SECTION IV
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DUREE DES PERIODES GEOLOGIQUES, DES RACES ET DES CYCLES ET ANTIQUITE DE L'HOMME
Des millions d'années ont disparu sous les flots du Léthé, sans laisser plus de traces dans la mémoire du profane que les quelques milliers d'années de la chronologie orthodoxe occidentale, en ce qui concerne l'Origine de l'Homme et l'histoire des races primordiales.
Tout dépend des preuves que l'on découvre de l'antiquité de la Race Humaine. Si l'homme, encore discuté, de la période Pliocène, ou même de la période Miocène, fut l'Homo primigenius, [IV 310] la Science peut avoir raison (argumenti causa) de baser son Anthropologie actuelle – en ce qui a trait à la date et au mode de l'origine de l'Homo Sapiens – sur la théorie de Darwin 614. Mais si des squelettes humains sont découverts en tous temps dans les couches Eocènes, tandis que l'on n'y découvre aucun singe fossile et s'il est ainsi prouvé que l'existence de l'homme est antérieure à celle de l'anthropoïde – les partisans de Darwin devront exercer leur ingéniosité dans une autre direction. On assure, en outre, dans les milieux bien informés, que le vingtième siècle n'aura pas encore atteint ses vingt ans lorsque se produiront des preuves indéniables de la priorité de l'homme.
614 On peut faire remarquer ici que les Darwiniens qui, avec M. Grant Allen, font remonter notre ancêtre "poilu et grimpeur" aussi loin que l'époque Eocène, se trouvent en présence, d'un étrange dilemme. Aucun fossile de singe anthropoïde – et encore moins le fabuleux ancêtre commun assigné à l'homme et au pithécoïde – n'apparaît dans les couches Eocènes. Le premier singe anthropoïde que l'on rencontre est miocène.
Même actuellement, il surgit beaucoup de preuves établissant que l'antiquité assignée à la fondation de villes, de civilisations et à divers événements historiques, a été écourtée d'une manière absurde. Ceci n'a été fait que pour ne pas aller à l'encontre de la chronologie biblique. Ed. Lartet, le paléontologiste bien connu, écrit :
On ne peut trouver dans la Genèse aucune date assignée à la naissance de l'humanité primitive.
Mais, depuis quinze siècles, les chronologistes se sont efforcés de faire concorder les faits de la Bibleavec leurs systèmes. Il en résulte que non moins de cent quarante opinions différentes ont été émises, au sujet de la seule date de la "création".
Et entre les opinions extrêmes, il y a une divergence de 3194 ans, dans le calcul de la période de temps qui s'est écoulée entre le commencement du monde et la naissance du Christ. Durant les dernières années qui viennent de s'écouler, les archéologues se sont vus dans l'obligation de reculer de près de 3000 ans la date des débuts de la civilisation babylonienne. Sur le cylindre déposé dans les fondations d'un temple par Nabonidus, roi de Babylone vaincu par Cyrus, se trouve une déclaration du premier dans laquelle il parle de la découverte qu'il a faite de la pierre fondamentale appartenant au temple originel, construit par Naram-Sin, fils de Sargon, d'Akkadi, le conquérant de Babylone, qui, dit Nabonidus, vivait 3200 ans avant lui 615. [IV 311]
615 Ed. LARTET : "Nouvelles recherches sur la coexistence de l'Homme et il est indéniable qu'ils ont embrouillé "intentionnellement" des Grands Mammifères Fossiles de la dernière Période Géologique". Annales des Soc. Nat., 4ème série. XV. 256. 1861.
Nous avons prouvé dans Isis Dévoilée que ceux qui basent l'histoire sur la chronologie des Juifs – race qui n'avait pas de chronologie qui lui fût propre et qui repoussa celle de l'Occident jusqu'au douzième siècle – ne peuvent que s'égarer, attendu que le calcul juif ne peut être suivi qu'à l'aide de computations cabalistiques et seulement lorsqu'on en possède la clef. Nous avons qualifié de fantastique la chronologie de feu Georges Smith, au sujet des Chaldéens et des Assyriens, qu'il avait fait cadrer avec celle de Moïse. Aujourd'hui, en ce qui concerne cette question du moins, les Assyriologues modernes ont confirmé notre dénégation. En effet, tandis que Georges Smith fait régner Sargon 1er (le prototype de Moïse) sur la cité d'Akkad, vers l'an 1600 avant J-C. – probablement par suite d'un respect latent pour Moïse, qui florissait, d'après la Bible, 1571 ans avant J.- C – nous apprenons maintenant par la première des six Conférences Hibbert, faites par le professeur A.-H. Sayce, d'Oxford, en 1887, que :
Les anciennes idées sur les anciennes annales de Babylone et sur sa religion ont été considérablement modifiées par les récentes découvertes. On admet maintenant que le premier Empire Sémitique fut celui de Sargon d'Akkad, qui fonda une grande bibliothèque, patronna la littérature et étendit ses conquêtes au-delà des mars jusqu'à Chypre. On sait aujourd'hui que l'époque de son règne remonte jusqu'à l'an 3750 avant J.- C… Les monuments akkadiens découverts par les Français à Tel-loh doivent même être plus anciens et remonter à près de 4000 ans avant J.-C.
