'attendre à voir employer le langage d'un Cuvier, avait raison dans sa description ; en effet, nous constatons que dans les anciens manuscrits Zoroastriens, on l'appelle Aschmogh, que l'on nous représente dans l'Avesta comme ayant, après la Chute, perdu sa nature et son nom et que l'on nous décrit comme étant un énorme serpent avec un cou de chameau. [III 256]
491 De Mirville, Des Esprits, II, 423. Voyez aussi More Névochim, de Moïse Maimonides.
492 Membres de la Royal Society. (N.d.T.)
Salverte affirme que :
Il n'y a pas de serpents ailés, ni de véritables dragons... Les sauterelles sont encore appelées des serpents ailés par les Grecs et cette métaphore peut avoir donné naissance à divers récits au sujet de l'existence des serpents ailés. 493
Il n'en existe pas maintenant, mais il n'y a pas de raisons pour qu'ils n'aient pas existé durant le Mésozoïque ; et Cuvier, qui a reconstitué leurs squelettes, témoigne des "chameaux volants". Après avoir découvert les simples restes fossiles de certains sauriens, le grand naturaliste a déjà écrit que :
S'il y a quelque chose qui puisse justifier l'existence des hydres et autres monstres dont les images sont si souvent reproduites par les historiens du Moyen Age, c'est incontestablement le Plésiosaure. 494
493 Sciences occultes, p. 464.
494 Révolutions du Globe, vol. V, p. 247.
Nous ignorons si Cuvier a été plus loin dans la voie du mea culpa, mais nous pouvons nous faire une idée de sa confusion, due à toutes ses médisances contre la véracité archaïque, lorsqu'il se trouve en présence d'un saurien volant, le Ptérodactyle découvert en Allemagne, long de soixante-dix-huit pieds et pourvu d'ailes vigoureuses attachées à son corps de reptile. On décrit ce fossile comme étant un reptile dont les petits doigts des pattes sont allongés au point de porter de longues ailes membraneuses. Voilà donc la justification du "chameau volant" du Zohar. En effet, il y a sûrement, entre le long cou du Plésiosaure et l'aile membraneuse du Ptérodactyle, ou mieux du Mosasaure, place pour un nombre de probabilités scientifiques assez considérable pour servir de base au "chameau volant" ou à un dragon au long cou. Le Professeur Cope, de Philadelphie, a montré que le Mosasaure fossile, trouvé dans les couches de craie, était un serpent ailé de ce genre. Ses vertèbres ont des caractéristiques qui indiquent un rapport avec les Ophidiens plutôt qu'avec les Lacertiens.
Abordons maintenant la question principale. Il est bien connu que l'Antiquité n'a jamais prétendu que la Paléontographie et la Paléontologie aient fait partie des arts et des sciences qu'elle possédait et elle n'a pas eu de Cuvier. Pourtant, sur les tuiles Babyloniennes et spécialement dans les [III 257] anciens dessins Chinois et Japonais, dans les Pagodes et les monuments les plus anciens et dans la Bibliothèque Impériale de Pékin, maint voyageur a vu et reconnu de parfaites reproductions de Plésiosaures et de Ptérodactyles, dans les multiformes dragons de la Chine 495. De plus, les prophètes parlent, dans la Bible, des serpents de feu volants 496 et Job mentionne le Léviathan 497. Or les questions suivantes sont posées d'une manière très directe :
495 Nous lisons dans Des Esprits, de de Mirville (II, 431) le récit du "naïf étonnement de Geoffroy Saint-Hilaire, lorsque M. de Paravey lui montra dans de vieux ouvrages chinois et sur des tuiles babyloniennes, des dragons... ornithorynques et des sauriens (animaux aquatiques, découverts seulement en Australie), etc., animaux d'espèces éteintes qu'il avait cru être inconnus sur la terre... jusqu'au jour où il les découvrit".
496 Voyez Isaïe, XXX, 6 : "La vipère et le serpent de feu volant" et les serpents ardents vaincus par le serpent d'airain de Moïse.
497 Les fossiles reconstitués par la science que nous connaissons, devraient suffire à faire admettre même la possibilité d'un Léviathan, sans parler des serpents volants d'Isaïe ou Saraph Méhophep, mots qui sont traduits dans tous les dictionnaires hébreux ; "Saraph" par venin enflammé ou ardent et "Méhophep" par volant. Bien que la Théologie Chrétienne ait toujours rattaché le Léviathan aussi bien que le Saraph Méhophep au Démon, les expressions sont métaphoriques et n'ont aucun rapport avec le "Malin". Toutefois, le mot "Dragon" est devenu maintenant un des noms du Malin. En Bretagne, le mot Drouk signifie maintenant "Démon" et c'est de là que vient nous dit Cambry (Monuments celtiques, p. 299), la Tombe du Diable en Angleterre, Droghedanum Sepulcrum. En Languedoc, les météores et les feux follets sont appelés Drac et, en Bretagne, Dreag et Wraie ou colère ; le nom du château de Droghéda, en Irlande, veut dire le château du Diable (de Mirville, ibid., II, 423).
- Comment les anciennes nations pouvaient-elles avoir une notion quelconque des monstres disparus des temps Carbonifère et Mésozoïque et même les représenter dans les dessins et les décrire, à moins d'avoir vu ces monstres eux-mêmes ou d'en avoir possédé des descriptions dans leurs traditions, descriptions impliquant la nécessité de témoins oculaires vivants et intelligents ?
- Et l'exigence de ces témoins oculaires une fois admise, comment (à moins d'admettre la clairvoyance rétrospective) l'humanité et les premiers hommes paléolithiques pourraient-ils ne dater que du milieu, environ, de la période Tertiaire ? Nous ne devons pas oublier que la plupart des Savants n'admettent pas l'apparition de l'homme avant la période Quaternaire et l'excluent ainsi entièrement de la période Caïnozoïque. Nous avons ici des espèces éteintes d'animaux qui ont disparu de la surface de la Terre il y a des millions d'années et qui sont décrits et connus par des nations dont la civilisation ne remonterait guère, à ce que l'on dit, à plus de [III 258] quelques milliers d'années. Comment cela se peut-il ? Evidemment il faut admettre, soit que la période Mésozoïque ait empiété sur le Quaternaire, soit que l'homme ait été le contemporain du Ptérodactyle et du Plésiosaure.
Parce que les Occultistes croient à la Sagesse et à la Science Antiques et prennent leur défense, même si des sauriens ailés sont appelés des "chameaux-volants" dans les traductions du Zohar, il ne s'ensuit pas que nous ajoutions aussi facilement foi à tous les récits que nous transmet le Moyen Age au sujet de tels dragons. Les Ptérodactyles et les Plésiosaures ont disparu avec la masse de la Troisième Race. Aussi, lorsque les auteurs catholiques-romains nous invitent gravement à ajouter foi aux contes de Christophe Scherer et du Père Kircher, qui auraient vu de leurs propres yeux de vivants dragons-volants ardents, en 1619 et 1669 respectivement, il nous est permis de considérer leurs assertions comme des rêves ou des mensonges 498. Nous ne considérons aussi que comme une "licence poétique" le récit d'après lequel Pétrarque, suivant un jour Laure dans les bois et passant près d'une caverne, aurait rencontré un dragon qu'il tua ensuite à coups de dague empêchant ainsi le monstre de dévorer la dame de ses pensées 499. Nous ajouterions volontiers foi à ce [III 259] récit, si Pétrarque avait vécu au temps de l'Atlantide, lorsqu'il était possible que de pareils monstres antédiluviens vécussent encore. Nous nions leur existence à notre époque actuelle. Le serpent de mer et le dragon sont deux êtres totalement différents. L'existence du premier est niée par la majorité, parce qu'il vit au plus profond de l'océan, qu'il est très rare et ne se montre à la surface que lorsqu'il s'y trouve contraint, peut-être par la faim. Demeurant ainsi invisible, il peut exister, bien que l'on nie son existence. Mais s'il existait un être du genre du dragon décrit plus haut, comment pourrait-il avoir toujours évité d'être remarqué ? Ce fut une créature contemporaine des débuts de la Cinquième Race et elle n'existe plus.
498 Les écrivains ultramontains acceptent toute la série des histoires de dragons racontées par le Père Kircher dans son Œdipus Ægyptiacus, "De Genesi Draconum", avec grand sérieux. D'après ce Jésuite, il vit lui-même un Dragon qui fut tué en 1669 par un paysan romain, attendu que le directeur du Musée Barberini le lui envoya pour en prendre le dessin, ce que fit le Père Kircher qui publia ce dessin dans un de ses in-folio. Après cela, il reçut une lettre de Christophe Scherer, Préfet du Canton de Soleure, en Suisse, lettre dans laquelle ce fonctionnaire certifiait avoir lui-même vu, de ses propres yeux, un dragon vivant, durant une belle nuit d'été de 1619. Etant resté sur son balcon "pour contempler la pureté parfaite du firmament", écrivait-il, "je vis un brillant dragon ardent sortir d'une des cavernes du mont Pilate et se diriger rapidement vers Fluelen, à l'autre extrémité du lac. D'une taille énorme, sa queue était plus longue encore et son cou s'étendait en avant. Sa tête et ses mâchoires étaient celles d'un serpent. En volant, il projetait de nombreuses étincelles sur sa route (?!)... Je crus d'abord que je voyais un météore, mais bientôt, après avoir regardé plus attentivement, je fus convaincu, par sa façon de voler et par la conformation de son corps, que je voyais un véritable dragon. Je suis heureux de pouvoir ainsi éclairer Votre Révérence au sujet de la très réelle existence de ces animaux" – dans des rêves d'un très lointain passé, aurait dû ajouter l'auteur de la lettre (Ibid., p. 424). [Cité dans Des Esprits, II, 423.]
