STANCE VI

L'EVOLUTION DES "NES-DE-LA-SUEUR"

 

  1. L'Evolution des trois Races continuée
  2. La Seconde Race crée la Troisième et périt.

 

Shloka 22. L'Evolution des trois Races continuée

 

La Seconde  évolua  alors  la  Née-de-l'Œuf,  la Troisième 326. La sueur augmenta, ses gouttes grossirent et les [III 164] gouttes devinrent dures et rondes. Le Soleil la chauffa, la Lune la rafraîchit et la modela ; le Vent la nourrit jusqu'à maturité. Le Cygne Blanc de la Voûte Etoilée 327 couva la grosse Goutte. L'Œuf de la Future Race, l'Homme-cygne 328 de la fin de la Troisième (a). D'abord mâle-femelle puis homme et femme (b).

326 Race.

327 La Lune.

328 Hamsa.

 

(a)        Le texte de la STANCE implique clairement que l'embryon humain fut nourri ab extra par les Forces Cosmiques et que le "Père-Mère" fournissait apparemment le germe qui mûrissait ; selon toute probabilité, c'était un "œuf né-de-la-sueur" qui devait être couvé, d'une façon mystérieuse, détaché du "double" parental. Il est comparativement facile de s'imaginer une humanité ovipare, puisque, même maintenant, l'homme est, dans un certain sens, "né-de-l'œuf". En outre, Magendie, dans son Précis Elémentaire de Physiologie, en citant : "Un cas où le cordon ombilical était rompu et parfaitement cicatrisé", et dans lequel l'enfant naquit cependant vivant, demande avec raison : "Comment la circulation s'opérait dans cet organe ?" A la page suivante, il dit : "On ne sait rien encore au sujet de l'usage de la digestion chez le fœtus." Et, au sujet de sa nutrition, il pose la question suivante : "Que pouvons-nous donc dire de la nutrition du fœtus ? Les traités de physiologie ne contiennent que de vagues conjectures à ce sujet."

"Oui, pourrait objecter le sceptique, mais le livre de Magendie appartient à la génération précédente et, depuis lors, la Science a fait de tels progrès que son accusation d'ignorance ne peut plus être lancée contre la profession." Vraiment ; tournons-nous alors du côté d'un physiologiste qui jouit d'une grande autorité, Sir Michaël Foster, et, au grand désavantage de la Science moderne, nous allons l'entendre dire :

 En ce qui concerne la naissance et le développement des activités fonctionnelles de l'embryon, notre savoir est, pour ainsi dire, nul. C'est à peine si nous savons quelque chose au sujet des [III 165] diverses phases par lesquelles passe le protoplasme de l'ovule pour que ses qualités fondamentales primaires se différencient et présentent les phénomènes complexes que nous avons tenté d'expliquer dans ce livre. 329

Les élèves du Trinity College, à Cambridge, sont maintenant priés de jeter un voile sur la statue de Hygieia et de bander les yeux des bustes de Galien et d'Hippocrate, de peur qu'ils ne laissent tomber des regards chargés de reproche sur leurs descendants dégénérés. Nous avons encore un fait à noter. Sir Michaël Foster observe un silence prudent au sujet du cas de rupture du cordon ombilical, qui est cité par son grand confrère français.

C'est là une déclaration très curieuse, comme l'explique le commentaire. Pour la rendre claire : La Première Race ayant créé la Seconde par "bourgeonnement", comme il a été expliqué plus haut, la Seconde Race donna naissance à la Troisième – qui fut elle-même séparée en trois divisions distinctes, composées d'hommes procréés d'une façon différente. Les deux premières de ces divisions sont produites par une méthode ovipare, probablement inconnue de l'Histoire Naturelle moderne. Tandis que les premières sous-races de la Troisième Humanité procréaient leur espèce par une sorte d'exsudation de moiteur ou de fluide vital, dont les gouttes formaient, en s'unissant, une boule oviforme – pourquoi ne dirions-nous pas un œuf ? – qui servait de véhicule externe pour la génération, dans son intérieur, d'un fœtus et d'un enfant, le mode de procréation des sous-races suivantes changea, au moins dans ses résultats. Les petits des premières sous-races étaient entièrement sans sexe – voire même sans forme, autant que nous le sachions 330, mais ceux des sous-races suivantes vinrent au monde androgynes. C'est dans la Troisième Race que la séparation des sexes se produisit. D'a-sexuée qu'elle était d'abord, l'Humanité devint distinctement hermaphrodite ou bi-sexuée, et finalement l'Œuf humain commença à donner naissance, graduellement et en vertu d'un développement presque imperceptible produit par leur évolution, d'abord à des êtres chez lesquels un des deux sexes prédominait et finalement à des hommes et à des femmes distincts. Cherchons maintenant la corroboration de ce que nous venons de dire dans les légendes religieuses de l'Orient et de l'Occident. Prenons d'abord la "Race Née-de- l'Œuf". Pensez à [III 166] Kashyapa, le sage Védique – et le plus prolifique des créateurs. Il était fils de Marîchi, le Fils Né-du-Mental de Brahmâ, et il devint le père des Nâgas ou Serpents, entre autres êtres. Exotériquement, les Nâgas sont des êtres semi-divins, qui ont une face humaine et la queue d'un serpent. Pourtant, il existait une race de Nâgas, au nombre de mille seulement, dit-on, nés ou plutôt issus de Kadroû, épouse de Kashyapa, dans le but de peupler Pâtâla, qui est incontestablement l'Amérique, comme nous le prouverons, et il  existait une Nâga-Dvîpa, une des sept divisions de Bhâratavarsha, l'Inde, habitée par un peuple qui portait le même nom et qui est reconnu, même par certains Orientalistes, comme étant historique et comme ayant laissé, jusqu'à nos jours, bien des traces de son existence.

Or, le point sur lequel on insiste le plus, quant à présent, c'est que, quelle que soit l'origine attribuée à l'homme, son évolution s'est faite dans l'ordre suivant :

  1. Il fut sans sexe, comme le sont toutes les formes antérieures ;
  2. puis,   par   une   transition   naturelle,   devint   un   "hermaphrodite solitaire", un être bi-sexué, et
  3. finalement, se sépara et devint ce qu'il est aujourd'hui.

La Science nous enseigne que toutes les formes primitives, bien que sans sexe, "possèdent pourtant la faculté de passer par le processus d'une multiplication a-sexuelle" ; pourquoi donc l'homme serait-il exclu de cette loi de la Nature ? La reproduction bi-sexuelle est une évolution, une forme spécialisée et perfectionnée, sur l'échelle de la Matière, de l'acte de reproduction par scissiparité. Les enseignements Occultes sont éminemment panspermiques et l'histoire des débuts de l'humanité n'est cachée "qu'aux mortels ordinaires" ; l'histoire des Races primitives n'est pas non plus enfouie, pour les Initiés, dans le tombeau du temps, comme elle l'est pour la Science profane. En conséquence, soutenus d'un côté par cette Science, qui nous représente le développement progressif et une cause interne pour chaque modification externe comme une loi de la Nature, et soutenus, d'un autre côté, par une foi implicite dans la Sagesse – nous pourrions même dire la Pansophia – des traditions universelles réunies et conservées par les initiés, qui les ont parfaites au point d'en faire un système presque impeccable, ainsi soutenus, nous nous hasardons à exposer clairement la doctrine.

Dans un savant article, écrit il y a quelque quinze ans, notre savant et respecté ami le professeur Alexandre Wilder, de New-York, démontre l'absolue logique des "Races Primitives à deux sexes" et la nécessité d'y croire, et il donne à [III 167] l'appui un certain nombre de raisons scientifiques 331. Il fait d'abord remarquer qu'une grande partie du monde végétal nous exhibe le phénomène de la bi-sexualité, car la classification de Linné y place presque toutes les plantes. C'est tout aussi bien le cas dans les familles supérieures du règne végétal, que dans ses formes inférieures, depuis le chanvre jusqu'au peuplier de Lombardie et à l'ailante. Dans le règne animal, il en est aussi de même. Dans la vie des insectes, la phalène génère un ver et le ver devient une phalène ; ainsi que le grand secret était expliqué dans les Mystères – Taurus Draconem genuit et Taurum Draco [Le taureau engendra un dragon, et le dragon un taureau]. Les membres de la famille des coralliaires qui, d'après Agassiz, ont employé plusieurs centaines de mille ans, durant la période géologique actuelle, à édifier la péninsule de la Floride, tirent leurs rejetons d'eux- mêmes, comme les bourgeons et les ramifications d'un arbre. Les abeilles sont quelque peu sur le même rang. Les aphidés, ou poux des herbes entretiennent une maison comme les Amazones et les parents vierges perpétuent la race durant dix générations successives.

Que disent les anciens Sages, les Philosophes instructeurs de l'antiquité ? Aristophane s'exprime ainsi, à ce sujet, dans le Banquet, de Platon :

 Notre nature de jadis n'était pas ce qu'elle est maintenant. Elle était androgyne ; la forme et le nom tenaient en même temps du mâle et de la femelle et leur étaient communs... Leurs corps... étaient ronds et ils couraient circulairement 332. Leur force et leur puissance étaient terribles et leur ambition prodigieuse. Aussi Jupiter les divisa chacun en deux, les rendant plus faibles ; Apollon, sous sa direction, referma la peau.

331 Voyez des Extraits de cet Essai dans The Theosophist de février 1883, pp. 112-114, d'où nous avons tiré le résumé qui suit.

 

Meshia et Meshiane constituaient qu'une seule et même personne pour les anciens Persans.

Ils enseignaient aussi que l'homme était le produit de l'Arbre de Vie et qu'il croissait par paires androgynes, jusqu'au moment où ces paires furent séparées par une modification subséquente de la forme humaine.

Dans le Livre des Générations (Toleduth) d'Adam, le verset suivant :

[III 168]

Dieu créa (bara, fit apparaître) l'homme à son image ; il le créa [à] l'image de Dieu, il les créa mâle et femelle.

– donnera le véritable sens, si on le lit ésotériquement, savoir :

Les Elohim [Dieux] firent jaillir de leur propre sein [par modification] l'homme à leur image... ils le créèrent (l'humanité collective ou Adam) ; elle (la Divinité collective) les créa mâle et femelle 333.

Ceci fait ressortir le côté Esotérique. La Race Sans-sexefut leur première Production, une modification d'eux-mêmes, tirée d'eux-mêmes, les pures Existences Spirituelles, et ce fut Adam solus. De là vient la Seconde Race: Adam-Eve, ou Jod-Héva, Androgynes inactifs, et finalement la Troisième ou "l'Hermaphrodite qui se sépare", Caïn et Abel, qui produisent la Quatrième, Seth-Enos, etc. C'est cette Troisième Race, la dernière Race semi-spirituelle, qui fut aussi le dernier véhicule de la Sagesse divine et innée inhérente chez les Enochs, les Voyants de cette Humanité. La Quatrièmequi avait goûté le fruit de l'Arbre du Bien et du Mal – la Sagesse déjà unie à l'intelligence terrestre, donc impure 334 – devait, par conséquent, acquérir cette Sagesse par l'initiation et de grandes luttes. L'union de la Sagesse et de l'Intelligence, la première, gouvernant la seconde, est appelée dans les livres Hermétiques, "le Dieu possédant la double fécondité des deux sexes".

332 Comparez avec la vision (Chap. I) dans laquelle Ezéchiel vit les quatre Etres Divins qui "ressemblaient à l'homme" et pourtant avaient l'aspect d'une roue ; "lorsqu'ils se mouvaient, c'était sur quatre côtés à la fois... car l'esprit de la créature vivante résidait dans les roues".

333 Eugibinus, un Chrétien, et les Rabbins Samuel, Ménassa ben Israel et Maimonides enseignaient que "Adam avait deux faces et une personne et, qu'au début, il était à la fois mâle et femelle – mâle d'un côté et femelle de l'autre [comme le Brahmâ de Manou], mais qu'ensuite les deux parties furent séparées". Le cent trente-neuvième psaume de David [V. 5] était cité par le Rabbin Jérémie ben Eliazar, à l'appui de cela : "Tu m'as façonné par devant et par derrière", – et non pas assailli comme dans la Bible, ce qui est absurde et dépourvu de sens, et cela prouve, comme le pense le professeur Wilder, "que la forme primitive de l'humanité était androgyne".

 

Au point de vue mystique, Jésus était considéré comme étant homme- femme. De même, dans les Hymnes Orphiques, que l'on chantait durant les Mystères, nous trouvons : "Zeus est un mâle, Zeus est une vierge immortelle". L'Ammon Egyptien était, dans son autre moitié, la Déesse Neïth. Jupiter [III 169] a des seins de femme, Vénus est  représentée barbue dans certaines de ses statues et Ilâ, la Déesse, est aussi Sou- Myoumna [lustre, gloire], le Dieu, en sa qualité de progéniture de Vaivasvata.

