STANCE III — LE REVEIL DU KOSMOS
§ 1. – La dernière Vibration de la Septième Eternité tressaille à travers l'Infini (a). La Mère se gonfle, elle croît de dedans en dehors, comme le Bouton du Lotus (b).
(a) L'emploi en apparence paradoxal du terme "Septième Eternité", terme qui divise ainsi l'indivisible, est sanctifié dans la Philosophie Esotérique. Cette dernière divise la Durée sans bornes en Temps inconditionné, éternel et universel (Kâla), et en Temps conditionné (Khandakâla). L'un est l'abstraction ou le noumène du Temps infini, l'autre son phénomène apparaissant périodiquement comme effet de Mahat – l'Intelligence Universelle, limitée par la durée manvantarique. Dans quelques écoles, Mahat est le premier-né de Pradhâna (la Substance non différenciée, ou aspect périodique de Mûlaprakriti, la Racine de la Nature), laquelle (Pradhâna) est appelée Mâyâ, Illusion. Sur ce point, je crois que l'enseignement Esotérique diffère de la doctrine Védântine des écoles Advaïta et Visishthadvaïta. Car il dit que, tandis que Mûlaprakriti, le noumène, est soi-existant et sans origine – en un mot, sans parents, Anupâdaka, un avec Brahman – Prakriti, son phénomène, est périodique et simplement le fantôme du premier ; de même, Mahat, le premier-né de Jñâna (ou Gnôsis), la Connaissance, la Sagesse, le Logos – est un fantôme réfléchi du NIRGUNA Absolu (Parabrahman), la Réalité Unique, "sans attributs, ni qualités" tandis que, selon quelques Védântins, Mahat serait une manifestation de Prakriti ou Matière.
(b) Par conséquent, "la dernière Vibration de la Septième Eternité" n'était "prédestinée" par aucun Dieu, mais se présentait comme résultat d'une Loi éternelle et immuable qui est la cause des grandes périodes d'Activité et de Repos appelées si expressément, et en même temps si poétiquement, les Jours et les Nuits de Brahmâ. L'expansion "de dedans en dehors" de la Mère, appelée ailleurs les "Eaux de l'Espace", "la Matrice universelle", etc., ne fait pas allusion à l'expansion d'un petit centre ou foyer, mais signifie le développement d'une subjectivité sans limites devenant objectivité sans plus de limites, et cela sans référence à une question de dimensions de, bornes ou d'étendue. "La Substance[pour nous] toujours invisible et immatérielle qui est présente dans l'éternité, jeta son Ombre périodique, de son plan dans le Sein de Mâyâ." Cela implique que cette expansion, n'étant pas une augmentation de dimension – car l'extension infinie n'admet pas d'augmentation – était un changement de condition. Elle s'épanouit "comme le bouton du Lotus" car la plante [I 41] du Lotus n'existe pas seulement en embryon miniature dans sa graine (ce qui est sa caractéristique physique), mais son prototype est présent en une forme idéale dans la Lumière Astrale, depuis l' "Aurore" jusqu'à la "Nuit", pendant la période manvantarique, comme tout, du reste, dans cet Univers objectif – de l'homme à la mîte, de l'arbre géant au brin d'herbe le plus infime.
Tout cela, nous dit la Science Cachée, n'est que la réflexion temporaire, l'ombre du prototype éternel idéal qui repose dans la Pensée Divine et notez que le mot "Eternité" n'a ici que la signification d' "Æon", c'est-à-dire ce qui dure à travers ce qui paraît interminable, bien que ce ne soit que le cycle d'activité que nous appelons Manvantara. Quelle est, en effet, la signification réelle et ésotérique du mot Manvantara, ou plutôt Manuantara ? Il signifie, littéralement, "entre deux Manous" ; il y a quatorze Manous dans chaque Jour de Brahmâ, et chacun de ces derniers comprend mille fois les quatre Ages mille "Grands Ages" ou Mahâyugas. Analysons maintenant le mot de Manou. Les Orientalistes, dans leurs dictionnaires, nous disent que le terme "Manu" vient de la racine man, "penser" c'est, par conséquent, "l'homme pensant". Mais, ésotériquement, chaque Manou – véritable anthropomorphisé du cycle spécial (ou Ronde) auquel il préside – n'est que l'idée personnifiée de la "Pensée Divine" (comme le Pymandre Hermétique), le dieu particulier, le créateur, le façonneur de tout ce qui apparaît pendant le cycle ou Manvantara qui lui est propre. Fohat est le serviteur des Manus (ou Dhyân-Chôhans), et est cause que les prototypes idéaux s'épanouissent de dedans en dehors, c'est- à-dire traversent peu à peu, sur une échelle descendante, tous les plans, de celui des noumènes à celui des phénomènes, le plus bas, pour fleurir sur ce dernier en pleine objectivité comme summum de l'illusion, ou de la matière dans son état le plus grossier.