Le lecteur pourra se demander dans quel but nous soulevons la question des dragons. Nous répondrons : d'abord, parce que la connaissance de pareils animaux est une preuve de l'énorme antiquité de la race humaine et ensuite, pour établir la différence qui existe entre la véritable signification zoologique des mots "Dragon", "Nâga" et "Serpent" et leur signification métaphorique, lorsqu'on les emploie symboliquement. Le lecteur profane, qui ne connaît rien de la langue des Mystères, sera probablement, toutes les fois qu'il rencontrera un de ces mots, porté à l'accepter littéralement. De là les quiproquos et les accusations injustes. Deux exemples suffiront.
Sed et Serpens ? Oui, mais quelle était la nature du serpent ? Les mystiques voient, par intuition, dans le serpent de la Genèse, un emblème animal et une haute essence spirituelle : une force cosmique, surintelligente, une "grande lumière tombée", un esprit, sidéral, aérien et tellurien à la fois, "dont l'influence enveloppe le globe" (qui circumambulat terram), comme dit de Mirville 500, fanatique Chrétien de la lettre morte, et qui ne fit que "se manifester sous l'emblème physique qui s'accordait le mieux avec ses replis moraux et intellectuels" – c'est-à-dire sous la forme d'un ophidien.
499 En guise de preuve convaincante de la réalité de ce fait, un Catholique Romain renvoie le lecteur au tableau, représentant cette scène, qui a été peint par Simon de Sienne, un ami du poète, sur le portail de l'église Notre-Dame-du-Don, à Avignon, en dépit de l'interdiction du Souverain Pontife, qui "ne voulait pas permettre que ce triomphe de l'amour trônât dans un lieu saint", et ce Catholique ajoute : "Le temps a endommagé l'œuvre d'art, mais n'en a pas affaibli la tradition." (Ibid., p. 425.) Les "Dragons-Démons" de notre époque, dont parle de Mirville, semblent n'avoir pas de chance, car ils disparaissent très mystérieusement des musées où l'on dit qu'ils se trouvaient. Ainsi le dragon embaumé par Ulysse Aldrovandus et offert au musée du Sénat, à Naples ou à Bologne, "y était encore en 1700", mais n'y est plus (Ibid., p. 427).
500 Op. cit., II, 422.
Mais que feront les Chrétiens du Serpent d'Airain, du "Divin Guérisseur", si le serpent doit être considéré comme l'emblème de la ruse et du mal ; le "Malin" en personne ? Comment pourra-t-on jamais établir la ligne de démarcation, puisqu'elle est tracée arbitrairement dans un esprit théologique sectaire ? [III 260]
En effet, si l'on enseigne aux fidèles de l'Eglise Romaine que Mercure et Esculape ou Asclepios, qui, en réalité, ne font qu'un sont des "démons et des fils de démons" et que la baguette et le serpent du dernier, sont "la baguette du Diable", que fait-on du Serpent d'Airain de Moïse ? Aucun érudit n'ignore que la "baguette" païenne et le "serpent" Juif, ne constituent qu'une seule et même chose, c'est-à-dire le Caducée de Mercure, fils d'Apollon-Python. Il est facile de comprendre pourquoi les Juifs ont adopté la forme d'un ophidien pour leur "séducteur". Chez eux l'emblème était purement physiologique et phallique et toute la casuistique de l'Eglise Catholique Romaine serait impuissante à lui donner un autre sens, si l'on étudiait bien la langue des mystères et si les rouleaux de parchemin hébreux étaient lus numériquement. Les Occultistes savent que le Serpent, le Nâga et le Dragon, ont chacun un sens septénaire ; que le Soleil, par exemple, était l'emblème astronomique et cosmique des deux Lumières opposées et des deux Serpents des Gnostiques, le bon et le mauvais. Ils savent aussi qu'une fois généralisées, les conclusions de la Science, comme celles de la Théologie, constituent deux extrêmes parfaitement ridicules. En effet, lorsque la Science nous dit qu'il suffit de suivre à la trace les légendes des serpents et de remonter jusqu'à leur source primordiale la légende astronomique et de méditer sérieusement sur le Soleil, le vainqueur de Python et sur la Vierge Céleste du Zodiaque, repoussant le Dragon dévorant, si l'on veut découvrir la clef de tous les dogmes religieux postérieurs – il est aisé de s'apercevoir, qu'au lieu de généraliser, l'auteur a simplement les yeux fixés sur la Religion Chrétienne et sur l'Apocalypse. C'est ce que nous appelons l'un des extrêmes. Nous découvrons l'autre lorsque la Théologie, répétant la fameuse décision du Concile de Trente, cherche à convaincre les masses que :
Depuis la chute de l'homme jusqu'à son baptême, le diable exerce un plein pouvoir sur lui et le possède de droit – diabolum dominium et potestatem super homines habere et JURE eos possidere. 501
501 Op. cit., p. 433.
A cela la Philosophie Occulte répond : "Prouvez d'abord l'existence du Diable en tant qu'entité et nous pourrons alors croire à une pareille possession congénitale. Une très faible dose d'observation et de connaissance de la nature humaine, peut suffire à établir la fausseté de ce dogme théologique. Si Satan avait quelque réalité, dans le monde objectif ou même [III 261] dans le monde subjectif (au sens ecclésiastique), c'est le pauvre Diable qui subirait une obsession et même une possession chronique, de la part des méchants – c'est-à-dire de la part de la grande masse de l'humanité. C'est l'humanité elle-même, et particulièrement le clergé, conduit par la hautaine, peu scrupuleuse et intolérante Eglise Romaine, qui a engendré le Malin, l'a enfanté et élevé avec amour ; mais c'est une digression.
L'Eglise reproche au monde entier de la pensée d'avoir adoré le serpent.
L'humanité tout entière lui a brûlé de l'encens ou l'a lapidé. Les Zends en parlent comme le font les Rois, les Védas, l'Edda... et la Bible... Partout, le serpent sacré (le Nâga) a son sanctuaire et son prêtre ; à Rome, ce sont les Vestales qui... préparent ses repas avec le même soin qu'elles apportent à entretenir le feu sacré. En Grèce, Esculape ne peut guérir sans son assistance et lui délègue ses pouvoirs. Tout le monde a entendu parler de la fameuse ambassade romaine, envoyée par le Sénat au dieu de la médecine et de son retour avec le non moins fameux serpent, qui se dirigea de sa propre volonté et tout seul vers le temple de son maître, situé sur l'un des îlots du Tibre. Il n'existait pas une Bacchante qui ne l'enroulât [le Serpent] dans ses cheveux, pas un Augure qui ne l'interrogeât avec soin, pas un Nécromancien dont la tombe fût privée de sa présence. Les Caïnites et les Ophites l'appellent Créateur, tout en reconnaissant, comme le faisait Schelling, que le serpent est "mauvais dans sa substance et dans sa personne". 502
Oui, l'auteur a raison et si l'on voulait se faire une idée complète du prestige dont le serpent jouit jusqu'à nos jours, on devrait étudier la question aux Indes et apprendre tout ce que l'on croit dans ce pays au sujet des Nâgas (cobras) et tout ce qu'on leur attribue ; on devrait aussi visiter les Africains de Whydah, les Voudous de Port-au-Prince et de la Jamaïque, les Nagals du Mexique et les Pâ, ou Hommes-serpents de la Chine, etc. Mais pourquoi s'étonner de ce que [III 262] le serpent soit "adoré" et en même temps maudit, puisque nous savons que, dès le début, ce fut un symbole ? Dans toutes les langues anciennes, le mot dragon signifiait ce qu'il signifie actuellement en Chinois, long ou "l'être qui excelle en intelligence" et en Grec δρὰχων ou "celui qui voit et surveille" 503. Est-ce à l'animal de ce nom que l'on pourrait appliquer l'une quelconque de ces épithètes ? N'est-il pas évident, quel que soit le point que la superstition et l'oubli de la signification première aient fait atteindre aujourd'hui aux sauvages, que les qualifications ci-dessus étaient destinées à être appliquées aux originaux humains qui étaient symbolisés par des Serpents et des Dragons ? Ces originaux – appelés jusqu'aujourd'hui en Chine, les "Dragons de Sagesse" – furent les premiers disciples des Dhyanis, leurs Instructeurs ; bref, ce furent les Adeptes Primitifs de la Troisième Race et, plus tard, de la Quatrième et de la Cinquième Races. Le nom devint universel et, avant l'ère Chrétienne, pas un homme sain d'esprit n'aurait confondu l'homme avec le symbole.
502 Op. cit., pp. 432, 433. Ceci est à peu près aussi juste que si, dans quelques milliers d'années, un fanatique d'une nouvelle religion quelconque, occupé à glorifier sa religion aux dépens de l'ancien Christianisme, venait à dire : Partout l'agneau, ou quadrupède, était adoré. La religieuse l'appelait l'Agnus et le mettait sur son sein ; le prêtre le plaçait sur l'autel. Il figurait à chaque repas Pascal et était glorifié à haute voix dans tous les temples. Pourtant les Chrétiens le craignaient et le haïssaient, car ils l'égorgeaient et le dévoraient. Ces païens, du moins, ne dévoraient pas leurs symboles sacrés. Nous n'avons jamais entendu parler de mangeurs de serpents ou de reptiles, sauf dans les contrées chrétiennes et civilisées, où l'on commence par manger des grenouilles et des anguilles et où l'on finira par manger des serpents, de même que l'on a commencé par l'agneau, pour finir par la viande de cheval.