Le professeur Wilder dit :

Le nom d'Adam ou homme implique lui-même cette double forme d'existence. Il est identique à Athamas ou Thomas (en Tamil, Tam) qui est traduit en grec par Didumos, un jumeau ; par suite, si la première femme fut formée après le premier homme, elle dut, comme conséquence logique et nécessaire, être "tirée de l'homme". Aussi lisons-nous : "Et le côté que le Seigneur Dieu [Elohim] avait retiré à l'homme, il en fit une femme." Le mot hébreu qui est employé ici est Tzala qui comporte la traduction que nous avons donnée. Il est facile de retrouver les traces de la légende dans Bérose, qui dit que Thalatth (l'Omorôka ou Dame d'Ourka) fut le commencement de  la  création.  Elle  était  aussi  Télita [? Mélita], la reine de la Lune...

 334 Voyez l'union de Chochmah, la Sagesse, avec Binah, l'Intelligence, ou Jéhovah, le Démiurge, appelé Entendement dans les Proverbes de Salomon (VIII. 5). La Sagesse (la divine Sagesse Occulte) crie aux hommes : "ô simples, comprenez la Sagesse et ayez, ô insensés, un cœur qui comprenne." C'est l'Esprit et la Matière, le Nous et Psyché, au sujet de laquelle saint Jacques dit qu'elle est "terrestre, sensuelle et diabolique". (III. 15)

 

Les deux mémorables naissances gémellaires de la Genèse, celle de Caïn et d'Abel et celle d'Esaü et de Jacob, reflètent la même idée. Le nom de Hébel est le même que celui d'Eve et sa caractéristique semble être féminine. "Ses désirs se rapportent à toi, dit le Seigneur Dieu à Caïn et tu auras seigneurie sur lui." Le même langage avait été tenu à Eve : "Tes désirs se rapportent à ton mari et il aura seigneurie sur toi."

Aussi l'unité bi-sexuelle primordiale de la Troisième Race Racine humaine est-elle un axiome dans la Doctrine Secrète. Les individus vierges qui la composaient furent élevés au rang de "Dieux", parce que cette Race représentait leur "Dynastie Divine". Les modernes se contentent d'adorer les héros mâles de la Quatrième Race, qui créèrent des Dieux d'après leur propre image sexuelle, tandis que les Dieux de l'humanité primordiale étaient "mâles et femelles".

Comme nous l'avons dit dans le volume I, les Humanités se développaient de façon coordonnée et parallèlement aux quatre Eléments, chaque nouvelle Race étant physiologiquement adaptée en vue  de l'Elément additionnel. Notre Cinquième Race se rapproche rapidement du Cinquième Elément – appelez-le l'éther interstellaire, si vous voulez – qui se rapporte toutefois plus à la psychologie qu'à la physique. Nous autres hommes, nous avons appris à vivre sous tous les climats, qu'ils soient froids ou tropicaux, mais les deux premières Races n'avaient pas à s'occuper de climats et n'étaient subordonnées à aucune température, ni à aucun changement de température. Ainsi l'on nous enseigne que les hommes vécurent, jusqu'à la fin de la Troisième Race[III 170] Racine, lorsqu'un printemps éternel régnait sur le Globe entier comme en jouissent aujourd'hui les habitants de Jupiter, monde qui, suivant l'expression de M. Camille Flammarion :

N'est pas soumis, comme le nôtre, aux vicissitudes des saisons ou aux brusques changements de température, mais jouit de tous les trésors d'un éternel printemps. 335

 335 Pluralité des Mondes, p. 69.

 

Les Astronomes qui maintiennent que Jupiter est en état de fusion, dans le sens que nous donnons à ce terme, sont invités à régler leur différend avec ce savant Astronome Français 336. [III 171]

 336 Une hypothèse, imaginée en 1881 par M. W. Mattieu Williams, semble n'avoir fait que peu d'impression sur les Astronomes. L'auteur de The Fuel of the Sun dit dans Knowledge du 23 décembre 1881 :

"Faisant maintenant l'application des recherches du docteur Andrews aux conditions de l'existence solaire... j'en conclus que le Soleil ne possède aucun noyau, ni solide, ni liquide, ni gazeux, mais est composé de matière dissociée à l'état critique, entourée, d'abord, par une enveloppe flamboyante, due à la recombinaison de la matière dissociée, puis, en dehors de celle-ci, par une autre enveloppe de vapeurs résultant de cette combinaison."

Cela constitue une nouvelle théorie à ajouter à d'autres hypothèses, toutes scientifiques et orthodoxes. La signification de "l'état critique" est expliquée par M. W. Mattieu Williams dans le même journal (9 décembre 1881), dans un article sur "les Solides, les Liquides et les Gaz". Parlant d'une expérience faite par le docteur Andrews sur l'acide carbonique, le Savant dit que :

"Lorsque l'on atteint la température de 88 degrés, toute limite disparaît entre l'état liquide et l'état gazeux ; les liquides et les gaz se trouvent mêlés en un mystérieux fluide intermédiaire ; quelque chose de fluctuant et d'indéfini remplit tout le tube – un liquide éthérisé ou un gaz visible. Tenez un tisonnier, rougi au feu, entre vos yeux et la lumière, vous verrez une sorte de vague montante ce qui semble être de l'air liquide. L'aspect du fluide hybride qui se trouve dans le tube ressemble à cela, mais ce liquide est sensiblement plus dense et tient évidemment le milieu entre l'état liquide et l'état gazeux de la matière, comme la poix et la mélasse tiennent le milieu entre les liquides et les solides."

La température à laquelle ce phénomène se produit a été dénommée par le docteur Andrews la "température critique" ; à ce moment, les états gazeux et liquide sont "continus" et il est probable que toutes les autres substances susceptibles d'exister sous ces deux états ont, chacune, leur température critique.

Continuant à spéculer sur cet état "critique", M. W. Mattieu Williams émet certaines théories tout à fait Occultes sur Jupiter et sur d'autres Planètes. Il dit :

"Les notions que nous possédons sur les solides, les liquides et les gaz sont tirées de l'expérience que nous avons de l'état de matière qui existe sur cette Terre. Si nous pouvions être transportés sur une autre planète, ces notions seraient étrangement modifiées. Dans Mercure, l'eau prendrait rang parmi les gaz condensables ; dans Mars, elle serait classée parmi les solides fusibles, mais, alors, dans Jupiter, comment serait-elle classée ?

"Des observations récentes nous permettent de considérer Jupiter comme un soleil en miniature, entouré d'une enveloppe extérieure de matière nuageuse, formée en apparence par de l'eau partiellement condensée, mais qui est intérieurement à la température du rouge ardent ou même plus chaude encore. Son atmosphère vaporeuse est évidemment d'une énorme profondeur et la force de la gravitation, sur sa surface extérieure visible, étant deux fois et demie plus forte que celle qui existe sur la surface de notre Terre, la pression atmosphérique, lorsque l'on descend au-dessous de cette surface visible, doit bientôt atteindre le point auquel la vapeur d'eau serait ramenée à son état critique. Nous pouvons donc en conclure que les océans de Jupiter ne sont formés ni de liquide gelé, ni d'eau à l'état gazeux, mais constituent des océans ou atmosphères d'eau critique. Si des poissons y nagent ou y volent, il faut qu'ils soient organisés d'une façon très critique."

Comme la masse de Jupiter est 300 fois plus grande que celle de la Terre et que son énergie de compression vers le centre est proportionnelle, ses matériaux, s'ils sont semblables à ceux qui existent sur la Terre et ne sont pas plus chauds, devraient être considérablement plus denses et la planète tout entière devrait avoir un poids spécifique supérieur, mais nous savons, par  le mouvement de ses satellites, qu'au lieu de cela, son poids spécifique est inférieur à un quart de celui de la Terre. Cela justifie la conclusion que Jupiter possède une chaleur intense, car l'hydrogène lui- même, s'il était froid, deviendrait plus dense que Jupiter sous l'influence d'une pareille pression.

"Comme toutes les substances élémentaires peuvent exister comme solides, liquides ou gaz, ou à l'état critique, suivant les conditions de température et de pression, il m'est permis d'en conclure, d'une façon hypothétique, que Jupiter est une planète qui n'est ni solide, ni liquide, ni gazeuse, mais une planète critique, ou un globe formé intérieurement d'éléments associés à l'état  critique et entouré par une atmosphère dense de leurs vapeurs et de celles de quelques-uns de leurs composés tels que l'eau. Le même raisonnement s'applique à Saturne et à d'autres planètes grandes et raréfiées."

Il est agréable de constater combien "l'imagination scientifique" vient chaque année plus près de la frontière de nos Enseignements Occultes.

 

Il faut cependant se souvenir toujours que le "Printemps éternel" dont il est question, n'est qu'un état considéré comme tel par les Joviens. Ce n'est pas le "printemps" tel que nous le connaissons. Cette réserve permet de trouver un terrain de conciliation entre les deux théories que nous venons de citer. Toutes deux comprennent des vérités partielles.

La tradition universelle est donc que l'humanité a graduellement évolué pour atteindre sa forme actuelle, en partant d'un état presque transparent des tissus, et cela nullement par miracle ni grâce aux rapports sexuels. De plus, cela concorde absolument avec les anciennes Philosophies, depuis celles de l'Egypte et des Indes, avec leurs Dynasties Divines, jusqu'à celle de Platon. Et toutes ces croyances universelles doivent être classées avec les "pressentiments" et les "conceptions obstinées" des croyances populaires, dont quelques-unes sont indéracinables. De pareilles croyances, comme le fait remarquer Louis Figuier, sont :

Fréquemment le fruit de la sagesse et de l'observation d'un nombre infini de générations d'hommes... [car] une tradition qui [III 172] a une existence uniforme et universelle, possède tout le poids d'un témoignage scientifique. 337

337 Le Lendemain de la Mort, p. 23.

 

Et dans les allégories Pourâniques il y a plus d'une tradition de ce genre, ainsi que nous l'avons montré. En outre, la doctrine d'après laquelle la Première Race de l'humanité fut formée au moyen des Chhâyâs ou Images Astrales des Pitris est pleinement corroborée dans le Zohar :

 Dans le Tzelem, image reflétée des Elohim [les Pitris], Il fit Adam (l'homme). 338

On a prétendu, à maintes reprises, en guise d'objection, que si élevé qu'ait été le degré de la pensée métaphysique dans l'Inde antique, les anciens Egyptiens ne pouvaient se vanter que d'une idolâtrie et d'une zoolâtrie grossières ; Hermès, comme on le prétend, ayant été l'œuvre de Mystiques Grecs qui vivaient en Egypte. A cela on peut répondre de la façon suivante : une preuve directe que les Egyptiens croyaient à la DOCTRINE SECRETE, c'est qu'elle leur était enseignée lors  de l'Initiation. Que ceux qui font des objections ouvrent l'Eglogue physique et

morale de Stobée, le compilateur grec d'anciens fragments, qui vivait au Vème siècle après J.-C. Ce qui suit, est la transcription qu'il donne d'un antique fragment Hermétique qui expose la théorie Egyptienne de l'Ame. La voici, traduite mot à mot :

D'une Ame, celle du Tout, jaillissent toutes les âmes, qui se dispersent comme si elles étaient intentionnellement distribuées de par le monde. Ces âmes passent par de nombreuses transformations ; celles qui sont déjà des créatures rampantes,  deviennent  des  animaux aquatiques ; de ces animaux aquatiques sont dérivés les animaux terrestres ; et de ces derniers, les oiseaux. Les hommes naissent du sein des êtres qui vivent en haut dans les airs (dans le ciel). En atteignant l'état humain, les âmes reçoivent le principe de l'immortalité (consciente), deviennent des esprits, puis passent dans le chœur des Dieux.

 338 Edition de Crémone, III, 76 a; Edition Brody, III, 159 a; Qabbalah, d'Isaac Myer, p. 420.

 

Shloka 23. La Seconde Race crée la Troisième et périt.

 

Les Auto-générés furent les Chhâyâs, les Ombres des Corps des Fils du Crépuscule. Ni l'eau ni le feu ne pouvaient les détruire. Leurs fils furent 339. [III 173]

339 Détruits de cette façon.

 

Ce verset ne peut être compris sans l'aide des Commentaires. Il veut dire que la Première Race-Racine, les "Ombres" des Progéniteurs, ne pouvait être blessée ou détruite par la mort. Etant si éthérée et si peu humaine par sa constitution, elle ne pouvait être affectée par  aucun élément – déluge ou feu, mais ses "Fils", la Seconde Race-Racine, pouvaient être et furent détruits de cette façon. De même que les Progéniteurs s'immergèrent dans leurs propres Corps Astrals, qui étaient leurs progénitures, de même ces progénitures furent absorbées dans leurs descendants, les "Nés-de-la-Sueur". Ceux-ci furent la Seconde Humanité – composée de monstres semi-humains et gigantesques de la nature la plus hétérogène – la première tentative faite par la nature matérielle pour construire des corps humains. Les terres constamment fleuries (entre autres le Grœnland) du Second Continent furent successivement transformées d'Edens, au printemps éternel, en des Hadès hyperboréens. Cette transformation fut provoquée par le déplacement des grandes eaux du Globe, par le changement de lit des océans ; et la masse de la Seconde Race périt durant cette première grande crise de l'évolution et de la consolidation du Globe pendant la période humaine. Il s'est déjà produit quatre de ces grands cataclysmes 340 et nous pouvons nous attendre à un cinquième pour nous-mêmes, lorsque le moment sera venu.