STANCE III (2)
§ 2. – La Vibration se propage soudain, touchant 208 de son Aile rapide tout l'Univers et le Germe qui réside dans les Ténèbres, les Ténèbres qui soufflent 209 sur les Eaux sommeillantes de la Vie.
208 Simultanément.
209 Se meuvent.
La Monade pythagoricienne est dite aussi habiter dans la solitude et les "Ténèbres", comme le "Germe". L'idée du [I 42] "Souffle" des Ténèbres se mouvant sur les "Eaux sommeillantes de la Vie" – qui sont la Matière Primordiale contenant l'Esprit latent – rappelle le premier chapitre de la Genèse. Son original est le Narâyana brahmanique (Celui qui se meut sur les Eaux), personnification du Souffle Eternel du Tout inconscient (ou Parabrahman) des Occultistes orientaux. Les Eaux de la Vie, ou le Chaos – en symbolisme le principe féminin – sont le vide (pour notre vue mentale) dans lequel se trouvent à l'état latent l'Esprit et la Matière. C'est ce qui fit dire à Démocrite, d'après son précepteur Leucippe, que les principes primordiaux de tout étaient des atomes et un vide – vide au sens d'espace, mais non d'espace vide, car la "Nature a horreur du vide", selon les Péripatéticiens et tout philosophe de l'antiquité.
Dans toutes les Cosmogonies, l' "Eau" joue le même rôle important. Elle est la base et la source de l'existence matérielle. Les savants, prenant le mot pour la chose, ont compris par-là qu'il s'agissait de la combinaison chimique définie de l'oxygène avec l'hydrogène et ont donné ainsi une signification spécifique à un terme dont les Occultistes se servent dans un sens générique, et auquel on donne, en Cosmogonie, un sens mystique et métaphysique. La glace n'est pas l'eau, la vapeur non plus, les trois pourtant ont la même composition chimique.
STANCE III (3)
§ 3. – Les Ténèbres rayonnent la Lumière, et la Lumière laisse tomber un Rayon solitaire dans les Eaux, dans l'Abîme-Mère. Le Rayon traverse rapidement l'Œuf Vierge ; il fait frissonner l'Œuf Eternel, qui laisse tomber le Germe non éternel 210 qui se condense en l'Œuf du Monde.
210. Périodique.
Le "Rayon solitaire" tombant dans l' "Abîme-Mère" peut être pris comme signifiant la Pensée Divine, ou l'Intelligence imprégnant le Chaos. C'est ce qui se passe sur le plan de l'abstraction métaphysique, ou plutôt sur le plan où ce que nous appelons une abstraction métaphysique est une réalité. "L'Œuf Vierge" étant, en un sens, l'Ovarité abstraite, c'est-à-dire le pouvoir de se développer par la fécondation, est éternel et à jamais le même. Et comme la fécondation d'un œuf a lieu avant qu'il soit pondu, de même, le Germe non éternel, périodique, qui devient plus tard, dans le symbolisme, l'Œuf du Monde, contient en lui-même, lorsqu'il [I 43] sort dudit symbole, "la promesse et la puissance" de tout l'Univers. Quoique l'idée per se soit, naturellement, une abstraction, un mode d'expression symbolique, elle est un vrai symbole, car elle suggère l'infinité comme un cercle sans fin. Elle met devant les yeux du mental le tableau du Kosmos émergeant de l'Espace sans bornes, et en lui, Univers également sans rivage dans son étendue, sinon aussi éternel dans sa manifestation objective. Le symbole de l'œuf exprime encore le fait enseigné dans l'Occultisme, que la forme primordiale de toute chose manifestée, de l'atome au globe, de l'homme à l'ange, est sphéroïdale, la sphère étant, dans toutes les nations, l'emblème de l'éternité et de l'infini – un serpent avalant sa queue. Toutefois, pour réaliser cette signification, il faut penser à la sphère telle qu'elle serait vue du centre. Le champ de la vision ou de la pensée, est comme une sphère dont les rayons vont de soi dans toutes les directions et s'étendent dans l'espace, ouvrant tout autour d'eux des aperçus sans bornes. C'est le cercle symbolique de Pascal et des Kabalistes, "dont le centre est partout, et la circonférence nulle part" – conception qui s'ajuste à l'idée complexe de cet emblème.