503 Op. cit., p. 423.
Le symbole de Chnouphis, ou de l'âme du monde, écrit Champollion :
... est, entre autres, celui d'un énorme serpent debout sur jambes humaines ; ce reptile, emblème du Bon génie, est un véritable Agathodaemon. Il est souvent représenté avec une barbe... Cet animal sacré, identique au serpent des Ophites, se retrouve gravé sur de nombreuses pierres gnostiques ou basilidiennes... Le serpent a différentes têtes, mais on retrouve toujours l'inscription des lettres suivantes ΧΝΟΥΒΙΣ [Chnoubis]. 504
Agathodaemon était doué "de la connaissance du bien et du mal", c'est-à-dire de la Sagesse Divine, car sans elle la connaissance du bien et du mal est impossible 505. Répétant ce qu'avait dit Jamblique, Champollion nous montre Agathodaemon comme étant :
la divinité appelée Ει̉χτω̃ν [Eichton] [ou le Feu des Dieux [III 263] Célestes – le Grand Thot-Hermès] 506, à qui Hermès Trismégiste attribue l'invention de la magie. 507
504 Panthéon, 3.
505 Le Chnouphis Solaire, ou Agathodaemon, est le Christos des Gnostiques, comme le savent tous les érudits. Il est étroitement rattaché aux Sept Fils de Sophia (la Sagesse), aux Sept Fils d'Aditi, l'Universelle Sagesse, dont le huitième est Mârtânda, le Soleil, tandis que les Sept sont les Sept Régents ou Génies Planétaires. C'est pourquoi Chnouphis était le Soleil Spirituel de l'Illumination, de la Sagesse et, par suite, le patron de tous les Initiés Egyptiens, comme le devint plus tard Bel- Merodach ou Bel-Belitanus chez les Chaldéens.
506 Hermès, ou plutôt Thot, était un nom générique. Aboul-Féda, dans son Historia Ante-Islamitica, nous montre cinq Hermès et les noms d'Hermès, de Nébo et de Thot étaient donnés aux grands Initiés dans divers pays. Ainsi, Nébo, fils de Mérodach et de Zarpanitou, qu'Hérodote appelle Zeus- Bélos, donne son nom à tous les grands Prophètes, Voyants ou Initiés. Ils étaient tous des "Serpents de Sagesse", comme se rattachant astronomiquement au Soleil et spirituellement à la Sagesse.
507 Panthéon, texte 15.
"L'invention de la magie !" il est étrange de se servir d'une pareille expression, comme si la découverte des éternels et réels mystères de la Nature pouvait être inventée ! Autant attribuer à M. Crookes, dans quelques milliers d'années, l'invention au lieu de la découverte de la matière radiante. Hermès n'avait ni inventé, ni même découvert la magie, car le nom de Thot-Hermès, comme l'explique l'avant-dernière note, est un nom générique, de même qu'Enoch – Enoïchion "l'œil spirituel, interne" – Nébo, le Prophète et le Voyant, etc. Ce n'est pas le nom propre d'un homme vivant, mais le titre générique de nombreux Adeptes. Leur rattachement au serpent dans des allégories symboliques est dû à ce qu'ils furent illuminés par les Dieux Solaires et Planétaires, durant la première Race intellectuelle, la Troisième. Ce sont tous les patrons qui représentent la Sagesse Secrète. Asclepios est le fils du Dieu-Soleil, Apollon, et c'est Mercure ; Nébo est le fils de Bel-Mérodach ; Vaivasvata Manou, le grand Richi, est le fils de Vivasvat – le Soleil ou Soûrya, etc. Et tandis qu'au point de vue astronomique, les Nâgas, de même que les Richis, les Gandharvas, les Apsaras, les Grâmanîs (ou Yakshas, Dieux mineurs), les Yâtoudhanas et les Dévas, sont les assistants du Soleil durant tous les douze mois solaires, au point de vue théogonique, comme au point de vue de l'évolution anthropologique, ce sont des Dieux et des Hommes – lorsqu'ils sont incarnés dans le Bas Monde. Rappelons ici au lecteur le fait qu'Apollonius rencontra dans le Kachmir des Nâgas bouddhistes. Ceux-ci n'étaient ni des serpents au point de vue zoologique, ni même les Nâgas, au point de vue ethnologique, mais bien des "sages".
La Bible, depuis la Genèsejusqu'à l'Apocalypse, n'est qu'une série d'archives historiques de la grande lutte entre la Magie Blanche et la Magie Noire ; entre les Adeptes de la Voie de Droite, les Prophètes, et ceux de la Voie de Gauche, les Lévites, le Clergé des masses brutales. Les étudiants de l'Occultisme, bien que certains d'entre eux puissent se baser [III 264] sur un plus grand nombre de manuscrits archaïques et sur un enseignement direct éprouvent eux-mêmes de la difficulté à tirer une ligne de démarcation entre les Affiliés de la Voie de Droite et ceux de Gauche. Le grand schisme qui divisa les fils de la Quatrième Race, dès que les premiers Temples et les premières Salles d'Initiation eurent été érigés sous la direction des "Fils de Dieu", est allégorisé par les Fils de Jacob. Ce qui prouve qu'il y avait deux Ecoles de Magie et que les Lévites orthodoxes n'appartenaient pas à celle des deux qui était sainte, ce sont les paroles prononcées par Jacob mourant. Ici encore il est bon de citer quelques lignes d'Isis Dévoilée 508.
Jacob mourant décrit ainsi ses fils : "Dan, dit-il, sera un serpent sur la route, une vipère sur le sentier, mordant les pieds des chevaux de façon que les cavaliers tombent en arrière [c'est-à-dire qu'il enseignera la Magie Noireaux candidats]. J'ai attendu ton salut, ô Seigneur !" Au sujet de Siméon et de Lévi, le patriarche fait remarquer que "ce sont des frères ; des instruments de cruauté se trouvent dans leurs demeures. O mon âme, ne partage pas leur secret, ne te rend pas à leur assemblée" 509. Or, dans l'original, au lieu des mots "leur Secret", on lit – "leur Sod" 510. Sod était le nom donné aux grands Mystères de Baal, d'Adonis et de Bacchus, qui étaient tous des Dieux Solaires et avaient pour symboles des serpents. Les Cabalistes expliquent l'allégorie des serpents ardents, en disant que c'était le nom donné à la tribu de Lévi, à tous les Lévites en un mot et que Moïse était le chef des Sodales 511.
508 II, 370.
509 Genèse, XLIX, 17, 18 et 5, 6.
510 Dunlop, dans son introduction de Sod, les Mystères d'Adonis (XI), traduit le mot "Sod" par arcanum, mystère religieux, en se basant sur l'autorité du Penteglott de Schindler (1201). "Le secret du Seigneur appartient à ceux qui le craignent", dit le Psaume XXV, 14. C'est là une erreur de traduction commise par les Chrétiens, car on devrait traduire par : "Sod Ihoh (les Mystères d'Ihoh) sont pour ceux qui le craignent." "AI [El] est terrible dans le grand Sod des Kédéshim (les Prêtres, les Saints, les Initiés)." – Psaume LXXXXIX, 7 (ibid.). Les Kédéshim étaient loin d'être saints. Voyez la Section qui traite du "Saint des Saints", dans la seconde partie de ce volume.
511 Les membres des Collèges des Prêtres étaient appelés "Sodales", dit le Latin Lexicon, de Freund IV, 448). "Des Sodalités étaient constituées dans les Mystères Idæens de la Puissante Mère", écrit Cicéron dans son De Senectute (Dunlop, ibid., p. 12).
512 XXX, 6.
513 Les prêtres de Baal qui sautaient par-dessus les feux, mais c'était là un terme hébreu et local. Saraph veut dire "venin ardent ou flamboyant".
C'est aux Mystères qu'il faut remonter pour avoir la signification première des "Tueurs de Dragons" et la question est traitée à fond, plus loin.
En attendant il va de soi que, si Moïse était le chef des [III 265] Mystères, il en était le Hiérophante et, de plus, que si nous voyons en même temps les Prophètes tonner contre les "abominations" d'Israël, c'est qu'il existait deux Ecoles. Les mots "Serpents Ardents" n'étaient donc que l'épithète qui servait à qualifier les Lévites de la caste sacerdotale, après qu'ils s'étaient écartés de la Bonne Loi, enseignements traditionnels de Moïse, ainsi que tous ceux qui s'adonnaient à la Magie Noire. Isaïe, lorsqu'il parlait des "enfants rebelles" qui auront à transporter leurs richesses dans les contrées d'où viennent "la vipère et le serpent ardent volant" 512, c'est-à-dire dans la Chaldée et l'Egypte, dont les Initiés avaient déjà beaucoup dégénéré de son temps (700 avant J.-C.), faisant allusion aux sorciers de ces pays 513, qu'il faut avoir grand soin de ne pas confondre avec les "Dragons ardents de Sagesse" et avec les "Fils du Brouillard de Feu".
Dans le Grand Livre des Mystères, on nous dit que :
Sept Seigneurs créèrent sept Hommes ; trois Seigneurs [Dhyân-Chohans ou Pitris] étaient saints et bons, quatre étaient moins célestes et pleins de passions... Les Chhâyâs [fantômes] des Pères furent comme eux.