 340 Le premier se produisit lorsque ce qui est maintenant le Pôle Nord fut séparé des Continents ultérieurs.

 

QUELQUES MOTS A PROPOS DES "DELUGES" ET "DES NOES"

 

Les récits que renferment les diverses Pourânâs au sujet de nos Progéniteurs sont aussi contradictoires, dans leurs détails, que tout le reste. Ainsi, tandis que, dans le Rig Véda, Idâ ou Ila est appelée l'Instructrice de Vaivasvata Manou, Sâyana fait d'elle une Déesse qui préside aux destinées de la Terre et la Shatapatha Brâhmananous la présente comme une fille de Manou, le fruit de son sacrifice et, plus tard, comme femme avec laquelle il (Vaivasvata) donna naissance à la race des Manous. Dans les Pourânas elle est aussi la fille de Vaivasvata et pourtant la femme de Boudha (la Sagesse), le fils illégitime de la Lune (Soma), et de Târâ, l'épouse de la planète Jupiter (Brihaspati). Tout cela semble un fouillis, pour le profane, mais est plein d'une signification philosophique [III 174] pour l'Occultiste. L'aspect extérieur du récit permet à lui seul de percevoir un sens secret et sacré, mais les détails sont tellement embrouillés, à dessein, que l'œil expérimenté d'un Initié peut seul les suivre et classer les événements dans leur ordre véritable.

Le récit, tel qu'il est fait dans le Mahâbhârata, frappe la tonique, et pourtant il est nécessaire qu'il soit expliqué au moyen du sens occulte que renferme la Bhagavad Gîtâ.C'est le prologue du drame de notre (Cinquième) Humanité. Tandis que Vaivasvata faisait ses dévotions sur le bord du fleuve, un poisson sollicite sa protection contre un plus grand poisson. Il le sauve en le plaçant dans une jarre ; tout en devenant de plus en plus grand, ce poisson le renseigne sur le Déluge approchant. Ce poisson est le célèbre Avatar Matsya, le premier Avatar de Vishnou, le Dagon 341 du Xisouthrous Chaldéen, et bien d'autres choses encore. Le récit est trop connu pour avoir besoin d'être répété. Vishnou donne l'ordre de construire un navire dans lequel Manou est sauvé, avec les sept Richis, d'après le Mahâbhârata ; pourtant ce détail manque dans les autres textes. Les sept Richis représentent ici les sept Races, les sept Principes  et diverses autres choses, car il y a, encore une fois, un double mystère impliqué dans cette multiple allégorie.

Nous avons dit ailleurs que le Grand Déluge comportait plusieurs significations et qu'il se rapportait, tout comme la CHUTE, aux événements spirituels et physiques, cosmiques et terrestres : en bas comme en haut. Le Navire ou Arche – Navis – en un mot, étant le symbole du Principe générateur féminin, est représenté dans les cieux par la Lune et sur la Terre par la Matrice ; toutes deux sont les vaisseaux et les réceptacles des semences de la vie et de l'être, que le Soleil, ou Vishnou, le Principe mâle, vivifie et fructifie. Le Premier Déluge Cosmique  se rapporte à la Création Primordiale, ou formation du Ciel et des Terres ; dans ce cas le Chaos et le grand Abîme représentent le "Déluge" et la Lune représente "la Mère" de qui procèdent tous les germes vitaux 342. Mais le Déluge Terrestre et son histoire ont aussi leur double [III 175] application. Dans un cas, il se rapporte au mystère concernant le sauvetage de l'humanité d'une destruction complète, lorsque la femme mortelle devint le réceptacle de la semence humaine à la fin de la Troisième Race 343, et, dans l'autre cas, il se rapporte à la réelle et historique Submersion Atlantéenne. Dans les deux cas, la "Légion" – ou le Manou qui sauva la "semence" – est appelée Vaivasvata Manou. De là la divergence qui existe entre la version Pourânique et les autres versions ; tandis que dans la Shatapatha Brâhmana, Vaivasvata produit une fille et, par elle, donne naissance à la race de Manou – allusion aux premiers Manoushyas humains, qui devaient créer les femmes par la Volonté (Kriyâshakti), avant qu'elles ne naquissent naturellement des Hermaphrodites en tant que sexe indépendant et fussent, en conséquence, considérées comme les "filles" de leurs créateurs. Le récit Pourânique fait d'Idâ, ou Ilâ, l'épouse de Boudha (la Sagesse). Cette version se rapporte aux événements du Déluge Atlantéen, lorsque Vaivasvata, le grand Sage sur la Terre, sauva la Cinquième Race Racine du danger d'être détruite avec les restes de la Quatrième.

341 Nous ne devons pas oublier qu'en tête des Dieux Babyloniens se trouvaient Es, Anou et le Bel primordial ; et qu'Ea, le premier de tous, était le Dieu de la Sagesse, le grand "Dieu de la Lumière" et de l'Abîme et qu'on l'identifiait avec Oannès ou le Dagon Biblique – le Poisson-Homme qui jaillit du Golfe Persique.

342 Ce n'est que beaucoup plus tard que la Lune devint un Dieu mâle ; elle était Soma pour les Hindous, Nanak ou Nannar ainsi que Sin, le fils de Moulil, l'ancien Bel, pour les Chaldéens. Les Akkadiens l'appelaient le "Seigneur des Fantômes" et c'était le Dieu de Nipour (Niffer) dans la Babylonie septentrionale. C'est Moulil qui fait tomber les eaux du Déluge du Ciel sur la Terre, et c'est pour ce motif que Xisousthrous ne lui permettait pas d'approcher de son autel. Ainsi que l'ont établi maintenant les Assyriologues modernes, c'est la septentrionale Nipour qui était le centre d'où se répandit la Magie (noire) Chaldéenne, et Eridou (la Méridionale) qui était le siège primitif du culte du Dieu de la culture, Dieu de la Sagesse Divine – car le Dieu Soleil était partout la Divinité Suprême. Chez les Juifs, la Lune se rattache au Jéhovah d'Israël et à sa semence, car Our était le principal centre du culte du Dieu-Lunaire et l'on dit qu'Abraham venait d'Our, lorsque d'A-Bra(h)m, Il devint Abraham.

343 Lorsque Nârada, l'ascète-vierge, menaça de mettre fin à l'existence de la race humaine en empêchant les fils de Daksha de la procréer.

 

Cela est clairement exposé dans la Bhagavad Gîtâ, où l'on faire dire à Krishna :

  Les sept Grands Richis, les quatre précédents Manous, participant de mon essence, naquirent de mon mental ; de leur sein jaillit (naquit) la race humaine et le monde. 344

Ici, les quatre précédents Manous, sur sept, sont les quatre Races 345 qui ont déjà vécu, car Krishna appartient à la [III 176] Cinquième Race, puisque sa mort est le point de départ du Kali Youga. Ainsi Vaivasvata Manou, le fils de Soûrya, ou le Soleil et le Sauveur de notre Race, est relié à la "Semence de Vie", tant physiquement que spirituellement. Pour le moment, toutefois, bien que nous parlions de tous, nous n'avons à nous occuper que des deux premiers.

Il est indéniable que le "Déluge" constitue une tradition universelle. Les "Périodes Glaciaires" ont été nombreuses et il en est de même des "Déluges", pour différentes raisons. Stockwell et Croll énumèrent environ une demi-douzaine de Périodes Glaciaires et de Déluges qui les suivirent, et ils font remonter le premier de tous à 850.000 ans et le dernier à environ 100.000 ans 346. Mais lequel fut notre Déluge ? Assurément le premier, celui qui jusqu'à ce jour se trouve mentionné dans les traditions de tous les "Le mot "Chatvârah" est séparé du mot "Manavah" et on l'interprète comme ayant trait à Sanaka, Sanandana, Sanatkoumâra et Sanatsoujâta, qui étaient aussi compris parmi les fils nés-du-mental de Prajâpati.

peuples et cela depuis l'antiquité la plus reculée ; celui qui finit par faire disparaître les dernières péninsules de l'Atlantide, en commençant par Routa et Daitya, et en terminant par l'île, comparativement petite, dont Platon fait mention. Cela est établi par la concordance de certains détails dans toutes les légendes. Ce fut le dernier de ceux qui eurent un caractère aussi gigantesque. Le petit déluge, dont le Baron Dunsen a retrouvé des traces dans le centre de l'Asie et qu'il fait remonter à 10.000 ans avant Jésus-Christ, n'avait aucun rapport, ni avec le Déluge semi-universel, ou Déluge de Noé – celui-ci ne représentant qu'un [III 177] exposé purement mythique des anciennes traditions – ni même avec la submersion de la dernière île atlantéenne, ou, du moins, n'avait avec eux qu'un  rapport moral.

344 X, 6.

345 Cela est corroboré par un savant Brahmane. Dans ses excellentes Conférences sur le Bhagavad Gitâ (Theosophist d'avril 1887, p. 444) le conférencier dit : "Il existe une particularité sur laquelle je dois appeler votre attention. Il [Krishna] parle ici de quatre Manous. Pourquoi parle-t-il de quatre ? Nous sommes maintenant dans le septième Manvantara – celui de Vaivasvata. S'il parle des Manous passés, il devrait parler de six, mais il n'en mentionne que quatre. Dans certains commentaires, on a cherché à interpréter ceci d'une manière singulière.

 

"Toutefois, cette interprétation conduira à la plus absurde des conclusions et aura pour conséquence que la phrase se contredirait elle-même. Un qualificatif est attribué aux personnes auxquelles le texte fait allusion. Il est bien connu que Sanaka et les trois autres refusèrent de créer, bien que les autres fils eussent consenti à le faire ; aussi, lorsqu'il est question des personnes qui donnèrent naissance à l'humanité, serait-il absurde de comprendre ces quatre-là dans la liste. Le passage doit être interprété sans diviser le mot composé en deux. Le nombre des Manou sera alors de quatre et l'affirmation sera en contradiction avec le récit Pourânique, tout en restant en harmonie avec la théorie Occulte. Vous devez vous souvenir qu'il est dit que nous sommes maintenant dans la Cinquième Race Racine. Chaque Race Racine est considérée comme étant la Santati [descendance] d'un Manou spécial. Or, la Quatrième Race est passée, ou en d'autres termes, Il y a déjà eu quatre Manous."

346 Stockwell, Smithsonian Contributions of Knowlege, XVIII ; R. W. Mc. Farland, American Journal of Science, III, XI, 456, et Climate and Time de Croll. La Lémurie ne fut pas submergée par une inondation, mais fut détruite par l'action volcanique et s'abîma ensuite sous les flots.

 

Notre Cinquième Race – les non-initiés de cette Race – entendant parler de nombreux Déluges, les a confondus entre eux et n'en connaît plus qu'un seul. Celui-là modifia tout l'aspect du Globe, par les changements qu'il provoqua dans les mers et les terres.

Nous pouvons comparer cela avec la tradition des Péruviens, d'après laquelle :

Les Incas, au nombre de sept, ont repeuplé la terre après le déluge. 347

Humboldt mentionne la version mexicaine de la même légende, mais confond quelque peu les détails de la légende qui existe encore au sujet du Noé Américain. Néanmoins, l'éminent Naturaliste mentionne  deux fois sept compagnons et l'oiseau divin qui précédait le navire des Aztèques, ce qui fait ainsi quinze élus, au lieu de sept et de quatorze. Cela fut probablement écrit sous l'empire d'une involontaire réminiscence  de Moïse, qui aurait, dit-on, mentionné quinze petit-fils de Noé comme ayant été sauvés avec leur grand-père. Xisouthrous, le Noé chaldéen, est, lui aussi, sauvé et transporté "vivant" au ciel – comme Enoch – avec les sept Dieux, les Kabires, ou les sept Titans divins. Le Yao chinois est, lui aussi, accompagné de sept effigies qui font voile avec lui et qu'il animera lorsqu'il débarquera, pour les employer comme "semence  humaine". Osiris, lorsqu'il entre dans l'Arche, ou Bateau Solaire, prend sept rayons avec lui, etc.