"L'Œuf du Monde" est peut-être un des symboles le plus universellement adopté, et il est hautement suggestif, tant dans le sens spirituel que dans le sens physiologique et cosmologique. On le trouve, par conséquent, dans toute théogonie du monde, et il y est amplement associé au symbole du serpent, ce dernier étant partout, dans les philosophies comme dans le symbolisme religieux, l'emblème de l'éternité, de l'infini, de la régénération aussi bien que de la sagesse 211. Le mystère de la soi- génération apparente et de l'évolution par son propre pouvoir créateur, répétant en petit, dans l'œuf, le processus de l'évolution Cosmique – processus dus tous les deux à la chaleur et à l'humidité vitalisées par le rayonnement de l'esprit créateur invisible – justifie pleinement le choix de ce symbole expressif. "L'Œuf Vierge" est le symbole microcosmique du prototype macrocosmique, la "Vierge-Mère", le Chaos ou l'Abîme Primordial. Le Créateur mâle (sous n'importe quel nom) fait sortir de la Vierge féminine la Racine Immaculée, fructifiée par le Rayon. Quel est l'individu versé dans les sciences astronomiques et naturelles qui ne verra pas combien cela est suggestif ? Le Kosmos, considéré comme la Nature réceptive, est un œuf-fructifié – et cependant laissé immaculé du moment qu'il est regardé comme sans bornes, il ne peut être représenté autrement que par un sphéroïde. L'Œuf d'Or était entouré de sept Eléments [I 44] naturels (l'éther, le feu, l'air, l'eau), "quatre apparents et trois secrets". On trouvera cela dans le Vishnu Purâna où les éléments sont traduits par le mot "enveloppes", et où l'on y ajoute un élément secret – Ahamkâra 212. Le texte original ne porte pas d'Ahamkâra il parle des sept Eléments sans spécifier les trois derniers.
211 Voir Partie 2, Section 10. Culte de l'arbre, du serpent et du crocodile.
212 Wilson, Vishnu Purâna, I, 40.
STANCE III (4)
§ 4. – Les Trois 213 tombent dans les Quatre 214. L'Essence Radieuse devient Sept en dedans et Sept en dehors (a). L'Œuf lumineux 215, qui en lui-même est Trois 216, se coagule et s'étend en Caillots blancs comme du lait, dans les Profondeurs de la Mère, la Racine qui croît dans les Profondeurs de l'Océan de Vie (b).
213 Triangle.
214 Quaternaire.
215 Hiranayagarbha.
216 Les triples hypostases de Brahmâ, ou Vishnu, les trois Avasthâs.
(a) Il faut expliquer l'emploi des figures géométriques et les fréquentes allusions à des chiffres qui se trouvent dans toutes les Ecritures antiques : dans les Purânas, dans le Livre des Morts des Egyptiens et même dans la Bible. Dans le LIVRE DE DZYAN, comme dans la Kabale, il y a deux sortes de nombres à étudier : les Chiffres, souvent de simples leurres, et les Nombres Sacrés, dont la valeur est connue des Occultistes au moyen de l'Initiation. Les premiers ne sont que des glyphes de convention ; les derniers sont les symboles fondamentaux de tout. C'est-à-dire les uns sont purement physiques, les autres purement métaphysiques, les deux étant dans la même relation réciproque que la Matière et l'Esprit – pôles extrêmes de la Substance UNIQUE.