Cela explique les différences dans la nature humaine, qui est divisée en sept degrés de bien et de mal. Il y avait sept tabernacles prêts à être habités par des Monades, dans sept conditions Karmiques différentes. Les Commentaires expliquent de cette façon la diffusion rapide du mal, dès que les Formes humaines furent devenues de véritables hommes. Toutefois, quelques philosophes antiques ignoraient les sept et ne parlaient que de quatre, dans leurs comptes rendus génétiques. Ainsi, la Genèselocale Mexicaine ne parle que de "quatre hommes bons", représentés comme les quatre ancêtres réels de la race humaine, "qui n'étaient ni engendrés par les Dieux, ni nés d'une femme", mais dont la création était un miracle accompli par les Puissances Créatrices et qui ne furent créés qu'après "l'échec de trois tentatives de fabriquer des hommes". Les Egyptiens n'avaient dans leur théologie que "quatre Fils de Dieu" – tandis que dans Pymandre on en donne sept – et évitaient ainsi de faire mention de la mauvaise nature de l'homme. Toutefois, lorsque Set tomba du rang, de Dieu à celui de Set-Typhon, on commença à l'appeler le "septième fils" ; c'est ce qui donna naissance à la croyance que "le septième fils du septième fils" est toujours un magicien de naissance – bien qu'au début on n'ait voulu parler [III 266] que d'un sorcier. APAP, le serpent qui symbolise le mal, est tué par Aker, le serpent de Set 514 ; donc Set-Typhon ne pouvait pas être ce même mal. Dans le Livre des Morts, il est recommandé de lire le chapitre CLXIII "en présence d'un serpent sur deux jambes", c'est-à-dire d'un haut Initié, d'un Hiérophante, ainsi que l'indiquent le disque et les cornes de bélier 515 qui ornent sa tête "de serpent", dans les hiéroglyphes du titre de ce chapitre. Au-dessus du "serpent" sont représentés les deux yeux mystiques d'Ammon 516, le "Dieu des Mystères caché". Les passages ci-dessus corroborent notre assertion et établissent ce que le mot "serpent" signifiait réellement dans l'antiquité.
514 Livre des Morts.
515 Les mêmes cornes de bélier se retrouvent sur les têtes de Moïse que l'auteur a vues en Palestine sur de vieilles médailles, dont une est encore en sa possession. Les cornes qui font partie de l'auréole brillante qui orne, à Rome, la statue de Moïse par Michel-Ange, sont verticales au lieu de s'infléchir vers les oreilles, mais l'emblème est le même ; de là le Serpent d'Airain.
516 Consultez seulement le Magic Papyrus, n° 5, de Harris, et examinez l'Ammon à tête de bélier qui fabrique des hommes sur un tour de potier.
En ce qui concerne les Nagals et Nargals, d'où vient la similitude de noms entre les Nâgas Indiens et les Nagals Américains ?
Le Nargal était le chef Chaldéen et Assyrien de la Magie [Rab-Mag] et le Nagal était le chef des sorciers des Indiens du Mexique. Tous deux tirent leurs noms de Nergal-Serezer, le dieu Assyrien et des Nâgas hindous. Tous deux jouissent des mêmes facultés et du pouvoir d'avoir un serviteur Daemon avec lequel ils s'identifient complètement. Le Nargal Chaldéen et Assyrien gardait son Daemon dans l'intérieur du temple, sous forme d'un animal considéré comme sacré ; le Nagal indien garde le sien là où il le peut – dans le voisinage d'un lac ou d'un bois, ou dans la maison, sous forme d'un animal domestique. 517
Une telle similitude ne saurait être attribuée à une coïncidence. Nous découvrons un monde nouveau et nous constatons que, pour nos ancêtres de la Quatrième Race, c'était déjà un monde ancien et que l'on nous représente Ardjouna, le compagnon et le Chéla de Krishna, comme étant descendu dans Pâtâla, les "antipodes" et comme y ayant épousé Ouloûpi 518, une Nâga, ou mieux une Nâgî, fille du roi des Nâgas, Kauravya 519. [III 267]
Nous pouvons espérer maintenant que la signification complète de l'emblème du serpent est prouvée. Ce n'est pas l'emblème du mal et encore bien moins celui du diable, mais c'est, en vérité, le ΣΕΜΕΣ ΕΙΛΑΜ ΑΒΡΑΣΑΞ [Semes Eilam Abrasax] "l'Eternel Soleil Abrasax", le Soleil Central Spirituel de tous les Cabalistes, représenté dans quelques diagrammes par le cercle de Tiphereth.
Ici encore nous pouvons citer un passage de notre premier ouvrage et entrer dans des explications plus complètes.
De cette région de l'Abîme insondable (Bythos, Aditi, Shékinah, le Voile de l'Inconnu) jaillit un Cercle formé de spirales. C'est Tiphereth qui, dans la langue du symbolisme, veut dire un grand Cycle formé de plus petits. Enroulé à l'intérieur, de façon à suivre les spirales, gît le Serpent – emblème de la Sagesse et de l'Eternité – l'Androgyne Double ; le cycle représente Ennoia, ou le Mental Divin (une Puissance qui ne crée pas, mais doit assimiler), et le Serpent représente l'Agathodaemon, l'Ophis, l'Ombre de la Lumière (non éternelle et pourtant la plus grande Lumière Divine sur notre plan). Tous deux étaient les Logoï des Ophites, ou l'Unité, en tant que Logos, se manifestant sous forme d'un double principe du Bien et du Mal. 520
517 Brasseur de Bourbourg, Mexique, pp. 135 et 574.
518 Ouloûpî (Ouloûpl) a une saveur tout à fait Atlantéenne. De même qu'Atlantis, ce n'est ni un nom Grec, ni un nom Sanscrit, mais cela rappelle les noms Mexicains.
519 Mahâbhârata, Adi Parva, Shlokas 7788, 7789. La Bhagavata Pourâna(IX, XX, 31), telle qu'elle est expliquée par le commentateur Shrîdhara, fait d'Ouloûpî la fille du roi de Manipoûra (voyez la Vishnou Pourâna, de Wilson, IV, 160), mais Pandit Dayanand Sarasvati, qui jouissait certainement de la plus grande autorité de Sankritiste et de Pouraniste aux Indes, dans toutes ces questions, a personnellement confirmé qu'Ouloûpî était la fille du roi des Nâgas en Pâtâla, ou Amérique, il y a 5.000 ans et que les Nâgas étaient des Initiés.
520 Isis Dévoilée, III, 395.
Si ce n'était que de la Lumière, inactive et absolue, le mental humain ne pourrait ni l'apprécier, ni même se rendre compte de son existence. L'Ombre est ce qui permet à la Lumière de se manifester et lui confère une réalité objective. En conséquence, l'Ombre n'est pas le mal, mais le corollaire nécessaire et indispensable qui complète la Lumière, ou le Bien ; l'Ombre est sa créatrice sur la Terre.
D'après les théories des Gnostiques, ces deux principes sont la Lumière et l'Ombre immuables, attendu que le Bien et le Mal, qui ne font virtuellement qu'un, ont existé de toute éternité et continueront toujours à exister, tant qu'il y aura des mondes manifestés.
Ce symbole explique que cette secte adore, en qualité de Sauveur, le Serpent enroulé autour du pain sacramentel, ou autour du Tau (l'emblème phallique). En tant qu'unité, Ennoia et Ophis sont le Logos. Lorsqu'ils sont séparés, l'un est l'Arbre de la Vie[III 268] Spirituelle, l'autre l'Arbre de la Connaissance du Bien et du Mal. C'est pourquoi nous voyons Ophis engager le premier couple humain – la production matérielle d'Ilda-baoth, qui était redevable de son principe spirituel à Sophia-Achamoth – à manger le fruit défendu, bien qu'Ophis représente la Sagesse Divine.
Le Serpent, l'Arbre de la Connaissance du Bien et du Mal et l'Arbre de Vie sont tous des symboles transplantés du sol des Indes. L'Arasa- maram 521, l'arbre banian, qui est sacré pour les Hindous – depuis que Vishnou, durant une de ses incarnations, se reposa sous son ombre puissante et y enseigna la philosophie humaine et les sciences – est appelé l'Arbre de la Connaissance et l'Arbre de Vie. A l'ombre protectrice de ce roi des forêts, les Gourous donnent à leurs disciples leurs premières leçons sur l'immortalité et les initient aux mystères de la vie et de la mort. La tradition Chaldéenne rapporte que les Java-Aleim du Collège Sacerdotal enseignent aux fils des hommes à devenir comme un d'entre eux. Jusqu'aujourd'hui, Foh-Tchou 522, qui vit dans son Foh-Maëyou, ou temple de Bouddha, sur le sommet du Kouin-Long-Sang 523, la grande montagne, accomplit ses plus grands miracles religieux sous un arbre que l'on appelle, en Chinois, le Soung-Ming-Shoû, ou Arbre de la Connaissance ou Arbre de Vie, car l'ignorance est la mort et la connaissance seule donne l'immortalité. Cette merveilleuse manifestation se produit tous les trois ans, alors qu'un immense concours de Bouddhistes Chinois se rend en pèlerinage au lieu saint 524.
521 Nom Tamil du pipal, l'arbre bo sacré ; le banyan est Ara-maram.
522 Foh-tchou, veut littéralement dire en chinois le seigneur de Bouddha, ou l'instructeur des doctrines de Bouddha-Foh.
523 Cette montagne est située au sud-ouest de la Chine, presque entre la Chine et le Tibet.
524 Ibid., pp. 395, 396.
Il est facile de comprendre pourquoi les premiers Initiés et Adeptes, ou les "Sages" que l'on représente comme ayant été initiés aux Mystères de la Nature par le MENTAL UNIVERSEL, représenté par les Anges les plus hauts, étaient nommés les "Serpents de Sagesse" et les "Dragons" et aussi pourquoi le premier couple physiologiquement complet – après avoir été, en mangeant le fruit de la connaissance, initié aux Mystères de la Création Humaine par l'entremise d'Ophis, le Logos Manifesté et l'Androgyne – commença à être peu à peu accusé par l'esprit matériel de la postérité d'avoir commis un péché, d'avoir désobéi au "Seigneur Dieu" et d'avoir été tenté par le Serpent.
Les premiers Chrétiens – qui dépouillèrent les Juifs de leur Bible – ont si peu compris les quatre premiers chapitres de la Genèse, dans leur sens ésotérique, qu'ils n'ont jamais [III 269] remarqué, non seulement que cette désobéissance n'impliquait aucun péché, mais encore que le "Serpent" était en fait le "Seigneur Dieu" lui-même qui, de même qu'Ophis, le Logos ou le porteur de la sagesse créatrice divine, apprit à l'humanité à devenir créatrice à son tour 525. Ils ne se rendirent jamais compte que la Croixétait le résultat d'une évolution de l'Arbre et du Serpent et qu'elle devint ainsi le salut de l'humanité. Par cela même elle devait être le premier symbole fondamental de la Cause Créatrice, s'appliquant à la géométrie, aux nombres, à l'astronomie, aux mesures et à la reproduction animale. D'après la Cabale, la malédiction de l'homme vint avec la formation de la femme 526. Le cercle se trouva séparé de son diamètre.