 347 Coste, I. IV, 19.

 

Sanchoniathon fait des Aletæ ou Titans (les Kabires) des contemporains d'Agruerus, le grand Dieu Phénicien – que Faber a cherché à identifier avec Noé 348 ; de plus on soupçonne que le nom de "Titan" est dérivé de Tit-Ain – les "fontaines de l'abîme chaotiques" 349. (Tit-Theus, ou Tityus est le "divin déluge") ; et l'on nous montre ainsi les Titans, qui sont au nombre de sept, comme se rattachant au Déluge et aux sept Richis sauvés par Vaivasvata Manou 350. [III 178]

Ces Titans sont les fils de Kronos, le Temps et de Rhéa, la Terre ; et, comme Agruerus, Saturne et Sydyk sont un seul et même personnage ; comme aussi les sept Kabires sont représentés comme les fils de Sydyk ou Kronos-Saturne, il en résulte que les Kabiri et les Titans sont identiques. Pour une fois, le pieux Faber avait raison lorsqu'il concluait en écrivant :

Je ne doute pas que les sept Titans ou Cabiri ne soient aussi les mêmes que les sept Richis de la mythologie (?) hindoue, dont on dit qu'ils échappèrent en se réfugiant sur un bateau avec Menu le chef (?) de la famille. 351

Mais il est moins heureux dans ses spéculations lorsqu'il ajoute :

Les Hindous, dans leurs légendes sauvages, ont diversement défiguré l'histoire des Noachides (?!), pourtant, il est à remarquer qu'ils semblent s'en être religieusement tenus au nombre sept 352 : aussi le Cap. Wilford fait-il judicieusement observer que "les sept Manous, les sept Brahmâdicas, ainsi que les sept Richis, sont   peut-être   les   mêmes   et   ne   forment que sept personnes individuelles 353. Les sept Brahmâdicas étaient prajâpatis ou seigneurs des prajas ou créatures. L'humanité naquit d'eux et ce sont probablement les mêmes que les sept Menus... Ces sept grands ancêtres de la race humaine furent... créés dans le but de repeupler la terre d'habitants" 354. La ressemblance mutuelle des Cabires, des Titans, des Richis et de la famille Noétique, est trop  frappante  pour  être  l'effet  d'un  simple accident. 355

348 Agruerus, c'est Kronos, ou Saturne, et le prototype du Jéhovah Israélite. Comme se rattachant à Argha, la Lune ou Arche de salut, Noé, au point de vue mythologique, ne fait qu'un avec Saturne, mais alors cela ne peut se rapporter au déluge terrestre. (Voyez les Cabiri, de Faber, I, 35, 43-45.)

349 Ibid., II, 240.

350 Sanchoniathon dit que les Titans étaient les fils de Cronos et qu'ils étaient au nombre de sept,  et il les appelle des adorateurs du feu, Aletæ (Fils d'Agni ?) et diluviens. Al-ait est le Dieu du Feu.

351 Ibid., I. 130, note.

352 Sept, remarquons-le, dont les Aryens et non les Sémites, furent l'origine, tandis que les Juifs empruntèrent ce nombre aux Chaldéens.

353 Sept Fils individuels de Dieu, ou Pitaras, Pitris ; aussi, dans ce cas, les fils de Kronos ou Saturne (Kâla, "Temps") et d'Arkitès, comme les Cabires et les Titans, comme le prouve leur nom "d'Ancêtres-Lunaires", la Lune étant l'Arche ou Argha, sur l'Abîme Aqueux de l'Espace.

354 Asiatic Researches, V, 246.

355 Kabiri, ibid., loc. cit.

356 Orpheus apud Proclum in Timœum, V, 295.

357 Arnobe, Contra Gentes, III, 124 ; cité par Faber, op. cit., I, 135.

  

Faber fut amené à commettre cette erreur et, postérieurement, il édifia toute sa théorie des Kabires sur le fait que le nom du Japhet des Ecritures était sur la liste des Titans contenue dans un verset des Hymnes Orphiques. D'après Orphée, les noms des sept Titans Arkites – que Faber se [III 179] refuse à identifier avec les Titans impies leurs descendants – étaient Kœus, Krœus, Phorcys le puissant, Kronos, Oceanus, Hypérion et Iapetus.

Κοι̃ὸν τε, Κροι̃ὸν τε µε̉γαν, Φορχύν τε κραταιὸν,

Καὶ Κρὸνον, Ώκεανὸν θ ̉, ΄υπερίονα τ ̉, Ίαπετον τε. 356

Mais pourquoi le Babylonien Ezra n'aurait-il pas pu adopter le nom de Iapetus pour l'un des fils de Noé ? Les Kabires, qui sont les Titans, sont aussi appelés Manès et leur mère Mania, d'après Arnobe 357. Les Hindous peuvent donc prétendre avec beaucoup plus de raison que les Manès signifient leurs Manous et que Mania est le Manou femelle du Râmayâna. Mania est Ilà ou Idâ, l'épouse et fille de Vaivasvata Manou, par laquelle "il donna naissance à la race des Manous". Comme Rhéa, la mère des Titans, elle est la Terre – Sâyana fait d'elle la Déesse de la Terre – et elle n'est que la seconde édition et la répétition de Vâch. Idâ et Vâch sont, toutes deux, tantôt mâles, tantôt femelles ; Idâ devient Soudyoumna, et Vâch, la "Virâj femelle", se transforme en femme afin de punir les Gandharvas ; l'une des versions a trait à la Théogonie cosmique et divine, l'autre à une période postérieure. Les Manès et la Mania d'Arnobe sont des noms d'origine Indienne que se sont appropriés les Grecs et les Latins qui les ont défigurés.

Tout cela n'est donc pas accidentel, mais le résultat d'une doctrine archaïque unique, commune à tous et dont les Israélites – par Ezra, l'auteur des livres Mosaïques modernisés, ont étaient les derniers adaptateurs. Ils étaient si peu scrupuleux au sujet de la propriété d'autrui, que le Pseudo- Bérose 358 établit que Titæa – dont Diodore de Sicile 359 fait la mère des Titans ou Diluviens – était l'épouse de Noé. Faber l'appelle le "Pseudo- Bérose" et, pourtant, accepte le renseignement, afin d'enregistrer une preuve de plus établissant que les Païens ont emprunté tous leurs Dieux aux Juifs, en transformant le matériel patriarcal. D'après notre humble opinion, c'est là justement la meilleure preuve possible pour établir le contraire. Cela montre, aussi clairement que des faits le peuvent, que ce sont les pseudo-personnages Bibliques qui sont tous empruntés aux mythes Païens, si l'on veut que ce soient des mythes. Cela prouve, tout au moins, que Bérose connaissait parfaitement la  source  de  la  Genèse  et  savait [III 180] qu'elle avait le même caractère cosmique et astronomique que les allégories d'Isis-Osiris et de l'Arche, ainsi que d'autres symboles "Arkites" plus anciens. En effet, Bérose dit que "Titæa magna" fut appelée ensuite Aretia 360 et adorée avec la Terre et cela identifie Titæa, l'épouse de Noé, avec Rhéa, la mère des Titans et avec Idâ, car toutes deux sont des Déesses qui président aux destinées de la Terre et sont les Mères des Manous et Manès, ou Titans-Kabires. Titæa-Aretia recevait un culte sous le nom de Horchia, dit le même Bérose, et c'est un titre de Vesta, Déesse de la Terre.

 358 Ant., I, 8.

359 Bibl., III, 170.

360 Aretia est la forme féminine d'Ariès, le Mars Egyptien. De là vient le mot chaldéen (et aujourd'hui hébreu) de (צרא) (Arets), "Terre". Seyffarth, l'auteur de Beiträge zur Kenntniss (sous le titre de "Ariès", Mars) cite ce qui suit : "Addit Sedrenus (Salm, I, c) : stella Martis ab Ægyptiis vocatur Ertosi (plantare, generare). Significat autem hoc omnis generis procreationem et vivificationem, omnisque substantiæ et materiæ, naturam et vim ordinantem atque procreantem." [Cedranus, dit (Salm, I, c) Mars, était appelé par les Egyptiens Ertosi (planter ou générer). Cela implique la création et la vivification de tout, la création et la détermination de la nature et des pouvoirs de toute substance ou matière.] C'est la Terre comme "source de l'être", ou, comme l'explique l'auteur de The Source of Measures (p. 186), Arts a la même signification en Hébreu et en Egyptien et "combine l'idée première de terre comme source ; précisément comme, dans l'Hébreu lui-même, sous une autre forme, Adam et Mâtim (Mars) ne font qu'un et combinent l'idée de terre avec Adam, sous la forme de h-adam-h".

 

Sicanus   deificavit   Aretiam   et   nominavit   eam   linguâ Janigenâ Horchiam. 361

Il n'y a guère de poètes anciens, des époques historiques et préhistoriques, qui omettent de parler de l'immersion de deux continents – souvent appelés îles – sous une forme ou sous une autre. De là, la destruction en plus d'Atlantis de l'île Phlégyenne. Pausanias et Nonnus nous racontent tous deux comment :

Le sévère Neptune ébranla sur ses bases profondes L'île Phlégyenne et plongea sous les flots

Ses habitants impies. 362

Faber était convaincu que l'île Phlégienne 363 était l'Atlantide, mais toutes les allégories de ce genre sont des échos, plus ou moins déformés, de la tradition Hindoue sur ce grand Cataclysme qui atteignit la Quatrième Race, réellement humaine bien que gigantesque, qui précéda la Race Aryenne. Pourtant, comme nous venons de le dire, la légende du Déluge a, comme toutes les autres légendes, plus d'une signification. [III 181] Elle rapporte, dans la Théogonie, à des transformations pré-cosmiques, à des corrélations spirituelles – si absurde que puisse paraître cette expression, pour des oreilles scientifiques – et aussi à la Cosmogonie subséquente ;  à la grande INONDATION DES EAUX (Matière) dans le CHAOS, éveillé et fructifié par les Rayons-Esprits qui furent submergés par la mystérieuse différenciation et qui périrent en elle – un mystère pré-cosmique, le Prologue du drame de l'Etre. Anou, Bel et Noé ont précédé  Adam Kadmon, Adam le Rouge et Noé, exactement comme Brahmâ, Vishnou et Shiva ont précédé Vaivasvata et le reste 364.

Tout cela tend à prouver que le déluge semi-universel dont  la Géologie a connaissance – la première Période Glaciaire – doit s'être produit juste à l'époque que lui assigne la DOCTRINE SECRETE, à savoir 200.1 ans, en chiffres ronds, après le  commencement de notre Cinquième Race, ou vers le temps que Croll et Stockwell assignent à la première Période Glaciaire, c'est-à-dire il y a environ 850.000 ans. Aussi, comme ce cataclysme est attribué par les Géologues et les Astronomes à "une extrême excentricité de l'orbite de la terre" et que la DOCTRINE SECRETE lui attribue la même cause, avec cependant l'addition d'un autre facteur, le déplacement de l'axe de la Terre – dont on peut trouver la preuve dans le Livre d'Enoch 365, si le langage voilé des Pourânas n'est pas compris – tout cela serait de nature à prouver que les Anciens connaissaient quelque peu les "découvertes modernes" de la Science. Enoch, lorsqu'il parle de la "grande inclinaison de la Terre", qui "est en travail", est tout à fait clair et significatif.

361 Ant., V, 64.

362 Nonnus, Dionys., XVIII, 319. Cité par Faber, op. cit., I, 358.

363 ["Insulæ Phlegyæ" dans l'édition 1888.]

364 Voyez Isis Dévoilée, IV, 99 et seq., où l'on fait allusion à une ou deux des sept significations.

 

La chose n'est-elle pas évidente ? Nouah, c'est Noé flottant sur les eaux dans son arche, qui est elle-même l'emblème de l'Argha, ou Lune, le Principe féminin ; Noé, c'est "l'Esprit" tombant dans la Matière. Dès qu'il descend sur la Terre, nous le voyons planter une vigne, boire du vin et devenir ivre, ce qui veut dire que le pur Esprit est enivré dès qu'il est définitivement emprisonné dans la matière. Le septième chapitre de la Genèsen'est qu'une autre version du premier. Ainsi, tandis qu'on lit dans ce dernier : "Et les ténèbres couvraient la face de l'abîme et l'esprit de Dieu se mouvait sur la surface des eaux", le chapitre VII dit : "Et les eaux eurent le dessus... et l'arche flottait [avec Noé, l'Esprit] sur la surface des eaux". De sorte que Noé, s'il est identique au Nouah Chaldéen, est l'Esprit qui vivifie la Matière, qui n'est autre que le Chaos, représenté par l'Abîme ou les Eaux du Déluge. Dans la [III 182] légende Babylonienne (mélange de l'événement pré-cosmique et de l'événement terrestre), c'est Istar (Astéroth, ou Vénus, la Déesse Lunaire) qui est enfermée dans l'arche et envoie une colombe à la recherche de la terre ferme.