Comme dit quelque part Balzac, l'Occultiste inconscient de la littérature française, le Nombre est au Mental ce qu'il est à la Matière : "Un agent incompréhensible." Il en est sans doute ainsi pour le profane, mais non pour l'initié. Le Nombre, comme le pensait le grand écrivain, est une Entité, et en même temps un Souffle émanant de ce qu'il appelait Dieu, et de ce que nous appelons le TOUT ; le Souffle qui seul pouvait organiser ce Kosmos physique, "où rien n'obtient sa forme que par la Divinité, laquelle est un effet du nombre". Il est intéressant de citer, à ce sujet, les paroles de Balzac : [I 45]
"Les moindres créations comme les plus grandes, ne se distinguent-elles pas entre elles par leurs quantités, leurs qualités, leurs dimensions, leurs forces et leurs attributs, tous éléments procédant du Nombre ? L'infini des Nombres est un fait prouvé par notre mental, mais dont la preuve ne peut pas être donnée physiquement. Le mathématicien nous dira que l'infini des nombres existe, mais qu'on ne peut pas le démontrer. Dieu est un Nombre doué de mouvement qu'on sent, mais qu'on ne peut démontrer. Comme Unité, il commence les Nombres, mais il n'a rien de commun avec eux... L'existence du Nombre dépend de l'Unité, qui, sans un seul Nombre, les engendre tous... Eh quoi ! incapables de mesurer la première abstraction qu'offre la Divinité, ou seulement de la comprendre, vous espérez quand même soumettre à vos mesures le mystère des Sciences Secrètes qui émanent de cette Divinité ?... Qu'éprouveriez-vous donc si je vous plongeais dans les abîmes du Mouvement, la Force qui organise les Nombres ? Que penseriez-vous si j'ajoutais que le Mouvement et le Nombre 217 sont engendrés par le Verbe, la Raison Suprême des Voyants et des Prophètes qui, dans les anciens temps, sentirent le Souffle puissant de Dieu, comme en témoigne l'Apocalypse ? 218"
(b) "L'Essence Radieuse se caille et s'étend à travers les Profondeurs" de l'Espace. Au point de vue astronomique, cette figure est facile à expliquer : c'est la Voie Lactée, l'Etoffe dont est fait le Monde, la Matière Primordiale dans sa première forme. Il est toutefois plus difficile, au point de vue de la science occulte et du symbolisme, d'expliquer ce point en peu de mots, car c'est le plus compliqué des glyphes. C'est le réceptacle de plus d'une douzaine de symboles. Et d'abord il contient tout le panthéon des objets mystérieux 219, dont chacun possède une signification Occulte définie, tirée de l'allégorie hindoue du "Barattage de l'Océan" par les Dieux. C'est ainsi qu'Amrita, l'eau de vie ou d'immortalité et Surabhi, "la vache d'abondance" appelée "la fontaine de lait et de caillé", procèdent de cette "Mer de Lait". De là, le culte universel de la vache et du taureau, spécifiant, l'un, le pouvoir producteur, l'autre, le pouvoir générateur dans la Nature : symboles reliés aux divinités Solaires et Cosmiques. Les propriétés spécifiques, pour l'usage Occulte, des "quatorze [I 46] choses précieuses" n'étant expliquées qu'à la quatrième Initiation, ne peuvent être données ici mais il convient de faire les remarques suivantes. On déclare dans le Shatapatha Brâhmana que le barattage de l' "Océan de Lait" eut lieu pendant le Satya Yuga, le premier Age qui suivit immédiatement le "Déluge". Comme, cependant, ni le Rig Veda, ni Manu – tous les deux antérieurs au Déluge de Vaïvasvata, celui qui anéantit la plus grande partie de la Quatrième Race – ne parlent de ce déluge, il est évident que celui dont on parle ici n'est ni un Grand Déluge, ni celui qui emporta Atlantis, ni même celui de Noé. Ce "barattage" se rapporte à une période antérieure à la formation de la terre et s'applique directement à une autre légende universelle dont les versions diverses et contradictoires trouvèrent leur expression maximum dans le dogme chrétien de la "Guerre dans le ciel", et de la "Chute des Anges". Les Brâhmanas, que les Orientalistes accusent d'être des versions sur le même sujet, ne s'accordant pas ensemble, sont au plus haut degré des ouvrages occultes, et, par conséquent, servant de voiles. On ne leur a permis de rester à l'usage et en la propriété du public que parce qu'ils étaient et sont absolument incompréhensibles aux masses. Sinon, on les aurait supprimés depuis longtemps, dès le temps d'Akbar.
217 Le Nombre, soit, mais jamais le Mouvement. C'est le mouvement qui engendre le Logos, le Verbe, en Occultisme.
218 Ce texte est traduit de la citation anglaise, et non le texte original de Balzac. – (N. du Traducteur.)
219 Les "quatorze choses précieuses". L'histoire ou l'allégorie se trouve dans le Shatapatha Brâhmana et ailleurs. La Science Secrète des Japonais, des Mystiques Bouddhistes, les Yamabushi, a "sept choses précieuses". Nous en parlerons plus loin.