Partant de la possession du double principe en un seul, c'est-à-dire de la condition Androgyne, la séparation du double principe fut faite, laissant subsister deux opposés dont la destinée fut, à jamais, par la suite, de chercher à opérer la réunion dans la condition originelle une. La malédiction consistait en ceci : La Nature, poussant à la recherche évitait le résultat désiré en produisant un nouvel être, distinct de la réunion ou de l'unité cherchée et, grâce auquel, le désir, naturel, de recouvrer un état perdu fut, et est encore, à jamais déçu. C'est grâce au processus tentateur d'une malédiction ininterrompue, que la Nature 527 vit.
525 Que le lecteur n'oublie pas que l'on affirme dans le Zohar, comme aussi dans tous les ouvrages de Cabale que "Métatron s'unit à Shékinah". Or, Shékinah, en sa qualité de Voile (de Grâce) d'Ain- Suph, représente le Logos et est ce même Arbre de la Connaissance ; tandis que Shamaêl – l'aspect sombre du Logos – n'occupe que l'écorce de cet arbre et ne possède que la connaissance du mal seul. Comme l'a dit Lacour, qui voyait dans la scène de la Chute (Genèse, III) un incident faisant partie de l'initiation Egyptienne : "l'Arbre de la Divination ou de la Connaissance du Bien et du Mal... n'est autre que la science de Tzyphon, le Génie du Doute ; de Tzy enseigner de phon doute. Tzyphon est l'un des Aleim ; nous allons le voir dans un instant sous le nom de Nach, le tentateur." (Les Œloïms, vol. II, p. 218). Les Symbologistes le connaissent sous le nom de Jéhovah.
526 C'est là la théorie choisie et adoptée par tous les Pères de l'Eglise, mais ce n'est pas le réel Enseignement Esotérique. La malédiction n'a pour point de départ ni la formation de l'homme, ni celle de la femme, car leur séparation était un résultat naturel de l'évolution, mais elle a pour point de départ la violation de la loi.
527 Que la nature humaine vit, pas même l'animale – mais la nature égarée, sensuelle et vicieuse créée par les hommes et non par la Nature. Voyezla Section intitulée : "Croix et Cercle".
L'allégorie d'Adam chassé loin de l'Arbre de Vie veut dire, au sens ésotérique, que la race nouvellement séparée outragea, et rabaissa le mystère de la Vie au niveau de l'animalisme et de la bestialité. En effet, comme le montre le Zohar, Matronéthat [III 270] – symboliquement, Shékinah, l'épouse de Métatron – "est la voie qui conduit au grand Arbre de la Vie, à l'Arbre Puissant" et Shékinah, c'est la Grâce Divine. Comme on l'explique, cet Arbre atteint la vallée céleste et se trouve caché entre trois montagnes (la Triade supérieure de Principes, dans l'homme). A partir de ces trois montagnes, l'Arbre s'élève plus haut (le savoir de l'Adepte tourne ses aspirations vers le ciel), puis redescend au-dessous (dans l'Ego de l'Adepte sur la terre). Cet Arbre est relevé durant le jour et caché durant la nuit, c'est-à-dire qu'il est révélé à l'esprit éclairé et caché à l'ignorance, qui est la nuit 528. Comme le dit le Commentaire :
L'Arbre de la Connaissance du Bien et du Mal jaillit des racines de l'Arbre de Vie.
Mais aussi, comme l'écrit l'auteur de The Source of Measures :
Dans la Cabale on constate clairement que "l'Arbre de Vie" était la croix ansée sous son aspect sexuel et que "l'Arbre de la Connaissance" était la séparation et la réunion à nouveau pour remplir la condition fatale. Pour démontrer cela par des nombres, les valeurs respectives des lettres composant le mot Aiz צע, arbre, sont 7 et 9 ; le sept est le nombre féminin sacré et le neuf le nombre de l'énergie phallique ou mâle. Cette croix ansée est le symbole d'Isis-Osiris femelle-mâle des Egyptiens, principe germinal sous toutes ses formes, basé sur la manifestation primordiale applicable dans toutes les directions et dans tous les sens.
C'est la théorie Cabalistique des Occultistes Occidentaux et elle diffère des théories plus philosophiques de l'Orient ou des Aryens sur cette question 529. La séparation des sexes faisait partie du programme de la Nature et de l'évolution naturelle et la faculté créatrice du mâle et de la femelle était un don de la Divine Sagesse. Toute l'Antiquité, depuis le patricien philosophe, jusqu'au plus humble plébéien ayant des tendances à la spiritualité, a cru à la vérité de ces traditions et, lorsque nous aurons poussé plus loin nos explications, nous arriverons peut-être à montrer victorieusement que la vérité relative de ces légendes, sinon leur exactitude absolue – garantie par des géants intellectuels comme l'étaient Solon, Pythagore, Platon et d'autres – commence à se faire jour dans l'esprit de plus d'un Savant moderne. Il est troublé ; il [III 271] demeure étonné et dérouté par les preuves que l'on accumule journellement sous ses yeux ; il sent qu'il n'y a aucun moyen de résoudre les nombreux problèmes historiques en présence desquels il se trouve, à moins qu'il ne commence par accepter les anciennes traditions. Aussi, lorsque nous disons que nous croyons absolument aux anciennes traditions et aux légendes universelles, nous n'avons guère besoin de plaider coupable devant l'observateur impartial, car d'autres auteurs, bien plus érudits, parmi ceux mêmes qui appartiennent à l'Ecole Scientifique moderne, croient évidemment à beaucoup de choses auxquelles croient les Occultistes – aux "dragons" par exemple et cela, non pas seulement au point de vue symbolique, mais au point de vue de leur réelle existence à une certaine époque.
528 Voyez le Zohar, I, 172, aet b.
529 Comparez avec la section sur "les Mystères de l'Hebdomade", dans le IVème volume.
530 Gould, Mythical Monsters, p. 1.
Il y a quelque trente ans, il eût été fort audacieux, de la part de quelqu'un, de songer à raconter au public une série d'histoires, réputées ordinairement fabuleuses, en réclamant pour elles la considération due aux réalités authentiques, ou de représenter, comme des faits réels, des contes considérés de temps immémorial comme des fictions et des contes de nourrice comme étant, dans bien des cas, des légendes, plus ou moins déformées, décrivant des êtres ou des événements réels. Aujourd'hui, une pareille manière d'agir est moins hasardeuse 530.
C'est ainsi que débute l'Introduction d'un ouvrage récent (1886) et très intéressant de M. Charles Gould, intitulé Mythical Monsters. Il affirme hardiment sa foi dans l'existence de la plupart de ces monstres. Il émet l'idée que :
... un grand nombre des animaux prétendus mythiques qui, au cours de longs siècles et dans toutes les nations ont servi de sujet aux fictions et aux fables, rentrent légitimement dans le champ de l'Histoire Naturelle banale et peuvent être considérés, non pas comme le produit d'une exubérante fantaisie, mais comme des créatures qui ont réellement existé autrefois et dont, malheureusement, il n'est parvenu jusqu'à nous que des descriptions imparfaites et inexactes, probablement très réfractées en traversant les brouillards du temps ; ... traditions de créatures ayant jadis cœxisté avec l'homme et dont quelques-unes sont si fantastiques et terribles, qu'à première vue, leur existence parait impossible...
Pour moi, la plupart de ces créatures ne sont pas des chimères, mais des objets d'étude rationnelle. Le dragon, au lieu d'être une créature née dans l'imagination de l'Aryen, à la suite de la contemplation [III 272] des éclairs qui illuminaient la caverne qu'il habitait, comme le pensent quelques mythologues, est un animal qui a vécu jadis, qui a déroulé ses pesants replis et qui, peut- être, a volé...
Quant à moi, l'existence spécifique de la licorne ne me semble pas incroyable et me paraît plus probable que la théorie qui attribue son origine à un mythe lunaire 531.
Pour ma part, je mets en doute que la dérivation générale des mythes puisse être attribué à "la contemplation des œuvres visibles de la nature extérieure". Il me paraît plus facile de supposer que l'usure du temps a affaibli l'expression de ces récits tant racontés, au point de rendre leur aspect original presque méconnaissable, que de croire que des sauvages sans culture aient pu posséder une puissance d'imagination et de création poétique infiniment supérieure à celle dont jouissent les nations les plus instruites de notre époque ; il est moins difficile de considérer toutes ces merveilleuses histoires de dieux et de demi-dieux, de géants et de nains, de dragons et de monstres de toutes sortes, comme des transformations, que de les prendre pour des inventions. 532
531 The Unicorn : "Mythological Investigation", par Robert Brown Junior, F.S.A. Londres, 1881 (cité dans Gould, Mythical Monsters, p. 3).