365 Chap. LXIV (sect. XI).

 

George Smith note, sur les "Tablettes", d'abord la création de la lune, puis celle du soleil : "Sa beauté et sa perfection sont exaltées, ainsi que la régularité de son orbite, ce qui le fit considérer comme le type d'un juge et comme  le  régulateur  du  monde". Si ce récit avait simplement trait à un cataclysme cosmogonique – même si celui-ci était universel – pourquoi la déesse Istar ou Astéroth, la lune, aurait-elle parlé de la création du soleil après le déluge ? Les eaux auraient pu s'élever jusqu'au sommet de la montagne de Nizir de la version Chaldéenne, ou du Djebel Djoudi, les montagnes du déluge de la légende Arabe, ou encore du mont Ararat du récit Biblique, et même de l'Himalaya de la tradition Hindoue, sans, pour cela, atteindre le Soleil ; la Bibleelle-même n'a pas osé aller jusqu'à un pareil miracle ! Il est évident que le déluge avait un autre sens pour les gens qui ont été les premiers à l'enregistrer, sens moins problématique et bien plus philosophique que celui d'un déluge universel dont il ne reste aucune  trace géologique. 366

Comme tous les Cataclysmes de ce genre sont périodiques  et cycliques et comme Vaivasvata Manou figure en qualité de personnage générique, au milieu de circonstances et d'événements divers, il semble qu'il n'y ait aucune objection sérieuse à supposer que le premier "grand déluge" avait un sens allégorique aussi bien que cosmique et qu'il s'est produit à la fin du Satya Youga, "l'Age de Vérité", lorsque la Seconde Race-Racine, "le Manou pourvu d'os" fit sa première apparition en qualité de "Né-de-la-Sueur".

Le Second Déluge – prétendu universel – qui atteignit la Seconde Race-Racine – que la Théologie considère maintenant tout à son aise comme "la race maudite des géants", les Caïnites et "les fils de Cham" – est le déluge qui fut reconnu le premier par la Géologie. Si l'on compare avec soin les récits des diverses légendes des livres de la Chaldée et des autres ouvrages exotériques des nations, on constate qu'ils s'accordent tous avec les narrations orthodoxes qui sont données dans les livres Brahmaniques. On peut remarquer aussi que tandis que dans le premier récit "il n'y a encore ni Dieu ni mortel sur Terre", lorsque Vaivasvata Manou aborde en Himavân [les Himâlayas], dans le second, les  Sept Richis sont autorisés à lui tenir compagnie ; ce qui prouve que tandis que certains récits se rapportent au Déluge Sidéral et Cosmique [III 183] qui précéda ce que l'on appelle la "Création", les autres traitent, l'un du Grand Déluge de Matière sur Terre et l'autre d'un réel déluge d'eau. Dans la Shatapatha Brâhmana, Manou constate que le Déluge a fait disparaître toutes les créatures vivantes et que lui seul a subsisté – c'est-à-dire que la semence de vie, seule, subsista à la suite de la Dissolution de l'Univers, ou Mahâpralaya, après un "Jour de Brahmâ" ; la Mahâbhârata, elle, ne traite que du cataclysme géologique qui balaya presque toute la Quatrième Race afin de faire place à la Cinquième. C'est pourquoi Vaivasvata Manou est présenté sous trois  attributs  différents  dans  notre  Cosmogonie Esotérique 367 :

  1. comme le "Manou-Racine" sur le Globe A, durant la Première Ronde ;
  2. comme la "Semence de Vie", sur le Globe D, durant la Quatrième Ronde et
  3. comme la "Semence de l'Homme", au commencement de chaque Race-Racine – spécialement durant notre Cinquième Race.

Le commencement même de cette dernière voit,  durant  le  Dvâpara Youga 368, la destruction des sorciers maudits : [III 184]

 367 Il faut se souvenir que, dans la Philosophie Hindoue, chaque unité différenciée ne l'est que durant les Cycles de Mâyâ, car dans son essence, elle ne fait qu'un avec l'Esprit Suprême ou Unique. De là naissent la confusion et la contradiction apparentes qui existent entre les diverses Pourânas, et parfois dans une même Pourâna, à propos du même individu. Vishnou – en qualité de Brahmâ aux formes multiples et en qualité de Brahma (neutre) – est un et pourtant on dit qu'il est les vingt-huit Vyâsas. "Durant chaque époque Dvâpara (ou troisième), Vishnou, dans la personne de Vyâsa... divisa la Véda, qui est (en réalité) une, en de nombreuses portions... Vingt-huit fois les Védas ont été arrangées par les grands Richis, dans le Manvantara Vaivasvata, durant l'époque Dvâpara ; et, en conséquence, vingt-huit Vyâsas ont passé." (Vishnou Pourâna, III, 3, traduction de Wilson, III, 33, 34.) "[Eux qui étaient tout] sous la forme de Véda-Vyasas ; qui étaient les Vyasas de leurs ères respectives." (Ibid., loc. cit., p. 33.) "Ce monde est Brahmâ, dans Brahmâ,  de Brahmâ... rien de plus à savoir." Enfin, encore dans la Harivamsha: "Il y avait (durant le premier Manvantara) sept fils célèbres de Vasishtha, qui (durant le troisième Manvantara) furent fils de Brahma (c'est-à-dire Richis), l'illustre postérité d'Ourja." (Ibid., III, 6 note). Cela est clair ; l'Humanité du Premier Manvantara est celle du septième et de tous les Manvantaras Intermédiaires. Le Genre Humain de la Première Race-Racine est le Genre Humain des Seconde, Troisième, Quatrième, Cinquième, etc. Jusqu'à la fin, cela constitue une réincarnation cyclique et constante des Monades appartenant aux Dyan Chohans de notre Chaîne Planétaire.

368 Le Dvâpara Youga est différent pour chaque Race. Toutes les Races ont leurs propres Cycles, ce qui fait une grande différence. Par exemple, la Quatrième Sous-Race des Atlantéens était dans son Kali Youga, lorsqu'elle fut détruite, tandis que la Cinquième était dans son Satya ou Krita Youga. La Race Aryenne est maintenant dans son Kali Youga et y restera encore pendant 427.000 ans, tandis que diverses "Races de Familles" appelées Sémitique, Hamitique, etc., sont dans leurs  cycles spéciaux. La Sixième Sous-Race qui va naître – ce qui peut avoir lieu très prochainement – sera dans son Age Satya (Age d'Or), tandis que nous recueillerons le fruit de nos iniquités dans notre Kali Youga.

369 Voyez Asiatic Researches, VIII, 280.

 

De cette île [Platon ne parle que de sa dernière  île], située au delà des Colonnes d'Hercule, dans l'Océan Atlantique, d'où l'on avait des communications faciles avec d'autres îles, dans le voisinage d'un autre grand continent [l'Amérique].

C'est cette Terre Atlantique qui était reliée à "l'Ile Blanche" et cette Ile Blanche était Routa, mais ce n'était pas Atala et le "Démon Blanc" du colonel Wilford 369, comme nous l'avons déjà montré. On peut faire remarquer ici que le Dvâpara Youga a une durée de 864.000 ans d'après les textes Sanscrits, et que si le Kali Youga n'a commencé qu'il y a 5.000 ans, il y a juste 869.000 ans que cette destruction s'est produite. De plus, ces chiffres ne diffèrent pas beaucoup de ceux que donnent les Géologues, qui font remonter à 850.000 ans leur Période Glaciaire.

La Shatapathanous dit ensuite qu'une femme fut produite, qui vint à Manou et déclara qu'elle était sa fille, avec laquelle il vécut et procréa le rejeton de Manou. Cela se rapporte à la transformation physiologique des sexes durant la Troisième Race-Racine, et l'allégorie est trop clairement transparente pour nécessiter beaucoup d'explications. Bien entendu, comme nous l'avons déjà fait remarquer, lors de la séparation des sexes, un être androgyne était supposé diviser son corps en deux moitiés – comme dans le cas de Brahmâ et Vâch et même d'Adam et d'Eve – de sorte que la femelle est, dans un certain sens, sa fille, exactement comme il sera pour elle, son fils : "la chair de sa chair [à lui et à elle] et les os de ses os [à lui et à elle]". Que l'on n'oublie pas aussi qu'aucun de nos Orientalistes n'a encore appris à comprendre que dans "ce tissu de contradictions et de stupéfiantes absurdités", comme certaines personnes appellent les Pourânas, une allusion à un Youga peut vouloir dire une Ronde, une Race- Racine et souvent une sous-race, ou constituer tout aussi bien une page arrachée à la Théogonie pré-cosmique. Cette signification double et triple est prouvée par diverses allusions qui sont faites, en apparence, à un seul et même individu, sous un nom identique, alors que les allusions se rapportent en réalité à des événements séparés par des Kalpas entiers. Un bon exemple est celui d'Ilâ. Elle est d'abord représentée d'une façon, puis ensuite d'une autre. Dans les légendes exotériques, il est dit que Vaivasvata Manou, désirant créer des fils, institua un sacrifice à Mitra et à Varouna, mais que, par suite d'une erreur du Brahmane qui officiait, ce fut seulement une fille qui fut obtenue – Ilâ ou Ida. Alors, "par une faveur des deux divinités", son sexe est changé et elle [III 185] devient un homme, Sou- dyoumna. Elle devient ensuite de nouveau une femme et ainsi de suite et la fable ajoute qu'il plut à Shiva et à son épouse "qu'elle fût un mâle durant un mois et une femelle durant un autre". Ceci se rapporte directement à la Troisième Race-Racine, dont les hommes étaient androgynes. Pourtant certains Orientalistes 370  pensent et ont déclaré que :

Idâ est primordialement les aliments, la  nourriture, ou une libation de lait ; ensuite un torrent de louanges, personnifié comme déesse du langage.

On ne donne pourtant pas aux "profanes" la raison pour laquelle "une libation de lait" ou un "torrent de louanges", serait tour à tour mâle et femelle ; à moins, toutefois, qu'il n'existe une "évidence interne" que les Occultistes n'arrivent pas à découvrir.

Dans son sens le plus mystique, l'union de Svâyambhouva Manou avec Vâch-Shata-Roûpa, sa propre fille – ce qui constitue la première "euhémérisation" du principe double dont Vaivasvata Manou et Ilâ sont les formes secondaire et tertiaire – représente, dans le symbolisme cosmique, la Vie-Racine, le Germe d'où jaillissent tous les Systèmes Solaires, les Mondes, les Anges et les Dieux. En effet, comme le dit Vishnou :

De Manou, toute la création, les dieux, les Asouras, l'homme, doivent être produits ;

Par lui, le monde doit être créé : ce qui est doué de mouvement et ce qui ne l'est pas.

Nous pouvons cependant rencontrer des adversaires pires que les Savants Occidentaux et les Orientalistes. Si les Brahmanes peuvent être d'accord avec ce que nous enseignons, en ce qui concerne les chiffres, nous ne sommes pas aussi sûrs que les conservateurs orthodoxes ne soulèveraient pas des objections contre les modes de procréation attribués à leur Pitri Dévatâs. Nous serons mis en demeure de produire les ouvrages où nous avons puisé nos citations et nous les inviterons à lire leurs propres Pourânas avec un peu plus de soin, et en ouvrant les yeux pour en reconnaître le sens ésotérique. Ils constateront alors, nous le répétons encore, que sous le voile d'allégories plus ou moins transparentes, tout ce que nous avons dit ici sera corroboré par leurs propres ouvrages. [III 186]

370 Voyez Hindu Classical Dictionnary, de Dowson, sub voce "Idâ".

 

Un ou deux cas ont déjà été cités par rapport à l'apparition de la Seconde Race, qui est appelée les "Nés-de-la-Sueur". Cette allégorie est considérée comme un conte de fées, et pourtant elle cache un phénomène psycho-physiologique, et l'un des plus grands mystères de la Nature.

Pourtant, en raison des exposées chronologiques faits ici même, il est naturel de demander :

 

LES HOMMES POUVAIENT-ILS EXISTER, IL Y A DIX- HUIT MILLIONS D'ANNEES ?

 

La réponse de l'Occultime est affirmative, en dépit de toutes les objections des savants. De plus, cette durée ne comprend que l'Homme de Vaivasvata-Manou, c'est-à-dire l'entité mâle et femelle déjà séparée en deux sexes distincts. Les deux Races et demie qui précédèrent cet événement peuvent avoir vécu il y a 300 millions d'années, malgré tout ce que peut dire la Science. En effet, les difficultés géologiques et physiques que soulève cette théorie, ne pouvaient exister pour l'Homme primordial éthéré des Enseignements Occultes.

Toute la solution de la querelle entre la Science Profane et la Science Esotérique dépend de la croyance à l'existence d'un Corps Astral dans le Corps Physique et de la démonstration de ce fait. Paul d'Assier, le Positiviste, semble avoir prouvé le fait assez clairement 371, sans parler des témoignages accumulés des siècles et de ceux fournis par les "Spirites" et les Mystiques modernes. On verra qu'il est difficile de rejeter ce fait, à notre époque de preuves, de témoignages et de démonstrations oculaires.