En d'autres termes, jusqu'à la quatrième année de la création du Monde, suivant la chronologie de la Bible, et lorsque Adam était encore au maillot. D'ici quelques années, il n'y aurait rien de surprenant à ce que les 4000 ans fussent encore augmentés. Le conférencier bien connu d'Oxford fit remarquer dans ses dissertations sur "l'Origine et le Développement de la Religion, tels qu'ils découlent de la Religion des anciens Babyloniens", que :
Les difficultés que l'on éprouvait à retracer systématiquement l'origine et l'histoire de la Religion Babylonienne étaient considérables. Les monuments constituaient presque la seule source à laquelle nous pouvions puiser nos connaissances à ce sujet, car les auteurs classiques ou Orientaux ne nous aidaient que très peu. Un fait reste indéniable, c'est que les prêtres de Babylone ont intentionnellement enveloppé l'étude des textes religieux de difficultés presque insurmontables. [IV 312]
les dates et surtout l'ordre des événements, et cela pour une excellente raison : leurs écrits et leurs archives étaient tous Esotériques. Les prêtres de Babylone ne firent rien de plus que les prêtres des autres nations anciennes. Leurs archives n'étaient destinées qu'aux Initiés et à leurs disciples, et ce n'est qu'à ces derniers que l'on donnait la clef de leur vraie signification. Toutefois, les remarques du professeur Sayce sont pleines de promesses, car il explique la difficulté en disant que :
Puisque la bibliothèque de Ninive renfermait surtout des copies de textes babyloniens plus anciens et que les copistes n'ont choisi que les tablettes qui étaient spécialement intéressantes pour les conquérants Assyriens et qui dataient d'une époque comparativement récente, cela accrut beaucoup la plus grande de toutes les difficultés que nous rencontrions – celle d'être laissés si souvent dans le doute au sujet de l'âge des preuves documentaires que nous possédions et de la valeur précise des matériaux dont nous disposions pour reconstituer l'histoire.
On est donc en droit d'en conclure qu'une nouvelle découverte peut rendre nécessaire de reculer encore les dates babyloniennes, assez au-delà de l'an 4000 avant J.- C., pour les rendre pré-cosmiques, aux yeux de tous ceux qui ont le culte de la Bible.
Combien davantage aurait appris la Paléontologie, si des millions d'ouvrages n'avaient pas été détruits ! Nous parlons de la Bibliothèque d'Alexandrie qui a été détruite trois fois : par Jules César 48 ans avant J.- C., en l'an 390 du Seigneur, et enfin l'an 640 du Seigneur par le général du Calife Omar. Qu'est cela, comparé aux archives et aux ouvrages détruits dans les Bibliothèques Atlantéennes primitives, où l'on dit que les annales avaient été tracées sur les peaux tannées de gigantesques monstres antédiluviens ? Ou bien, comparé à la destruction d'innombrables ouvrages chinois, ordonnée par le fondateur de la Dynastie Impériale des Tsin, Tsin Shi Hwang-ti, en l'an 213 avant J.-C. ? Assurément, les tablettes en terre cuite de la Bibliothèque Impériale Babylonienne et les trésors inappréciables des collections chinoises n'auraient jamais pu renfermer les renseignements qu'une seule des peaux "Atlantéennes" dont nous venons de parler aurait pu fournir au monde ignorant.