532 Mythical Monsters, pp. 2-4.
Le même Géologue montre que :
... les paléontologistes ont successivement remonté, en suivant les traces de l'existence de l'homme, jusqu'à des périodes dont l'estimation varie entre trente mille ans et un million d'années – jusqu'à des époques où il cœxistait avec des animaux dont les espèces ont depuis longtemps cessé d'exister... 533
Ces animaux "fantastiques et terribles" étaient, par exemple : Le genre Cidastes, dont les os énormes et les vertèbres prouvent que ces animaux ont atteint une longueur de près de deux cents pieds. Les restes d'animaux de ce genre, au nombre de dix au moins, ont été vus par le professeur Marsh dans les Mauvaises Terres du Colorado, où ils sont éparpillés dans les plaines. Le Titanosaure Montanus, atteignant cinquante ou soixante pieds de long. Les Dinosauriens qui se trouvent dans les couches Jurassiques des Montagnes Rocheuses et dont les proportions sont encore plus gigantesques. L'Atlantosaurus Immanis, dont un fémur seul a plus de six pieds de long et qui aurait, par suite, une longueur de plus de cent pieds. La limite n'a pourtant pas été encore atteinte et nous entendons parler de la découverte de restes dont les proportions sont assez titanesques, pour qu'un os [III 273] de la cuisse dépasse douze pieds de long 534 ! Nous lisons ensuite la description du monstrueux Sivathérium des Himalayas, le cerf aux quatre cornes, aussi gros que l'éléphant qu'il dépasse en hauteur ; du gigantesque Mégathérium ; de lézards volants énormes, les Ptérodactyles à la mâchoire de crocodile sur une tête de canard, etc. Tous ces animaux cœxistaient avec l'homme, qu'ils attaquaient très probablement, de même que l'homme les attaquait. Et l'on nous demande de croire que l'homme n'était pas plus grand qu'il ne l'est maintenant ! Est-il possible de concevoir qu'entouré dans la Nature de créatures aussi monstrueuses, l'homme, à moins d'être lui-même un géant colossal, ait pu survivre, alors que tous ses ennemis ont péri ? Est-ce avec sa hachette de pierre qu'il avait raison du Sivathérium ou d'un gigantesque saurien volant ? Souvenons-nous toujours qu'au moins un grand savant, de Quatrefages, ne voyait aucune bonne raison scientifique empêchant l'homme d'avoir été "le contemporain des premiers mammifères et de remonter jusqu'à la Période Secondaire" 535.
533 Ibid., p. 20.
534 Ibid., pp. 36-37.
535 L'Espèce Humaine, p. 52.
Le Professeur Jukes, qui est si conservateur, écrit :
Il semble que les dragons volants de la fiction aient eu quelque chose comme une réelle existence durant les époques passées du monde. 536
Et l'auteur poursuit en posant cette question :
L'histoire écrite de l'homme, qui comprend quelques milliers d'années, embrasse-t-elle tout le cours de son existence intelligente ? Ou bien avons-nous dans les longues périodes mythiques, qui embrassent des centaines de milliers d'années et qui sont enregistrées dans les chronologies de la Chaldée et de la Chine, un vague memento de l'homme préhistorique transmis par la tradition et, peut-être, transporté dans les pays existants, par de rares survivants venant d'autres pays qui auraient été submergés, comme la fabuleuse Atlantide de Platon, ou auraient été le théâtre de quelque grande catastrophe qui les aurait détruits, eux et toute leur civilisation ? 537
Les quelques rares animaux géants qui restent, comme les éléphants – eux-mêmes plus petits que leurs ancêtres les Mastodontes – et les hippopotames, sont les seules reliques du passé qui aient survécu et ils tendent tous les jours à disparaître plus complètement. Ils ont eux-mêmes déjà eu quelques pionniers de leur futur genre et leur taille a décru dans la même proportion que celle de l'homme. En effet, les [III 274] restes d'un éléphant pygmée (E. Falconeri) furent découverts dans des dépôts des cavernes de Malte et le même auteur affirme qu'ils étaient accompagnés des restes d'un hippopotame pygmée et que les restes du premier n'avaient que deux pieds et demi de haut. Il y a aussi "l'hippopotame (Chœropsis) Liberiensis qui existe encore et que M. Milne-Edwards représente comme n'ayant guère plus de deux pieds de haut" 538.
Les sceptiques peuvent sourire et dénoncer notre ouvrage comme étant plein d'absurdités et de contes de fées, mais, en ce faisant, ils ne feront que rendre justice à la sagesse du philosophe Chinois Chang qui disait que :
"Les choses que les hommes savent ne sauraient en aucune façon être comparées, numériquement parlant, à celles qu'ils ignorent." 539
Ils ne rient donc que de leur propre ignorance.
536 Manual of Geology, p. 301.
537 Ibid., p. 17.
538 Gould, Mythical Monsters, p. 16. Voyez aussi Recherches, etc., des Mammifères, planche I, Paris, 1868 à 1874.
539 Préface du Shan Hai King, ou "Merveilles sur Terre et sur Mer" (voir Gould, op. cit., p. 384).
LES "FILS DE DIEU" ET "L'ILE SACREE"
La "Légende" donnée dans Isis Dévoilée 540 par rapport à une portion du globe que la Science veut bien reconnaître maintenant comme ayant été le berceau de l'humanité – bien que ce n'ait été en réalité, que l'un des sept berceaux – est ainsi conçue :
540 Vol. II, pp. 419 et sq.
La tradition rapporte et les annales du Grand Livre (le LIVRE DE DZYAN) expliquent que, bien avant l'époque d'Ad-am et de sa curieuse épouse Hé-va, là où l'on ne trouve maintenant que des lacs salés et des déserts nus et désolés, il existait une vaste mer intérieure qui s'étendait sur l'Asie Centrale, au nord de l'altière chaîne des Himalayas, et de son prolongement occidental. Dans cette mer, une île, que son incomparable beauté laissait sans rivale dans le monde, était habitée par les derniers vestiges de la race qui précéda la nôtre.
"Les derniers vestiges", cela veut dire "les Fils de la Volonté et du Yoga" qui, avec quelques rares tribus, survécurent au grand cataclysme. En effet, ce fut la Troisième Race, habitant le grand Continent Lémurien qui précéda les Races humaines véritables et complètes – la Quatrième et la Cinquième. C'est pourquoi nous avons dit dans Isis Dévoilée que :
Cette race pouvait vivre avec une égale facilité dans l'eau, l'air [III 275] ou le feu, car elle jouissait d'un pouvoir de contrôle illimité sur les éléments. C'étaient les "Fils de Dieu" ; non pas ceux qui virent les filles des hommes, mais les véritables Elohim, bien qu'ils portent un autre nom dans la Cabaleorientale. Ce sont eux qui communiquèrent aux hommes les plus redoutables secrets de la Nature et leur révélèrent le "mot" ineffable qui est maintenant perdu.
"L'Ile", suivant la croyance, existe jusqu'à présent, sous forme d'une oasis entourée par les redoutables solitudes du grand Désert de Gobi – dont les sables "n'ont, de mémoire humaine, été foulés par aucun pied".
Ce mot, qui n'est pas un mot, a fait jadis le tour du globe et demeure, comme un écho lointain qui s'éteint, dans le cœur de quelques hommes privilégiés. Les hiérophantes de tous les Collèges Sacerdotaux connaissaient l'existence de cette île, mais le "mot" n'était connu que du Java Aleim (Mahâ Chohan, dans une autre langue), c'est- à-dire du principal seigneur de chaque Collège et n'était transmis à son successeur qu'au moment de la mort. Il existait de nombreux Collèges de ce genre et les anciens auteurs classiques en parlent...
Il n'existait aucune communication, par mer, avec la belle Ile, mais des passages souterrains, connus seulement des chefs, mettaient en communication avec elle dans toutes les directions 541.
541 Il y a des Archéologues, comme M. James Fergusson, qui refusent de reconnaître une grande antiquité à un seul des monuments des Indes. Dans son ouvrage intitulé Illustration of the Rock-Cut Temples of India, il se hasarde à exprimer cette opinion très extraordinaire, que "l'Egypte avait cessé d'être une nation avant que le plus ancien des temples-cavernes des Indes n'eût été creusé". Bref, il n'admet l'existence d'aucun temple-caverne avant le règne d'Ashoka et semble tenir à prouver que la plupart de ces temples creusés dans le roc furent établis durant une période s'étendant depuis l'époque de ce pieux roi Bouddhiste jusqu'à la destruction de la dynastie Andhra de Magadha, au commencement du Vème siècle. Nous estimons que cette affirmation est parfaitement arbitraire et des découvertes ultérieures prouveront qu'elle est erronée et ne repose sur rien.
La tradition rapporte, et l'Archéologie considère la légende comme vraie, qu'il y a plus d'une ville aujourd'hui florissante aux Indes, qui serait édifiée sur plusieurs autres cités qui constituent ainsi une ville souterraine haute de six ou sept étages. Delhi est une de ces villes, ainsi qu'Allahabad ; on trouve même des exemples de ce genre en Europe, par exemple à Florence, qui est bâtie sur plusieurs cités mortes, Etrusques et autres. Dans ces conditions, pourquoi Ellora, Eléphanta, Karli et Ajunta n'auraient-elles pas été construites sur des labyrinthes et des passages souterrains, comme on l'assure ? Bien entendu, nous ne voulons pas parler des cavernes qui sont connues de tous les Européens, que ce soit [III 276] de visu ou par ouï-dire en dépit de leur énorme antiquité, contestée, elle aussi, par l'Archéologie moderne, mais nous parlons d'un fait, connu des Brahmanes initiés des Indes et spécialement des Yogis, à savoir qu'il n'existe pas dans le pays un seul temple-caverne qui ne possède ses passages souterrains, courant dans toutes les directions et que ces cavernes souterraines et ces corridors sans fin ont, à leur tour, leurs cavernes et corridors.
Qui pourrait dire si l'Atlantide disparue – qui est, elle aussi, mentionnée dans le Livre Secret, mais, cette fois encore sous un autre nom, spécial à la langue sacrée – n'existait pas encore à cette époque ?
demandions-nous ensuite 542. Elle existait très certainement, attendu qu'elle approchait des plus beaux jours de sa gloire et de sa civilisation, lorsque le dernier des continents Lémuriens s'effondra.