STANCE III (5)
§ 5. – La Racine demeure, la Lumière aussi, les Caillots également, et cependant OEAOHU (a) est Un (b).
(a) Dans les commentaires, on traduit OEAOHU par "le Père-Mère des Dieux", ou le SIX EN UN, ou la Racine septénaire dont tout procède. Tout dépend de l'accent qu'on donne à ces sept voyelles, on peut les prononcer comme une, trois, et même sept syllabes en ajoutant un e après le o final. Ce nom mystique n'est d'ailleurs divulgué que parce que, sans une maîtrise parfaite de sa triple prononciation, il reste à jamais sans effet.
(b) "Est Un" se rapporte à la Non-Séparativité de tout ce qui vit et existe, à l'état actif ou passif. Dans un sens, OEAOHU est la "Racine sans Racine de Tout" et, par conséquent, un avec Parabrahman. Dans un autre sens, c'est un nom de la VIE UNE manifestée, l'Unité éternelle et vivante.
"Racine" signifie, comme on l'a déjà expliqué, la Connaissance Pure (Sattva) 220, la Réalité éternelle non conditionnée [I 47] (nitya), ou Sat (Satya), qu'on l'appelle Parabrahman ou Mûlaprakriti, car ces derniers ne sont que les deux symboles de l'Un. La "Lumière" est le même Rayon Spirituel Omniprésent qui est entré dans l'Œuf Divin, l'a maintenant fécondé, et invite la matière cosmique à commencer sa longue série de différenciations. Les "Caillots" sont la première différenciation et se rapportent probablement à cette matière cosmique, que l'on suppose être l'origine de la Voie Lactée – la matière que nous connaissons. Cette "matière", qui, selon la révélation reçue des premiers Dhyânis-Buddhas, est, pendant le sommeil périodique de l'Univers, de la ténuité la plus grande que puisse concevoir l'œil du Bodhisattva parfait – cette matière radieuse et froide se trouve, au premier réveil du mouvement cosmique, éparpillée à travers l'Espace, apparaissant, vue de la Terre, en mottes et en masses semblables aux grumeaux de lait caillé. Ce sont les semences des mondes futurs, l' "étoffe Stellaire".
220 "Le terme original qui exprime la "Compréhension" est Sattva, que Shankara traduit par Antaskarana "purifié par les sacrifices, et par d'autres opérations sanctifiantes". Dans la Katha, page 148, Sattva est traduit, par Shankara, par le mot Buddhi, et c'est là l'usage ordinaire du mot (Bhagavad-gitâ, etc., traduite par Kathinath Trimbak Telang. M. A., éditée par Max Müller, p. 195). Quelque signification que les diverses écoles puissent lui attribuer, Sattva est le nom donné par les étudiants occultistes de l'Ecole Aryâsanga à la Monade double, ou Atmâ-Buddhi, et Atmâ-Buddhi, sur ce plan-là, correspond à Parabrahman et à Mûlaprakriti sur le plan supérieur.
STANCE III (6)
§ 6. – La Racine de la Vie était en chaque Goutte de l'Océan de l'Immortalité 221, et l'Océan était la Lumière Radieuse qui était Feu, Chaleur et Mouvement. Les Ténèbres disparurent et ne furent plus ; elles disparurent dans leur propre Essence, le corps de Feu et d'Eau, du Père et de la Mère.
221 Amrita.
L'Essence des Ténèbres étant la Lumière Absolue, les Ténèbres sont prises pour la représentation allégorique appropriée à la condition de l'Univers pendant le Pralaya, lequel paraît à notre mental borné comme une période de Repos Absolu ou de Non-Etre. "Le Feu, la Chaleur et le Mouvement" dont il est question ici, ne sont pas, bien entendu, le feu, la chaleur et le mouvement de la Science physique, mais leurs abstractions sous-jacentes, les noumènes, l'âme de l'essence de ces manifestations matérielles – les "choses en elles", qui, d'après l'aveu de la Science moderne, échappent [I 48] entièrement aux instruments de laboratoire, et que le mental même ne peut saisir, quoiqu'il ne puisse guère éviter de conclure à l'existence de ces essences comme substratum des choses. On peut expliquer "le Feu et l'Eau, le Père et la Mère" 222 comme signifiant ici le Rayon divin et le Chaos. "Par cette union avec l'Esprit, le Chaos obtenant la raison, rayonna de plaisir, et ainsi fut produit le Protogonos [la Lumière première-née]", dit un fragment d'Hermès. Damascius l'appelle Dis, en Théogonie le "disposeur de toutes choses" 223.