371 Voyez Humanité Posthume.

 

La DOCTRINE SECRETE maintient que malgré les cataclysmes généraux et les troubles de la Quatrième Ronde de notre Globe qui – précisément parce que cette Ronde est la période de son maximum de développement physique, car la Quatrième Ronde est le point tournant du Cycle de Vie qui lui est attribué – furent beaucoup plus terribles et intenses que durant toutes les trois Rondes précédentes – qui sont les Cycles de sa vie primitive, psychique et spirituelle et de son état semi-éthéré – l'Humanité Physique a existé sur ce Globe durant les derniers 18 millions d'années 372. Cette période fut précédée de 300.000.000 d'années de développement minéral et végétal. [III 187]

Tous ceux qui refusent d'accepter la théorie de l'existence de l'homme "sans os" et purement éthéré s'élèveront contre cette affirmation. La Science, qui ne connaît que les organismes physiques, sera indignée ; et la Théologie matérialiste le sera plus encore. La première présentera des objections logiques et raisonnables, basées sur l'idée préconçue que tous les organismes animés ont toujours existé, à toutes les époques, sur le même plan de la matérialité ; la seconde basera ses objections sur un tissu de fictions des plus absurdes. La ridicule prétention mise généralement en avant par les Théologiens est basée sur la supposition virtuelle que l'humanité (lisez, les Chrétiens) qui peuple cette planète a l'honneur d'être constituée des seuls êtres humains de tout le Cosmos qui habitent un Globe et qu'ils sont, en conséquence, ce qu'il y a de mieux dans leur genre 373.

 372 Le professeur Newcomb dit que la chaleur produite par la contraction depuis une distance infinie n'aurait duré que 18.000.000 d'années. (Popular Astronomy, 509.) Tandis qu'une température permettant l'existence de l'eau ne pouvait avoir été atteinte qu'il y a 10.000.000 d'années. (Winchell, World-Life, 356). Mais sir William Thomson dit que la durée de toute la période d'incrustation de la Terre est de 80.000.000 d'années, bien que, cette année, il ait encore changé d'opinion et n'ait accordé que 15.000.000 d'années pour l'âge du Soleil. Comme nous le montrerons dans l'Appendice, la divergence des opinions scientifiques est telle que l'on ne peut se fier à aucune spéculation scientifique.

373 L'essai sur The Plurality of Worlds (1853) – ouvrage anonyme, mais que l'on sait très bien être l'œuvre du docteur Whewell – en est une excellente preuve. Aucun Chrétien, dit l'auteur, ne devrait croire, ni à la pluralité des Mondes, ni à l'Age géologique du Globe, parce que s'il est prouvé que ce Monde ne constitue qu'une unité au milieu de beaucoup d'autres du même genre, qui seraient tous l'œuvre de Dieu, comme il est lui-même, que tous ces mondes sont des sièges de la vie, des royaumes où habitent des créatures intelligentes, douées de volonté, soumises à la loi et capables de libre-arbitre, il serait alors extravagant de penser que notre Monde eût été l'objet des faveurs de Dieu, de Son intervention spéciale, de Ses communications et de Sa visite personnelle. La Terre, demande-t-il, peut-elle prétendre à être le centre de l'Univers moral et religieux si elle ne peut s'appuyer sur rien qui la distingue des autres dans l'Univers physique ? N'est-il pas aussi absurde de soutenir une pareille assertion (la pluralité des mondes habités), qu'il le serait de  soutenir aujourd'hui l'antique hypothèse de Ptolémée qui plaçait la Terre au centre de notre système ? Ce qui précède est cité de mémoire et néanmoins presque textuellement. L'auteur de l'ouvrage cité ne s'aperçoit pas qu'en se défendant de la sorte, il crève sa propre bulle de savon.

 

Les Occultistes, qui croient fermement aux enseignements de la Philosophie-Mère, repoussent les objections des Théologiens, aussi bien que celles des Savants. Ils soutiennent, de leur côté, que même durant les périodes où la chaleur a dû être insupportable, même aux deux pôles, avec des déluges successifs, des soulèvements des vallées et de constants changements des grandes eaux et des mers, aucune de ces circonstances ne pouvait constituer un obstacle à la vie et à l'organisation humaines, telles que celles qu'ils assignent à [III 188] l'humanité primitive. Ni l'état hétérogène des régions ambiantes, pleines de gaz délétères, ni le danger que présentait une croûte à peine consolidée, ne pouvaient empêcher les Première et Seconde Races de faire leur apparition dès le Carbonifère et même à l'Epoque Silurienne.

Ainsi, les Monades destinées à animer les futures Races étaient prêtes pour la nouvelle transformation. Elles avaient passé par leurs phases de métallisation, de vie végétale et animale, depuis la plus basse jusqu'à la plus haute, et attendaient leurs formes humaines, plus intelligentes. Néanmoins, que pouvaient faire les Modeleurs Plastiques, si ce n'est de suivre les lois de la Nature en évolution ? Pouvaient-ils, comme le prétend le texte biblique pris à la lettre, construire à l'image du "Seigneur", ou, comme Pygmalion dans l'allégorie Grecque, construire Adam-Galatée avec de la poussière volcanique, et insuffler  une  "Ame-Vivante"  dans l'Homme ? Non ; parce que l'Ame était déjà là, latente dans sa Monade, et n'avait besoin que d'un vêtement. Pygmalion qui n'arrive pas à animer sa statue, et Bahak Zivo 374, des Gnostiques Nazaréens, qui n'arrive pas à former "une âme humaine dans la créature", sont, en tant que conceptions, bien plus philosophiques et scientifiques qu'Adam, pris au sens de la lettre morte, ou que les Elohim-Créateurs bibliques. La Philosophie Esotérique qui enseigne la génération spontanée – après que les Shista et les Prajâpatis ont jeté les semences de vie sur la Terre – nous représente les Anges Inférieurs comme capables de construire seulement l'homme physique, même avec l'aide de la Nature, après avoir évolué les Formes Ethérées hors d'eux-mêmes, et laissant la forme physique évoluer graduellement de son modèle éthéré, que l'on appellerait maintenant son modèle protoplasmique.

374 Voyez Sôd : The Son of the Man, par S.F. Dunlop, pp. 50 et seq.

 

On soulèvera encore des objections contre cela ; on nous dira que la "génération spontanée" est une théorie décriée. Les expériences de Pasteur l'ont fait disparaître il y a déjà vingt ans, et le professeur Tyndall y est opposé. Très bien ; supposons qu'il le soit ! Il devrait pourtant savoir que même si l'on venait à prouver que la génération spontanée est impossible durant la période que nous traversons et au milieu des conditions  actuelles – ce que nient les Occultistes – cela ne démontrerait nullement qu'elle n'a pas pu se produire au milieu de conditions cosmiques différentes, non seulement dans les mers de la Période Laurentienne, mais encore sur la Terre convulsée d'alors. Il serait intéressant de savoir comment la Science explique l'apparition des espèces et de la vie sur la Terre, surtout celle de l'Homme, puisqu'elle repousse, [III 189] à la fois, les enseignements bibliques et la génération spontanée. Les observations de Pasteur sont, du reste, loin d'être parfaites ou appuyées sur des preuves. Blanchard et le docteur Lutaud nient leur importance et, en fait, établissent qu'elles n'en ont aucune. La question reste, jusqu'à présent, sub judice, tout comme celle qui a trait au moment, à l'époque, de l'apparition de la vie sur la Terre. Quant à l'idée que la Monère de Hæckel – une pincée de sel ! – a résolu le problème de l'origine de la vie, elle est simplement absurde. Les Matérialistes qui ont une tendance à faire fi de la théorie de "l'Homme Soi existant", de "l'Homme Céleste Autogénéré", représenté comme un Homme Astral Ethéré, doivent pardonner, même à un apprenti de l'Occultisme, de rire à son tour de quelques-unes des spéculations de la pensée moderne. Après avoir très savamment prouvé que le fragment primitif de Protoplasme (la Monère), n'est ni un animal, ni une plante, mais l'un et l'autre, et qu'il n'a aucun ancêtre parmi eux, puisque c'est cette Monère qui sert de point de départ à toute existence organisée, on finit par nous dire que les Monères sont leurs propres ancêtres. C'est peut-être très scientifique, mais c'est aussi très métaphysique : ce l'est même trop, même pour l'Occultiste.

Si la génération spontanée a modifié aujourd'hui ses méthodes – peut- être en raison de l'accumulation des matériaux dont elle dispose – au point d'échapper presque aux recherches, elle n'en était pas moins en pleine activité durant la genèse de la vie terrestre. La simple forme physique elle- même, ainsi que l'évolution des espèces, prouvent comment procède la Nature. Le gigantesque Saurien couvert d'écailles, le Ptérodactyle ailé, le Mégalosaure et l'Iguanodon long de cent pieds, d'une période postérieure, sont des transformations des premiers représentants du règne animal, trouvés dans les sédiments de l'époque primaire. Il fut un temps où tous les monstres "antédiluviens" que nous venons d'énumérer apparaissaient  sous forme d'infusoires filamenteuses, sans carapace ni coquille,  sans nerfs, sans muscles, sans organes ni sexe, et où elles reproduisaient leurs espèces par gemmation, comme le font aussi les animaux microscopiques, architectes et constructeurs de nos chaînes de montagnes, conformément aux enseignements de la Science. Pourquoi pas l'homme, dans ce cas ? Pourquoi, dans sa croissance, ne se serait-il pas conformé à la même loi, c'est-à-dire à la condensation graduelle ? Toutes les personnes, dépourvues de préjugés préféreront croire que l'Humanité Primordiale avait d'abord une forme éthérée – ou, si l'on préfère, une énorme Forme filamenteuse, ressemblant à de la gelée, évoluée par les Dieux ou les "Forces" naturelles, qui se condensa au cours de millions [III 190] d'âges et  devint gigantesque, dans son impulsion et sa tendance physiques, jusqu'au moment où elle acquit de la stabilité dans l'énorme forme physique de l'Homme de la Quatrième Race – plutôt que de croire qu'il a été créé du limon de la Terre (littéralement), ou qu'il descend d'un ancêtre anthropoïde inconnu.

Notre Théorie Esotérique n'est du reste pas en désaccord avec les données scientifiques, sauf à première vue, puisque le Dr A. Wilson, F.R.S., dit dans une lettre à Knowledge 375 :

L'évolution – on plutôt la nature, à la lumière de l'évolution – n'a été étudiée que depuis vingt-cinq ans, à peu près. Cela ne représente, naturellement  dans l'histoire de la pensée humaine qu'une fraction de temps peu importante.

Et, précisément à cause de cela, nous ne perdons pas tout espoir de voir la Science matérialiste amender sa manière de voir et accepter graduellement les Enseignements Esotériques – même s'ils sont, au début, séparés de leurs éléments trop métaphysiques (pour la Science).

Le dernier mot a-t-il été dit au sujet de l'évolution humaine ? Ainsi que le fait remarquer le professeur Huxley :

Chacune des réponses faites à cette grande question [la place réelle de l'homme dans la nature], est invariablement   représentée par les disciples de son auteur, sinon par l'auteur lui-même, comme étant complète et finale, et peut conserver une haute autorité et la faveur du public pendant un siècle, comme pendant vingt, mais, avec une régularité tout aussi invariable, le Temps finit par prouver que chacune de ces réponses ne représente qu'une simple approximation de la vérité – tolérable, surtout, en raison de l'ignorance de ceux par qui elle avait été acceptée et qui devient inacceptable lorsqu'elle est éprouvée par le savoir plus ample de leurs successeurs. 376

375 23 décembre 1881.

376 Man's Place in Nature, p. 58.

 

Cet éminent Darwiniste admettra-t-il que ses "Ancêtres Pithécoïdes" puissent être mis sur la liste des croyances absolument "inacceptables" pour le "savoir plus ample" des Occultistes ? Mais d'où vient le sauvage ? Le simple fait de "s'élever jusqu'à l'état civilisé", n'explique pas l'évolution de la forme.

Dans la même lettre, "l'Evolution de l'Homme", le [III 191]  Dr Wilson fait d'autres confessions étranges. Ainsi, il fait les remarques suivantes, en réponse aux questions posées par "G.M." à Knowledge :

"L'évolution a-t-elle produit quelques changements dans l'homme ? Si oui, quels sont ces changements ? Si non, pourquoi non ?"... Si nous refusons d'admettre [comme le fait la science] que l'homme fut créé à l'état parfait  puis se dégrada ensuite, il ne reste plus qu'une autre supposition – celle de l'évolution. Si l'homme s'est élevé de l'état sauvage à l'état civilisé, c'est assurément là une évolution. Nous ne savons pas encore, parce que c'est là un savoir difficile à acquérir, si la charpente humaine est soumise aux mêmes influences que celle des animaux inférieurs. Mais il n'y a pas de doute que le passage de la sauvagerie à la vie civilisée implique une "évolution", même très étendue. Au point de vue mental, l'évolution de l'homme ne peut être mise en doute ; la sphère des pensées humaines qui va toujours s'élargissant a eu de minces et rudes débuts, comme le langage lui-même. Mais la manière de vivre de l'homme, sa faculté de s'adapter aux milieux dans lesquels il se trouve  et d'autres circonstances innombrables ont rendu très difficile de remonter le cours de son "évolution" en en suivant les traces.