Pourtant, même avec les très maigres données dont elle dispose, la Science a pu constater qu'il était nécessaire de reculer presque toutes les dates babyloniennes, et elle l'a fait très généreusement. Le professeur Sayce nous apprend que les statues archaïques de Tel-loh, dans la Babylonie Inférieure, se sont elles-mêmes vu assigner une ancienneté qui en ferait les contemporaines [IV 313] de la quatrième dynastie d'Egypte 616. Malheureusement les dynasties et les pyramides partagent le sort des périodes géologiques ; leurs dates sont arbitraires et dépendent des caprices des différents savants. Les archéologues savent maintenant, dit- on, que les statues en question sont faites en diorite verte que l'on ne peut se procurer que dans la péninsule du Sinaï et elles concordent, par le style artistique et par les mesures employées avec les statues en diorite, du même genre, des constructeurs de pyramides de troisième et quatrième dynastie égyptiennes… En outre, la seule période possible pour une occupation, par les babyloniens, des carrières sinaïtiques, doit être placée vers la fin de l'époque durant laquelle les pyramides furent construites, et ce n'est qu'ainsi que nous pouvons nous expliquer que le nom de Sinaï ait été dérivé de Sin, nom du dieu- lunaire primitif de Babylone.
616 Voyez les Conférences Hibbert pour 1887, p. 33.
C'est très logique, mais quelle date assigne-t-on à ces dynasties ? Les tables synchroniques de Sanchoniathon et de Manéthon – ou ce qui en est resté après qu'elles eurent passé par les mains de saint Eusèbe – ont été rejetées, et nous devons encore nous contenter des quatre ou cinq mille ans avant J.-C. que l'on alloue si libéralement à l'Egypte. En tout cas, un point est acquis. Il y a, du moins, une ville sur la surface de la Terre à laquelle on alloue au moins 6.000 ans, et c'est Eridou. C'est la Géologie qui l'a découverte. Citons encore le professeur Sayce :
On peut maintenant établir le temps nécessaire à l'obstruction du fond du Golfe Persique, qui exige une période de 5.000 à 6.000 ans, depuis l'époque où Eridou, qui se trouve maintenant à vingt-cinq milles dans les terres, était un port de mer à l'embouchure de l'Euphrate et le siège du commerce de Babylone avec l'Arabie Méridionale et les Indes. La nouvelle chronologie donne surtout le temps nécessaire à la longue série d'éclipses mentionnées dans le traité d'astronomie qui a pour titre : "Les Observations de Bel" et nous permet aussi de comprendre le changement de position de l'équinoxe du temps, qui sans cela nous rendrait perplexes et qui s'est produit depuis que nos signes zodiacaux actuels furent dénommés par les premiers astronomes de Babylone. Lorsque le calendrier Akkadien fut établi et que les mois Akkadiens reçurent leurs noms, le soleil, au moment de l'équinoxe du printemps, ne se trouvait pas, comme maintenant, dans les Poissons, ni même dans le Bélier, mais dans le Taureau. La marche de la précession des équinoxes étant connue, nous apprenons que le soleil se trouvait dans le Taureau, à l'équinoxe du printemps, depuis environ 4700 ans avant J.-C., et nous [IV 314] obtenons ainsi pour les dates des limites astronomiques qui sont inattaquables 617.
617 Tiré d'un compte rendu des Conférences Hibbert en 1887. Lecture on the Origin and Growth of Religion, as Illustrated by the Religion of the Ancient Babylonians, par A. H.-Sayce.
Nous éclaircirons mieux notre position en nous empressant de déclarer que nous employons la nomenclature de Sir C. Lyell pour les âges et les périodes, et que, lorsque nous parlons des époques Secondaire et Tertiaire, des périodes Eocène, Miocène et Pliocène, c'est simplement pour nous faire mieux comprendre puisque l'on n'a pas encore assigné une durée fixe, bien déterminée, à ces âges et à ces périodes, car on assigne tantôt deux millions et demi d'années et tantôt quinze millions d'années à une seule et même période (la période Tertiaire) et puisqu'il n'y a pas deux géologues ou naturalistes paraissant être d'accord sur ce point, l'Enseignement Esotérique peut rester tout à fait indifférent à la question de savoir si l'homme a fait son apparition durant, la période Secondaire ou durant la période Tertiaire. Si l'on peut en arriver à allouer à cette dernière une durée atteignant jusqu'à quinze millions d'années – très bien ; car la Doctrine Occulte, tout en gardant jalousement ses chiffres exacts, en ce qui concerne la Première, la Seconde et les deux tiers de la Troisième Race- Mère, donne des informations précises sur un point seulement – l'âge de l'humanité de Vaivasvata Manou.
Une autre déclaration précise, c'est que, durant ce qu'on appelle la période Eocène, le Continent auquel appartenait la Quatrième Race et sur lequel elle vivait et mourait, laissa voir les premiers symptômes de son affaissement et que ce fut durant la période Miocène qu'il fut définitivement détruit – sauf la petite île mentionnée par Platon. Il reste à vérifier maintenant ces faits au moyen de données scientifiques 618.