Selon les données des Rose-Croix, dont l'interprétation par les profanes est assez correcte sinon complète, "la Lumière et les Ténèbres sont identiques entre elles, car elles ne sont séparables que dans le mental humain", et, selon Robert Fludd, "les Ténèbres s'emparèrent de l'Illumination pour se rendre visibles" 224. D'après l'enseignement de l'Occultisme oriental, les TENEBRES sont la seule vraie réalité, la base et la racine de la Lumière, sans laquelle cette dernière ne pourrait jamais se manifester, ni même exister. La Lumière est Matière, et les TENEBRES pur Esprit. Les Ténèbres, dans leur base radicale et métaphysique, sont la Lumière subjective et absolue, taudis que cette dernière, lorsqu'elle est dans tout son éclat et sa gloire apparente, n'est qu'une masse d'ombres, parce qu'elle ne peut jamais être éternelle, et n'est simplement qu'Illusion ou Mâyâ.
Même dans la Genèse225, si déroutante et fatigante pour la science, la lumière est issue des ténèbres – "et les ténèbres sont la face de l'abîme", et non vice versa. "En lui [dans les ténèbres] était la vie et la vie était la lumière des hommes 226." Le jour viendra, peut-être, où les yeux des hommes seront ouverts ; ils comprendront alors mieux que maintenant le verset de l'Evangile de Jean qui dit : "Et la lumière brilla dans les ténèbres, et les ténèbres ne l'ont pas comprise." Ils verront alors que le mot "ténèbres" ne s'applique pas à la vision spirituelle de l'homme mais véritablement aux "Ténèbres", à l'Absolu, qui ne comprend pas (ne peut pas connaître) la Lumière passagère, quelque transcendante qu'elle puisse paraître aux yeux humains. Demon est Deus inversus. L'Eglise donne maintenant au Diable le nom [I 49] de Ténèbres, quoique dans la Bible(Livre de Job) 227, il soit appelé le "Fils de Dieu", l'étoile brillante du matin, Lucifer 228. Il existe toute une philosophie dogmatique dans la raison qui fit que le premier Archange qui monta des profondeurs du Chaos fut appelé Lux (Lucifer), le "Fils Lumineux du Matin" – de l'Aurore Manvantarique. L'Eglise l'a transformé en Lucifer ou Satan, parce qu'il est plus élevé et plus ancien que Jéhovah, et qu'il dut être sacrifié au nouveau dogme 229.
222 Voir "Kivan-Shi-Yin". Le nom réel du texte ne peut être donné.
223 Anciens Fragments de Cory, p. 314.
224 Ou Rosenkranz.
225 Chap. I, vers. 2.
226 Jean, I, 4.
227 I, 6.
228 Isaïe, XIV, 12.
229 Voir vol. 3 et 4.
STANCE III (7)
§ 7. – Vois, ô Lanou 230, l'Enfant Radieux des deux, la Gloire resplendissante sans pareille : l'Espace brillant, Fils de l'Espace Obscur, qui émerge des profondeurs des grandes Eaux Sombres. C'est OEAOHU, le plus jeune, le *** 231 (a). Il resplendit comme le Soleil. Il est le Dragon de Sagesse Flamboyant et Divin ; l'Eka 232 est Chatur et Chatur s'approprie Tri et l'Union produit le Sapta, en qui sont les Sept, qui deviennent le Tridasha 233, les Armées et les Multitudes (b). Vois-le, relevant le Voile et le déployant, de l'Orient à l'Occident. Il cache ce qui est en Dessus et laisse voir le Dessous comme la Grande Illusion. Il désigne leur place aux Etres Lumineux 234, change le dessus 235 en une Mer de Feu sans rivages (c), et l'Un Manifesté 236 en les Grandes Eaux. [I 50]
230 Le Lanou est un étudiant, un chélâ qui étudie l'Esotérisme pratique. 231 Que tu connais maintenant comme Kwan-Shaï-Yin. – Commentaire. 232 Eka est un, Chatour quatre, Tri trois et Sapta sept.