Le grand Continent perdu peut avoir été situé au sud de l'Asie et s'être étendu des Indes à la Tasmanie543. Si l'hypothèse – si bien mise en doute et si positivement repoussée par quelques savants auteurs, qui la considèrent comme une plaisanterie de Platon – vient à se vérifier, les Savants croiront peut-être, alors, que la description du continent habité par des Dieux n'était pas entièrement une fable 544. Ils comprendront que les allusions voilées de Platon et le fait qu'il attribuait le récit à Solon et aux prêtres Egyptiens, n'étaient qu'un moyen prudent de porter la chose à la connaissance du monde et qu'en mélangeant habilement la vérité à la fiction, il évitait en même temps de s'impliquer lui-même dans une histoire que les obligations imposées au moment de l'Initiation lui interdisaient de divulguer...
542 Isis, vol. II, p. 421.
543 L'Amérique, au moment de sa découverte, était appelée Atlanta par quelques tribus du pays.
544 Depuis lors, Atlantis de Donnelly a été publié et l'existence réelle de ce continent ne tardera pas à devenir un fait scientifique.
Pour continuer la tradition, nous ajouterons que la classe des hiérophantes était divisée en deux catégories distinctes 545 ; ceux qui étaient instruits par les "Fils de Dieu" de l'île et qui étaient initiés à la doctrine divine de pure révélation, et les autres qui habitaient l'Atlantide disparue – si c'est le nom qu'il faut lui donner – et qui appartenaient à une autre race (créée par des rapports sexuels, mais par des parents divins), étaient nés avec des facultés visuelles qui embrassaient toutes les choses cachées et pour lesquels la distance et les obstacles matériels n'existaient [III 277] pas. Bref, les hommes de cette dernière catégorie appartenaient à la Quatrième Race humaine dont parle le Popol Vuh, dont la vue était illimitée et qui connaissait immédiatement toutes choses.
En d'autres termes, c'étaient les Lémuro-Atlantéens, les premiers qui aient possédé une Dynastie des Rois-Experts, qui n'étaient pas des Mânes ou des "Fantômes" comme le croient certains 546, mais des Dieux, ou Demi- Dieux, ou Anges, réellement vivants qui s'étaient revêtus d'un corps pour régner sur cette Race et qui, à leur, tour, les instruisirent dans les arts et dans les sciences. Seulement, comme ces Dhyânis étaient des Esprits Roûpa ou matériels, ils n'étaient pas toujours bons. Leur roi Thevetat faisait partie de ceux qui ne l'étaient pas et c'est sous la mauvaise influence de ce démon-Roi que la Race Atlante devint une nation de méchants "magiciens".
En raison de cela, fut déclarée une guerre dont l'histoire serait trop longue à raconter ; on en peut retrouver la substance dans les allégories défigurées de la race de Caïn, les géants, et de celle de Noë et de sa famille de justes. Le conflit se termina par la submersion de l'Atlantide, dont on retrouve l'imitation dans les récits des déluges Babylonien et Mosaïque. Les géants et les magiciens... "et tout ce qui avait chair mourut... et tous les hommes". Tous, excepté Xisuthrus et Noë qui, substantiellement, ne font qu'un avec le grand Père des Thlinkithians 547... qui, dit-on, s'échappa aussi dans un grand bateau, comme le Noë Hindou – Vaivasvata.
Si nous en croyons la tradition, il nous faut accepter la suite de l'histoire, à savoir que du mariage des descendants des hiérophantes de l'île et de ceux de Noë Atlantéen, naquit une race mêlée de justes et de méchants. D'un côté le monde avec ses Enochs, ses Moïses, ses divers Bouddhas, ses nombreux "Sauveurs" et ses grands hiérophantes, et de l'autre côté, il avait ses "magiciens naturels" qui, manquant de la force de maîtrise que confère l'illumination spirituelle... pervertirent leurs dons pour de mauvais desseins. 548
545 Elle est ainsi divisée jusqu'à présent et les Théosophes et Occultistes qui ont appris à leurs propres dépens à connaître le pouvoir occulte, mais indéniable des Dugpas, ne le savent que trop bien.
546 Voyez dans la Pneumatologiede de Mirville : Des Esprits, III, 57 sqq.
547 Voyez dans Max Müller, Chips, I, 339. "Popol Vuh". Comparez aussi avec Holmberg, Ethnographische Skizzen über die Vœlker des Russischen Amerika, Helsingfors, 1855.
548 Isis, vol. II, 424-425.
Nous pouvons compléter cela par le témoignage que nous fournissent certaines archives et traditions. Dans l'Histoire des Vierges : les Peuples et les Continents disparus, Louis Jacolliot dit :
Une des plus anciennes légendes de l'Inde, conservée dans les temples par tradition orale et écrite, rapporte, qu'il y a plusieurs [III 278] centaines de mille ans, il existait dans l'Océan Pacifique un immense continent qui fut détruit par un soulèvement des couches géologiques et dont il faut chercher les restes à Madagascar, Ceylan, Sumatra, Java, Bornéo et dans les principales îles de la Polynésie.
Les hauts plateaux de l'Hindoustan et de l'Asie n'auraient, suivant cette hypothèse, été représentés, durant ces époques reculées, que par de grandes îles voisines du continent central... Suivant les Brahmanes, cette contrée avait atteint un haut degré de civilisation et la péninsule de l'Hindoustan, agrandie par le déplacement des eaux, au moment du grand cataclysme, n'a fait que continuer la chaîne des traditions primitives qui avaient pris naissance sur ce continent. Ces traditions donnent le nom de Routas aux peuples qui habitaient l'immense continent équinoxial et c'est de leur langue qu'est dérivé le Sanscrit. La tradition Indo-Hellénique, conservée par les plus intelligentes des populations qui émigrèrent des plaines des Indes, parle aussi de l'existence d'un continent et d'un peuple qu'elle appelle l'Atlantide et les Atlandes et qu'elle place dans la partie de l'Océan Atlantique qui est au nord des Tropiques.
Indépendamment de ce fait, l'existence, sous ces latitudes, d'un ancien continent dont on peut retrouver les vestiges dans les îles volcaniques et la surface montagneuse des Açores, des îles Canaries et des îles du Cap Vert, ne manque pas d'être appuyée sur des probabilités géographiques. Les Grecs qui, d'ailleurs, n'osèrent jamais franchir les colonnes d'Hercule, en raison de la terreur que leur causait le mystérieux Océan, apparurent trop tard dans l'antiquité pour que les récits conservés par Platon pussent être autre chose qu'un écho de la légende indienne. De plus, lorsque nous jetons un coup d'œil sur un planisphère, la vie des îles et des îlots éparpillés depuis l'archipel malais jusqu'à la Polynésie, depuis le détroit de la Sonde jusqu'à l'île de Pâques, rend impossible, si l'on admet l'hypothèse de l'existence de continents ayant précédé ceux que nous habitons, de ne pas assigner cet emplacement au plus important de tous.
Une croyance religieuse, commune à Malacca et à la Polynésie, c'est-à-dire aux deux points extrêmes du monde océanique, affirme "que toutes ces îles formaient jadis deux immenses contrées habitées par des hommes jaunes et des hommes noirs qui étaient toujours en guerre et que les Dieux, las de leurs querelles, confièrent la mission de les pacifier à l'Océan, qui engloutit les deux continents, sans qu'il ait été possible, depuis lors, de lui faire rendre ses deux captifs. Les pies des montagnes et les hauts plateaux échappèrent seuls à l'inondation, grâce à l'intervention des Dieux qui comprirent trop tard l'erreur qu'ils avaient commise".
Quoi que puissent contenir ces traditions et quel qu'ait pu être l'emplacement où se développa une civilisation plus ancienne que celle de Rome, de la Grèce, de l'Egypte et des Indes, il est certain [III 279] que cette civilisation a existé et il est d'une haute importance pour la science d'en recueillir les vestiges, si faibles et si fugitifs qu'ils puissent être. 549
Cette tradition Océanique corrobore la légende tirée des "Archives de la DOCTRINE SECRETE". La guerre dont on parle, entre les hommes jaunes et les hommes noirs, se rapporte à la lutte entre les "Fils des Dieux" et les "Fils des Géants", ou habitants et magiciens de l'Atlantide.
La conclusion finale de l'auteur, qui a personnellement visité toutes les îles de la Polynésie et qui a consacré des années à l'étude de la religion, de la langue et des traditions de presque tous les peuples, est la suivante :
En ce qui concerne le continent Polynésien, qui disparut à l'époque des derniers cataclysmes géologiques, son existence repose sur de telles preuves, que nous ne pouvons plus la mettre en doute, si nous voulons rester logiques.
Les trois sommets de ce continent, les Iles Sandwich, la Nouvelle Zélande et l'Ile de Pâques, sont séparés les uns des autres par une distance de quinze cents à dix-huit cents lieues et les groupes d'îles intermédiaires, Viti (Fidji), Tonga, Foutouna (? Foutouha), Ouvea (? Oueeha), les Marquises, Tahiti, Poumoutou (? Pomatou), les îles Gambier, sont eux-mêmes séparés de ces points extrêmes par des distances variant entre sept à huit cents et un millier de lieues.
Tous les navigateurs s'accordent à dire que les groupes extrêmes et les groupes centraux ne pouvaient communiquer entre eux, en raison même de leur position géographique et des faibles moyens de communication dont ils disposaient. Il est physiquement impossible de franchir de pareilles distances dans une pirogue... sans boussole et de voyager durant des mois sans avoir de provisions.