Cette difficulté même devrait rendre les Evolutionnistes plus prudents dans leurs affirmations. Mais pourquoi l'évolution serait-elle impossible si "l'homme fut créé à l'état d'être parfait, puis se dégrada ensuite" ? Cela pourrait s'appliquer, tout au plus, à l'homme physique extérieur. Comme nous le faisons remarquer dans Isis Dévoilée, l'évolution de Darwin commence au beau milieu, au lieu de commencer, pour l'homme comme pour tout le reste, en partant des universaux. La méthode Aristotélo- Baconienne peut avoir ses avantages, mais elle a, incontestablement, déjà laissé voir ses défauts. Pythagore et Platon, qui procédaient ou descendaient de l'universel, nous apparaissent, à la lueur de la Science moderne, comme plus savants que ne l'était Aristote, car ce dernier combattait l'idée de la révolution de la Terre et même celle de sa rotondité lorsqu'il écrivait :

Presque tous ceux qui affirment avoir étudié le ciel dans son uniformité, déclarent que la terre en occupe le centre, mais les philosophes de l'Ecole Italique, autrement dit les Pythagoriciens, enseignent précisément le contraire.

C'est parce que les Pythagoriciens étaient des Initiés et qu'ils suivaient la méthode déductive, tandis qu'Aristote, le [III 192] père du système inductif, se plaignait de ceux qui enseignaient que :

Le centre de notre système était occupé par le Soleil et que la Terre n'était qu'une étoile, ce qui, par suite d'un mouvement de rotation autour dudit centre, produisait le jour et la nuit. 377

De même en ce qui concerne l'homme. La théorie qu'enseigne la DOCTRINE SECRETE, et que nous exposons maintenant, est la seule qui –   sans tomber dans l'absurdité d'un homme "miraculeux", créé du limon de la terre, ou dans celle, plus grande encore, de l'homme évoluant du sein d'une pincée de sel de chaux, l'ex-protoplasmique Monère – puisse expliquer son apparition sur la Terre.

377 De Cælo, II, 13.

 

L'Analogie est, dans la Nature, la loi dirigeante, le seul véritable fil d'Ariane qui puisse nous guider à travers les inextricables sentiers de son domaine, jusqu'à ses mystères primordiaux et finaux. La Nature, en tant que puissance créatrice, est infinie, et aucune génération de physiciens ne peut se vanter d'avoir épuisé la liste de ses voies et moyens, quelques uniformes que soient les lois suivant lesquelles elle procède. Si nous pouvons concevoir une boule de "brouillard ardent", qui devient peu à  peu –   à mesure qu'elle roule dans les espaces interstellaires durant des æons de temps – une Planète, un Globe auto-lumineux, pour finir par être un Monde ou une Terre peuplée d'hommes, ayant ainsi passé de l'état de corps plastique mou à celui de Globe entouré de rocs, et si nous voyons tout évoluer sur cette Terre, depuis le fragment de gelée sans noyau qui devient le Sarcode 378 de la Monère, puis passe de son état protistique 379 à la forme animale, pour grandir ensuite et devenir un gigantesque monstre reptilien de l'époque Mésozoïque, et diminuer ensuite peu à peu jusqu'aux dimensions du (relativement) petit crocodile, confiné aujourd'hui exclusivement dans les régions tropicales, et du lézard 380 universellement répandu – si nous pouvons concevoir tout cela, comment donc l'homme, seul, pourrait-il [III 193] échapper à la loi générale ? "Il y avait alors des géants sur la terre, dit la Genèse", répétant ce que disent toutes les autres Ecritures Orientales, car les Titans sont fondés sur un fait anthropologique et physiologique.

Et, de même que le crustacé à coquille dure fut jadis un fragment de gelée, une "simple particule, absolument homogène, d'albumine dans un état  fortement  agglutiné",  telle était l'enveloppe extérieure de l'homme primitif, son premier "vêtement de peau", plus une Monade spirituelle immortelle et, dans cette enveloppe, une forme et un corps temporaires psychiques. L'homme moderne, rude et musculeux presque impénétrable sous tous les climats, était peut-être, il y a quelque 25.000.000 d'années, juste ce qu'est la Monère de Hæckel, c'est-à-dire strictement "un organisme sans organes", une substance entièrement homogène avec un corps d'albumine sans structure ayant, seulement à l'extérieur, une forme humaine.

 

378 Ou ce que l'on connaît plus généralement sous le nom de Protoplasme. Le nom de "Sarcode" fut donné à cette substance par le professeur Dujardin-Beaumetz bien avant qu'elle ne reçut son nom actuel.

379 Les Monères sont vraiment des Protistes. Ce ne sont ni des  animaux ni  des  plantes,  écrit Hæckel ; "le corps tout entier de la Monère ne représente rien de plus qu'une simple particule, absolument homogène, d'albumine dans un état fortement agglutiné". (Journal of Microscopical Science, janv. 1869, p. 28.)

380 Voyez l'Iguanodon de l'époque Mésozoïque – le monstre long de 100 pieds – devenu aujourd'hui le petit lézard Iguane de l'Amérique du Sud. On prouvera peut-être un jour que les traditions populaires qui parlent des "géants" de jadis et leur mention dans toutes les mythologies, y compris celle de la Bible, sont fondées sur des faits. Dans la nature, la logique de 1'analogie, seule, devrait nous faire accepter ces traditions comme des vérités scientifiques.

 

Aucun Savant de ce siècle n'a le droit de trouver absurdes les chiffres des Brahmanes, en ce qui concerne la chronologie, car leurs  propres calculs dépassent souvent de beaucoup les postulats de la Science Esotérique. C'est facile à montrer.

Helmholtz a calculé que le refroidissement de notre Terre, d'une température de 2.000° à 200° centigrades, doit avoir occupé une période d'au moins 350.000.000 d'années. La Science Occidentale (y compris la Géologie) semble assigner à notre Globe un âge d'environ 500.000.000 d'années, en tout. Néanmoins, Sir William Thomson ne fait remonter qu'à 100.000.000 d'années l'apparition de la première race végétale – affirmation qui est respectueusement contredite par les Archives Archaïques. De plus, les spéculations varient journellement dans les domaines de la Science. En attendant, certains Géologues sont très opposés à de pareilles limitations. Volger calcule :

Que le temps nécessaire au dépôt des couches que nous connaissons, doit s'élever au moins à 648 millions d'années.

Le temps et l'espace sont, tous deux, infinis et éternels.

La terre, en tant qu'existence matérielle, est vraiment infinie ; seuls, les changements par lesquels elle a passé peuvent être déterminés par des périodes finies de temps... [III 194]

Nous devons donc supposer que le ciel étoilé n'est pas seulement dans l'espace, ce dont aucun astronome ne doute, mais qu'il est aussi dans le temps, sans commencement ni fin : qu'il ne fut jamais créé et qu'il est impérissable 381.

Czolbe répète exactement ce que disent les Occultistes. Mais, nous dira-t-on peut-être, les Occultistes Aryens ne connaissaient rien de ces spéculations plus récentes. Suivant l'expression de Coleman :

Ils ignoraient même la forme globulaire de notre terre.

La Vishnou Pourânacontient une réponse à cette objection, qui a forcé certains Occultistes à ouvrir largement les yeux.

Le Soleil est immobile en tout temps, Maîtreya,  au milieu du jour comme au milieu de la nuit, dans tous les Dvipas (Continents). Mais le lever et le coucher du soleil étant perpétuellement opposés l'un à l'autre – de même que tous les points cardinaux et les points intermédiaires, alors, Maîtreya, les gens parlent du lever du Soleil là où ils le voient, et lorsque le Soleil disparaît, c'est là, pour eux, son coucher. Pour le Soleil, qui se trouve toujours à la même place, il n'y a ni coucher, ni lever : en effet, ce que l'on appelle le lever et le coucher, n'est que le fait de voir ou de ne pas voir le Soleil. 382

A ce propos, Fitzedward Hall fait remarquer :

La théorie héliocentrique enseignée dans ce passage est remarquable. Néanmoins elle est contredite un peu plus loin. 383

Contredite à dessein, parce que c'était là un secret enseigné dans le temple. Martin Haug a signalé le même enseignement dans un autre passage. Il est inutile de calomnier plus longtemps les Aryens.

Revenons à la chronologie des Géologues et des Anthropologues. Nous craignons que la Science ne  puisse se placer sur aucun terrain raisonnable pour combattre les opinions des Occultistes sur ce point. Sauf "qu'en ce qui concerne l'homme, l'être organique le plus élevé de la création, on n'en trouve aucune trace dans les couches primaires, mais seulement dans les couches supérieures, celles que l'on appelle les couches [III 195] sédimentaires" ; jusqu'à présent, c'est tout ce  qu'elle peut objecter. La science sera obligée de reconnaître un jour que l'homme ne fut pas le dernier membre de la famille des mammifères, mais le premier durant cette Ronde. Pareille manière de voir a déjà été discutée en France d'après une très haute autorité.

Le fait que l'on puisse démontrer que l'homme a vécu durant  la Période Tertiaire Moyenne, et à une époque géologique où n'existait pas encore un seul spécimen des genres de mammifères qui sont connus de nos jours, ne peut plus être nié par la science et a été maintenant prouvé par de Quatrefages 384. En supposant même que son existence durant la Période Eocène ne soit pas encore démontrée, quelle période de temps s'est écoulée depuis le Crétacé ? Nous savons que les plus audacieux osent seuls faire remonter l'homme au-delà du Miocène. Mais, demandons-nous, quelle est donc la durée de ces âges et de ces périodes, depuis le Mésozoïque ? Sur ce point, la Science, après bien des spéculations et bien des disputes, reste silencieuse, car les plus grandes autorités en la matière sont obligées de répondre à cette question : "Nous ne savons pas." Cela devrait suffire à prouver que les Savants ne font pas plus autorité en la matière que les profanes. Si, selon le professeur Huxley, "le temps représenté par la formation du Charbon s'élève, à lui seul, à six millions d'années" 385, combien d'autres millions faudrait-il pour représenter le temps qui s'est écoulé depuis le Jurassique ou le milieu de ce que l'on appelle l'Age Reptilien – temps de l'apparition de la Troisième Race – jusqu'au Miocène, quand la masse de la Quatrième Race fut submergée 386 ?

L'auteur sait que ceux des spécialistes, qui calculent avec le plus de libéralité les âges du Globe et de l'Homme ont toujours eu contre eux la majorité plus timide. Mais cela ne prouve pas grand-chose, puisqu'au bout du compte il est rare, sinon sans exemple, que la majorité ait raison à la longue. Harvey  fut seul  de son avis durant de longues années. Ceux qui plaidèrent la cause de la traversée de l'Atlantique, en bateaux à vapeur, coururent le risque de finir leurs jours dans des asiles d'aliénés. Jusqu'à présent, Mesmer est classé – dans les Encyclopédies – parmi les charlatans et les imposteurs, en compagnie de Cagliostro et de Saint-Germain. Et [III 196] maintenant que MM. Charcot et Richet ont justifié les théories de Mesmer, et que le Mesmérisme, sous son nouveau nom "d'Hypnotisme" – faux nez sur une très vieille figure – est accepté par la Science, notre respect pour la majorité n'est nullement accru, lorsque nous constatons le sans-gêne et l'insouciance avec lesquels ses membres traitent de "l'hypnotisme", des "perceptions télépathiques" et d'autres phénomènes. Ils en parlent, en un mot, comme s'ils y avaient cru depuis l'époque de Salomon, alors qu'il y a quelques années seulement, ils traitaient ses adeptes de lunatiques et d'imposteurs 387 !

384 Introduction à l'Etude des Races Humaines.

385 Modern Science and Modern Thought, par S. Laing, p. 32.

386 Le Bouddhisme Esotérique.

387 Le même sort est réservé aux phénomènes spirites et à toutes les autres manifestations psychologiques de l'homme interne. Depuis l'époque de Hume, dont les recherches ont abouti à un Idéalisme nihiliste, la Psychologie s'est graduellement transformée en un Matérialisme grossier. Hume est considéré comme un Psychologue et pourtant il niait a priori la possibilité de phénomènes auxquels croient aujourd'hui des millions de gens, y compris beaucoup de Savants. Les Hylo-Idéalistes de nos jours, sont d'insignes Annihilationnistes. Les écoles de Spencer et de Bain sont, l'une positiviste et l'autre matérialiste, mais ne sont pas le moins du monde métaphysiques. C'est du Psychisme et non pas de la Psychologie ; cela rappelle l'enseignement Védantin aussi peu que le pessimisme de Schopenhauer et de von Hartmann rappellent la Philosophie Esotérique, le cœur et l'âme du véritable Bouddhisme.

 

La même transformation de la pensée se manifestera en ce qui concerne les longues périodes que réclame la Philosophie Esotérique pour l'âge de l'humanité sexuelle et physiologique.

C'est pourquoi la Stance qui dit :

"Les Nés-du-Mental, les Sans-Os, donnèrent la vie aux Nés-de-la-Volonté pourvus d'os" – en ajoutant que cela eut lieu au milieu de la Troisième Race, il y a 18.000.000 d'années – a encore des chances d'être acceptée par des Savants futurs.