233 Tridasha ou Trente, trois fois dix en nombre rond, ou, pour mieux préciser, 33 – nombre sacré – se rapporte aux divinités védiques. Ce sont les Adityas, les 8 Vasus, les 11 Rudras et les 2 Ashwins, fils jumeaux du Soleil et du Ciel. C'est le nombre-racine du Panthéon hindou, qui compte 33 crores, c'est-à-dire 330 millions de dieux et déesses.
234 Les Etoiles.
235 L'Espace.
236 Elément.
(a) "L'Espace Brillant, Fils de l'Espace Obscur", correspond au Rayon tombé, à la première vibration de la nouvelle Aurore, dans les grands abîmes Cosmiques, d'où il ressort différencié comme "Oeaohu le plus jeune" (la "Nouvelle VIE") – pour devenir jusqu'à la fin du Cycle de Vie le Germe de toutes choses. C'est "l'Homme Incorporel qui contient en lui l'Idée Divine" – le générateur de la Lumière et de la Vie, pour nous servir d'une expression de Philon le Juif. On le nomme le "Dragon de Sagesse Resplendissant" parce que, d'abord, il est ce que les philosophes grecs nommaient le Logos, le Verbe de la Pensée Divine et, deuxièmement, parce que, dans la Philosophie Esotérique, cette première manifestation, étant la synthèse ou la somme de la Sagesse Universelle, Oeaohu – le "Fils du Soleil" – contient les Sept Armées Créatrices (les Séphiroth) et est ainsi l'essence de la Sagesse manifestée. "Celui qui se baigne dans la lumière d'Oeaohu ne sera jamais trompé par le voile de Mâyâ."
"Kwan-Shaï-Yin" est identique à l'Avalôkitéskvara sanscrit, et, comme tel, est une divinité androgyne, comme le Tetragrammaton et tous les Logoï de l'antiquité. Il n'est anthropomorphisé que par quelques sectes en Chine, et est représenté alors avec des attributs féminins 237 sous son aspect femelle, il devient Kwan-Yin, la Déesse de Miséricorde, appelée aussi "la Voix Divine" 238. Cette dernière est la divinité protectrice du Tibet et de l'île de Puto en Chine, où les deux divinités ont maint couvents 239. [I 51]
237 Aucun symbole religieux ne peut échapper à la profanation ou même à la dérision dans nos jours de politique et de science. Dans l'Inde du Sud l'auteur a vu un indigène converti faisant le pouja avec des offrandes devant une statue de Jésus vêtu en femme et avec un anneau dans le nez. A la demande, sur le sens de cette mascarade, on nous répondit que c'était Jésus-Marie en un seul et que c'était fait avec la permission des missionnaires, parce que le zélé converti n'avait pas les moyens d'acheter deux statues ou "idoles" comme les appela un témoin, hindou aussi, mais non converti. Si blasphématoire que cela puisse sembler à un chrétien dogmatique, le Théosophe et l'Occultiste doivent donner la palme de la logique à l'Hindou converti. Le Christos ésotérique est naturellement sans sexe, mais dans la Théologie exotérique il est masculin et féminin.
238 La Sophia gnostique, "la Sagesse", qui est la "mère" de l'Ogdoade (dans un certain sens, Aditi avec ses huit fils) est le Saint-Esprit et le Créateur de tout, comme dans les systèmes anciens. Le "Père" est une invention bien plus récente. Le premier Logos manifesté était partout féminin – la mère des sept pouvoirs planétaires.
239 Voir Chinese Buddhism, par le Révérend Joseph Edkins, qui donne toujours les faits corrects, quoique ses conclusions soient souvent erronées. Voir vol. 2, Partie 2, Section 15 : Sur Kwan-Shaï- Yin et Kwan-Yin.
[Les dieux les plus élevés, de l'antiquité sont toujours les "Fils de la Mère" avant de devenir les "Fils du Père". Les Logoï, comme Jupiter ou Zeus, fils de Kronos-Saturne, "le Temps Infini" (Kâla), étaient originairement représentés comme Mâles-femelles. Zeus est nommé la "belle Vierge", et Vénus est représentée barbue. Apollon était d'abord bisexuel comme l'est aussi Brahmâ-Vâch dans Manu et les Purânas. On peut changer Osiris et Isis l'un pour l'autre, et Horus est des deux sexes. Enfin, dans la vision de saint Jean, dans l'Apocalypse, le Logos, qu'on associe maintenant avec Jésus, est hermaphrodite, car on le décrit comme ayant des seins de femme. Il en est de même pour le Tétragrammaton = Jéhovah. Mais en Esotérisme, il y a deux Avalôkitéshvaras : le Premier et le Second Logos.]