549 Op. cit., pp. 13.
D'autre part, les aborigènes des îles Sandwich, de Viti, de la Nouvelle Zélande, des groupes centraux, de Samoa, de Tahiti, etc., ne s'étaient jamais connus et n'avaient jamais entendu parler les uns des autres, avant l'arrivée des Européens. Et pourtant chacune de ces peuplades soutenait que son île avait jadis fait partie d'une immense surface de terres qui s'étendait vers l'ouest, du côté de l'Asie. Et lorsqu'on rassembla des individus de toutes ces peuplades, on constata qu'ils parlaient tous la même langue, qu'ils avaient les mêmes usages, les mêmes coutumes, les mêmes croyances religieuses. Et tous ceux à qui l'on posait cette question : "Où est le berceau de votre race ?" se bornaient, pour toute réponse, à étendre leur main dans la direction du Soleil couchant. 550
550 Ibid., p. 308.
Au point de vue géographique, cette description est en [III 280] léger désaccord avec les faits qui sont exposés dans les Archives Secrètes, mais elle établit l'existence de ces traditions et c'est tout ce qu'on lui demande. Car, s'il n'y a pas de fumée sans feu, une tradition doit aussi avoir pour base une vérité approximative.
Nous démontrerons, au moment voulu, que la Science moderne corrobore complètement ce qui précède, ainsi que d'autres traditions de la DOCTRINE SECRETE, an sujet des deux Continents perdus. Les restes de l'Ile de Pâques, par exemple, constituent les plus étonnants et les plus éloquents monuments commémoratifs des géants primordiaux. Ils sont aussi grandioses que mystérieux et il suffit d'examiner les têtes des statues colossales, qui sont restées intactes, pour reconnaître au premier coup d'œil les traits et l'aspect qui sont attribués aux géants de la Quatrième Race. Elles semblent coulées dans le même moule, bien que les traits diffèrent – elles donnent l'impression d'un type clairement sensuel, tel que celui qui est attribué aux Atlantéens (les Daityas et les "Atalantiens") dans les ouvrages Esotériques des Hindous. Comparez ces statues avec les figures de certaines autres statues colossales de l'Asie Centrale – celles qui sont voisines de Bamian, par exemple – qui sont, nous dit la tradition, les statues-portraits de Bouddhas appartenant à des Manvantaras précédents ; de ces Bouddhas et de ces héros dont les ouvrages Bouddhistes et Hindous parlent comme d'hommes d'une taille fabuleuse 551, qui étaient les bons et saints frères de leurs méchants frères utérins en général, exactement comme Râvana, le roi géant de Lankâ, était le frère de Koumbhakarna : ils étaient tous des descendants des Dieux par les Richis et, par suite, comme "Titan et son énorme progéniture", ils étaient tous "les premiers nés du Ciel". Ces "Bouddhas", bien que leur aspect soit souvent gâté par la représentation symbolique de longues oreilles pendantes, laissent voir dans l'expression de leurs visages une différence suggestive, que l'on remarque au premier coup d'œil et qui les distingue des statues de l'Ile de Pâques. Ils peuvent appartenir à la même Race – mais les premiers sont des "Fils des Dieux" et les seconds des descendants de puissants sorciers. Toutefois, ce sont des réincarnations et, en tenant compte des inévitables exagérations de la fantaisie et de la tradition populaires, ce sont des personnages historiques 552. Quand vécurent-ils ? Combien de temps s'est-il écoulé depuis que les deux Races, la [III 281] Troisième et la Quatrième, ont vécu et combien de temps après les différentes tribus de la Cinquième ont- elles commencé leur lutte ; les guerres entre le Bien et le Mal ? Les Orientalistes nous assurent que la chronologie est, à la fois, désespérément embrouillée et absurdement exagérée dans les Pourânas et les autres Ecritures Hindoues. Nous sommes tout à fait disposés à admettre le bien fondé de cette accusation. Cependant, si les auteurs aryens ont parfois permis à leur pendule chronologique d'aller trop loin d'un côté, au-delà de la limite légitime des faits, il n'en est pas moins vrai que si l'on compare l'étendue de cette déviation avec celle de la déviation des Orientalistes dans le sens opposé, on constate que la modération se trouve du côté Brahmanique. A la longue, c'est le Pandit que l'on reconnaîtra comme le plus véridique et comme étant plus voisin des faits que le Sanscritiste. Les émondages du Sanscritiste – même lorsque l'on prouve que l'on n'y a eu recours que pour faire cadrer les faits avec une marotte personnelle – sont considérés par l'opinion publique Occidentale comme "une prudente acceptation des faits", tandis que le Pandit est brutalement traité par écrit de "menteur". Mais ce n'est assurément pas une raison pour que tout le monde soit obligé de voir les choses de la même manière ! Un observateur impartial peut en juger autrement. Il peut proclamer que tous deux sont des historiens peu scrupuleux ou les justifier tous deux, chacun sur son terrain, en disant : Les Aryens Hindous écrivaient non pour les masses, mais pour leurs Initiés, qui lisaient la vérité entre les lignes. S'ils ont mélangé des événements et confondu des Epoques intentionnellement, ce n'était pas dans le but de tromper qui que ce fût, mais afin de mettre leur savoir à l'abri de l'œil indiscret de l'étranger. Pour celui qui est à même de compter les générations depuis les Manous et la série des incarnations qui sont spécifiées dans le cas de certains héros 553, dans les Pourânas, le sens et l'ordre chronologique sont très clairs. Quant à l'Orientaliste Occidental, il faut l'excuser en raison de son indiscutable ignorance des méthodes employées par l'Esotérisme archaïque. [III 282]
551 On trouve quelque chose qui approche des statues de Bamian – aussi un Bouddha de 200 pieds de haut – près d'un établissement Jaïniste dans l'Inde du Sud et Il semble dire le seul qui subsiste à présent.
552 Wilson lui-même admet que Râma et Râvana étaient des personnages fondés sur des faits historiques. "Les traditions de l'Inde Méridionale attribuent uniformément sa civilisation... et sa colonisation par des Hindous civilisés (la cinquième Race), à la conquête de Lankâ par Râma" (Vishnou Pourâna, III, 318) – à la victoire des "Fils des Dieux" sur les sorciers Atlantéens, dit la véritable tradition.
Mais de tels préjugés devront très bientôt céder et disparaître devant l'éclat des nouvelles découvertes. Déjà les théories favorites du Dr Weber et du professeur Max Müller – à savoir que l'écriture était inconnue aux Indes, même à l'époque de Pânini (!) et que les Hindous avaient emprunté aux Grecs Macédoniens tous leurs arts et toutes leurs sciences – y compris le Zodiaque, et leur architecture (Fergusson) – toutes ces hypothèses ridicules sont menacées de mort. C'est le fantôme de l'antique Chaldée qui vient au secours de la vérité. Dans sa troisième Hibbert Lecture (1887), le professeur Sayce, d'Oxford, parlant des cylindres Assyriens et Babyloniens récemment découverts, parle longuement d'Ea, Dieu de Sagesse, aujourd'hui identifié avec l'Oannès de Bérose, le demi-homme, demi- poisson, qui enseigna aux Babyloniens la culture et l'art d'écrire. Cet Ea, auquel, grâce au Déluge Biblique, on assignait à peine, jusqu'à présent, une antiquité de 1.500 ans avant J.-C., est aujourd'hui cité dans les termes suivants, en condensant les paroles du professeur :
La ville où habitait Ea, était Eridou qui s'élevait il y a 6.000 ans, sur les bords du Golfe Persique. Son nom veut dire "la bonne cité", un endroit particulièrement saint, puisque ce fut de là que partit la première civilisation Chaldéenne pour se frayer un chemin vers le nord. Comme le dieu de la culture était représenté comme venant de la mer, il est possible que la culture dont Eridou fut le siège ait été d'importation étrangère. Nous savons maintenant, qu'à une époque très reculée, il existait des relations entre la Chaldée et la péninsule du Sinaï, tout comme avec les Indes. Les statues que les Français ont découvertes à Tel-loh (et qui datent d'au moins 4.000 ans avant J.-C.) étaient sculptées dans la pierre excessivement dure que l'on connaît sous le nom de diorite et les inscriptions gravées sur ces statues indiquaient que cette diorite avait été rapportée de Magan – c'est-à-dire de la péninsule du Sinaï qui était alors gouvernée par les Pharaons. Il est de notoriété que le style général de ces statues rappelle la statue en diorite de Kephren, le constructeur de la seconde Pyramide, tandis que, suivant M. Petrie, l'unité de mesure qui est marquée sur le plan de la ville, qu'une des statues de Tel- loh tient sur ses genoux, est la même que celle qui fut employée par les constructeurs des Pyramides. Du bois de teck a été trouvé à Mugheir, ou l'Our des Chaldéens, bien que ce bois soit un produit spécial Indien ; ajoutez à cela qu'une ancienne liste Babylonienne [III 283] de vêtements mentionne du sindhou ou de la "mousseline" que l'on décrit comme étant une "étoffe végétale" 554.
La mousseline, connue aujourd'hui surtout sous le nom de mousseline de Dacca, était connue dans la Chaldée comme étant Hindoue (Sindhou), le bois de teck était employé 4.000 ans avant J.-C. et pourtant, s'il nous fallait en croire les Orientalistes, les Hindous, auxquels la Chaldée doit sa civilisation, comme l'a si bien prouvé le Colonel Vans Kennedy, les Hindous, dis-je, auraient ignoré l'art d'écrire avant que les Grecs ne leur eussent enseigné leur alphabet !
553 Ainsi l'on nous montre, par exemple, un héros né d'abord comme "l'injuste mais vaillant monarque" (Pourousha) des Daityas, Hiranyakashipou, tué par l'Avatar Nara-sinha (Lion-Homme). Ensuite, il naquit sous forme de Râvana, le roi de Lankâ et fut tué par Râma ; après cela il naquit de nouveau comme Shishoupâla, le fils de Rajarshi (Roi Richi) Damaghosha et fut tué par Krishna, la dernière incarnation de Vishnou. Cette évolution parallèle de Vishnou (l'Esprit) avec un Daitya, comme homme, peut paraître, dépourvue de sens, pourtant elle nous donne, non seulement la clef des dates respectives de Râma et Krishna mais encore de certains mystères psychologiques.
554 Comparez avec Hibbert Lectures, en 1877, Sayce, pp. 134-138.