En ce qui concerne la pensée du dix-neuvième siècle, nous dira-t-on, nous disent même quelques amis personnels, imbus d'un respect anormal pour les conclusions changeantes de la Science, pareille déclaration est absurde. A quel point notre autre assertion ne paraîtra-t-elle pas plus improbable encore, lorsque nous dirons que l'antiquité de la Première Race remonte encore à des millions d'années plus tôt. En effet, bien que les chiffres exacts ne soient pas divulgués – et ne saurait être question de rapprocher les débuts de l'évolution des Races Divines primordiales, avec certitude, soit au commencement de la période géologique Secondaire, soit à la période géologique Primaire – une chose ressort clairement, c'est que le chiffre de 18.000.000 d'années, qui comprend la durée de l'homme sexuel et physique, doit être énormément [III 197] accru, si l'on veut tenir compte de tout le processus du développement spirituel, astral et physique. Beaucoup de Géologues pensent, en effet, que la durée des époques Quaternaire et Tertiaire exige une pareille estimation et il est tout à fait certain que, si les preuves de l'existence réelle d'un homme Eocène font encore défaut, aucune condition terrestre ne réduit à néant l'hypothèse de son existence. Les Occultistes, qui maintiennent que la date ci-dessus nous reporte bien en arrière, au cours de l'époque Secondaire ou "Reptilienne", peuvent se reporter à M. de Quatrefages pour soutenir la possibilité de l'existence de l'Homme à cette époque de l'antiquité. En ce qui concerne les premières Races-Racines, le cas est tout différent. Si l'épaisse agglomération de vapeurs chargées d'acide carbonique qui  s'échappaient du sol ou étaient tenues en suspension dans l'atmosphère depuis le commencement de la sédimentation, présentait un obstacle fatal à la vie d'organismes humains, tels que nous les connaissons aujourd'hui, comment, nous dira-t-on, l'homme primordial aurait-il pu exister ? Cette considération est, en réalité, hors de cause. Les conditions terrestres qui se trouvaient alors en activité n'avaient aucun contact avec le plan sur lequel se faisait l'évolution des Races astrales éthérées. Ce n'est que durant des périodes géologiques relativement récentes que le cours en spirale de la loi cyclique a entraîné l'humanité dans la phase la plus basse de l'évolution physique – le plan de la causation matérielle grossière. Durant ces époques reculées, l'évolution astrale seule était en progrès et les deux plans, l'astral et le physique 388 bien que se développant parallèlement, n'avaient  entre eux aucun point direct de contact. Il est évident qu'un homme éthéré, ressemblant à une ombre, n'est rattaché, en vertu même de  son organisation – si l'on peut l'appeler ainsi – qu'au plan d'où dérive la substance dont est formé son Oupâdhi.

 388 Il faut noter que, bien que les plans astral et physique de la Matière aient suivi des lignes parallèles, durant même les époques géologiques les plus reculées, ils ne traversaient pourtant pas les mêmes phases de manifestation que celles par lesquelles ils passent maintenant. La Terre n'atteignit son degré de densité actuel qu'il y a 18.000.000 d'années. Depuis, les plans astral et physique sont devenus tous deux plus grossiers.

 

Il peut y avoir des choses qui aient échappé à la vue perçante – mais qui ne voit pas tout – de nos Naturalistes Modernes – néanmoins, c'est la Nature elle-même qui se charge de fournir les chaînons manquants. Les penseurs agnostiques ont à choisir, dans leurs spéculations, entre la version que donne la DOCTRINE SECRETEde l'Orient de l'origine de l'homme et celle, si désespérément matérialiste, de Darwin et les récits de la Bible; entre l'absence d'âme et d'évolution [III 198] spirituelle et la doctrine Occulte qui repousse également la "création spéciale" et l'Anthropogenèse "Evolutionniste".

Revenons-en encore à la question de la "génération spontanée" ; la vie – comme le démontre la Science – n'a pas toujours régné sur ce plan terrestre. Il fut un temps où, même la Monère de Hæckel – ce simple globule de Protoplasme – n'avait pas encore fait son apparition au fond des mers. D'où vint donc l'Impulsion qui fit que les molécules de Carbone, d'Azote, d'Oxygène, etc., se groupèrent pour former le Urschleim de Oken, ce "Limon" organique, aujourd'hui baptisé Protoplasme ? Quels furent les prototypes des Monères ? Eux, au moins, n'ont pas pu tomber, comme des météorites, d'autres Globes déjà formés, malgré la théorie  audacieuse émise à cet effet par Sir William Thomson. Et même s'ils étaient ainsi tombés, même si la Terre a reçu d'autres Planètes son contingent  de germes vitaux, par qui ou par quoi ces germes avaient-ils été transportés sur ces Planètes ? Cette fois encore, à moins d'accepter l'Enseignement Occulte, nous nous trouvons forcément en présence d'un miracle – nous nous trouvons obligés d'accepter la théorie d'un Créateur personnel, anthropomorphe, dont les attributs et la description, tels que les formulent les Monothéistes, choquent tout autant la philosophie et la logique qu'ils dégradent l'idéal d'une Divinité Universelle infinie, dont l'incompréhensible et redoutable grandeur fait paraître bien petit l'intellect humain le plus développé. Le Philosophe moderne, tout en se plaçant arbitrairement au pinacle de l'intellectualité humaine qui ait été développée jusqu'à présent, devrait éviter de se montrer, au point de vue de la spiritualité et de l'intuition, si fort au-dessous des conceptions des anciens Grecs, eux-mêmes si inférieurs, sous ce rapport, aux philosophes de l'antiquité Aryenne Orientale. L'hylozoïsme, compris philosophiquement, est l'aspect le plus élevé du Panthéisme. Il constitue le seul moyen d'échapper à l'Athéisme idiot, basé sur une matérialité mortelle, et aux conceptions anthropomorphiques encore plus idiotes des Monothéistes, entre lesquels il prend place sur un terrain absolument neutre.

 L'hylozoïsme exige une Pensée Divine absolue, imprégnant les innombrables Forces créatrices actives, ou "Créateurs", Entités qui sont mues par cette Pensée Divine et qui vivent en elle, par elle et à travers elle, bien que cette Pensée Divine n'ait pas plus à s'occuper personnellement d'elles et de leurs créations que le Soleil n'a à s'occuper de la fleur qui porte son nom et de sa semence, ou de la végétation, en général. On sait qu'il existe de tels "Créateurs" actifs et l'on croit en eux, parce qu'ils sont perçus et sentis, chez l'Occultiste, par l'Homme Interne. L'Occultiste dit qu'une Divinité Absolue [III 199] devant être non-conditionnée et sans relations, on ne peut se la représenter en même temps comme un Dieu vivant unique, actif et créateur, sans en dégrader immédiatement l'idéal 389. Une divinité qui se manifeste dans l'Espace et le Temps – qui ne sont tous deux que les formes de CELA qui est le TOUT Absolu – ne peut constituer qu'une fraction du tout. Et puisque ce "Tout" ne peut être divisé dans son caractère absolu, il en résulte que ce Créateur (nous disons les Créateurs) dont on a conscience, n'en peut être, tout au plus, qu'un aspect. Pour employer la même métaphore – insuffisante pour exprimer l'idée complète, mais bien adaptée au cas actuel – ces Créateurs sont comme les nombreux rayons de l'orbe solaire, qui reste lui-même inconscient de l'œuvre accomplie et ne s'en occupe pas, tandis que les agents intermédiaires, les rayons, remplissent le rôle d'instruments, à chaque printemps – l'aurore Manvantarique de la Terre – en faisant fructifier et en réveillant la vitalité en sommeil qui est inhérente à la Nature et à sa matière différenciée. On comprenait si bien cela, dans l'antiquité, que même Aristote, si modérément religieux, faisait remarquer que ce travail de création directe ne conviendrait nullement à Dieu – ὰπρεπες τω̣̃ Θεω̣̃. Platon et d'autres philosophes enseignaient la même chose : la divinité ne peut mettre la main à la création – αύτουργει̃ν ά̀παντα [créer toutes choses de ses propres mains]. Cudworth appelle cela "Hylozoïsme". Laèrte, prête au  vieux Zénon les paroles suivantes :

La nature est une habitude mue par elle-même, suivant des principes séminaux ; elle perfectionne et renferme les différentes choses qu'elle tire de son sein à des époques déterminées et agit de manière agréable à ce qui l'a sécrétée. 390

389 La conception et la définition de l'Absolu du Cardinal Cusa ne peut satisfaire que l'esprit occidental, si inconsciemment prisonnier et entièrement dégénéré, par suite de longs siècles de sophismes scolastiques et Théologiques. Mais cette "récente philosophie de l'Absolu", que Sir William Hamilton fait remonter à Cusa, ne donnerait jamais satisfaction à l'esprit plus finement métaphysique du Védantin Hindou.

 390 Cudworth, Intellectual System, 1, 328.

 

Retournons à notre sujet et méditons-le. En vérité, s'il a existé, durant ces périodes, une vie végétale qui pouvait se nourrir des  éléments délétères, et s'il a même existé une vie animale, dont l'organisation aquatique pouvait se développer, malgré la rareté supposée de l'Oxygène, pourquoi la vie humaine n'aurait-elle, pas pu exister aussi, sous  sa première [III 200] forme Physique, c'est-à-dire dans une race d'êtres s'adaptant à cette période géologique et au milieu ambiant ? La Science confesse, en outre, qu'elle ne sait rien de la durée réelle des périodes géologiques.

Mais la question importante pour nous, c'est de savoir s'il est tout à fait certain que, depuis l'époque de ce que l'on appelle l'âge Azoïque, il a toujours existé une atmosphère comme celle dont les Naturalistes supposent l'existence. Tous les Physiciens ne sont pas d'accord  sur ce point. Si l'auteur était anxieux de corroborer les enseignements de la DOCTRINE SECRETE à l'aide de la Science exacte, il lui serait facile de prouver par l'acquiescement de plus d'un Physicien, que l'atmosphère a peu changé, si même elle a changé, depuis l'époque de la condensation des premiers océans – c'est-à-dire depuis le Laurentien, le Pyrolithique. Telle est, en tout cas, l'opinion de Blanchard, de S. Meunier et même de Bischof

–    comme le prouvent les expériences faites par ce dernier Savant sur les basaltes. En effet, si nous nous en tenions à ce que dit la majorité des Savants, au sujet de la quantité de gaz mortels et d'éléments entièrement saturés de Carbone et d'Azote au milieu desquels on nous dit  que les règnes végétal et animal ont vécu, lutté et se sont développés, nous en arriverions à cette curieuse conclusion qu'il existait alors des  océans d'acide carbonique liquide au lieu d'eau. Avec un pareil élément, il devient douteux que les Ganoïdes ou même les Trilobites Primitifs aient pu vivre dans les océans de l'Ere Primaire – sans même parler de ceux du Silurien comme le montre Blanchard.

Toutefois, les conditions qui étaient nécessaires à l'existence de la première Race humaine n'exigeaient la présence d'aucun élément, ni simple, ni composé. Nous maintenons ce que nous avons dit au début. L'Entité spirituelle et éthérée qui vivait dans les Espaces inconnus à la Terre, avant que le premier "fragment de gelée" sidéral n'eut évolué dans l'océan de la Matière Cosmique brute – des milliards et des trillions d'années avant que le point globulaire de l'infini que nous  appelons la Terre n'eût commencé à exister et à générer les Monères dans ses gouttes, appelées océans – n'avait besoin d'aucun "élément". Le "Manou aux os tendres" pouvait bien se passer de Phosphate de Chaux, puisqu'il  n'avait pas d'os, sauf au figuré. Et tandis que les Monères, si homogène que fût leur organisme, avaient encore besoin de conditions physiques d'existence pouvant les aider à avancer dans la voie de l'évolution, l'Etre qui devint l'Homme Primitif et le "Père de l'Homme", après avoir évolué sur des plans dont la science n'a même pas rêvé, pouvait bien rester indifférent [III 201] à toutes les conditions atmosphériques qui  l'entouraient. L'ancêtre primitif du Popol Vuh de Brasseur de Bourgbourg, qui – dans les légendes Mexicaines – pouvait se mouvoir et vivre aussi facilement, sous la terre ou sous l'eau que sur la terre, ne correspond qu'à la Seconde et au commencement de la Troisième Race de notre texte. Si les trois règnes de la Nature étaient aussi différents durant les périodes pré-diluviennes, pourquoi l'homme n'aurait-il pas été formé de matériaux et de combinaisons d'atomes, aujourd'hui absolument inconnus de la Science Physique ? Les plantes et les animaux dont nous connaissons aujourd'hui les variétés et les espèces presque innombrables, sont tous, d'après les hypothèses scientifiques, les produits du développement de formes organiques primitives et bien moins nombreuses. Pourquoi n'en serait-il pas de même dans le cas de l'homme, des éléments et du reste ? Comme le dit le Commentaire :

La Genèse Universelle de l'Unique, se divise en Trois, puis en Cinq et finalement en Sept, son point culminant, pour revenir à Quatre, à Trois et à Un.