(b) Le "Dragon de Sagesse" est l'Un, l' "Eka" ou Saka. Il est intéressant de remarquer que le nom de Jéhovah en Hébreu, est aussi Un, Achad. "Son nom est Achad", disent les Rabbins. Les Philologues devraient décider lequel des deux termes est dérivé de l'autre, au point de vue linguistique et symbolique ce n'est certes pas le sanscrit. "L'Un" et le "Dragon" sont des expressions dont les anciens se servaient en parlant de leurs Logoï respectifs. Jéhovah (en tant qu'Elohim) – ésotériquement parlant – est aussi le Serpent ou Dragon qui tenta Eve et le Dragon est un ancien glyphe pour la Lumière Astrale (Principe Primordial), "qui est la Sagesse du Chaos". La Philosophie archaïque ne reconnaissant ni le Bien ni le Mal comme pouvoir fondamental ou indépendant, mais prenant pour point de départ le TOUT Absolu (la Perfection Eternellement Universelle), nous montre ces deux forces comme les aspects de la pure Lumière qui se condense graduellement en forme et, de là, devient Matière, ou Mal. Ce fut le fait des ignorants Pères des débuts de l'Eglise de dégrader l'idée philosophique et hautement scientifique de cet emblème, pour en faire l'absurde superstition appelée le "Diable". Ils l'empruntèrent aux derniers zoroastriens qui voyaient, dans les Dévas hindous, des Diables ou le Mal, et le mot Evil 240 est devenu par une double transmutation D'Evil (Diabolos, Diable, Diavolo, Teufel). Mais les Païens ont toujours montré un discernement philosophique dans leurs symboles. C'est ainsi que le symbole primitif du serpent désignait la Sagesse et la Perfection divines, et a toujours représenté la Régénération et l'Immortalité psychiques. C'est pourquoi Hermès appelait le Serpent le plus spirituel de tous les êtres ; Moïse, initié dans la Sagesse d'Hermès, dit la même chose dans la Genèse ; le Serpent Gnostique, avec les sept voyelles [I 52] sur sa tête, était l'emblème des Sept Hiérarchies de Créateurs Septénaires ou Planétaires. De là, aussi, l'idée du Serpent hindou, Shésha ou Ananta, l' "Infini", un nom de Vishnou, dont il est le premier Vâhan ou Véhicule sur les Eaux Primordiales. [Comme les Logoï et les Hiérarchies de Pouvoirs, ces Serpents doivent pourtant être distingués l'un de l'autre. Shésha ou Ananta, la "Couche de Vishnou", est une abstraction allégorique, symbolisant le Temps infini dans l'Espace qui contient le Germe et en projette périodiquement l'efflorescence, l'Univers manifesté tandis que l'Ophis Gnostique contient le même symbolisme triple, dans ses sept voyelles que l'Oeaohu de la doctrine Archaïque, avec ses une, trois et sept syllabes, c.-à-d. le premier Logos non Manifesté, le Second ou Manifesté, le Triangle qui se concrétise dans le Quaternaire ou Tétragrammaton, et les Rayons de ce dernier sur le plan matériel.]
240 En anglais : le mal.
Les anciens firent, cependant, toujours une différence entre le bon et le mauvais Serpent (la Lumière Astrale des Kabalistes) – entre le premier, incorporation de la Sagesse divine, dans la région du Spirituel, et le second, le Mal, sur le plan de la Matière. [Car la Lumière astrale ou Ether des anciens Païens – le nom de Lumière Astrale est tout moderne – est Esprit-Matière qui, procédant du plan purement spirituel, devient plus grossier en descendant, jusqu'à constituer la Mâyâ ou le Serpent tentateur et trompeur sur notre plan.]
Jésus accepta le serpent comme synonyme de Sagesse, et cela forma une partie de son enseignement : "Soyez aussi sages que les serpents", dit- il. "Au Commencement, avant que la Mère devint Père-Mère, le Dragon Ardent se mouvait seul dans l'Infini 241." Le Aïtareya Brâhmana appelle la terre Sarparâjni, la "Reine-Serpent" et la "Mère de tout ce qui se meut" 242. Avant que notre globe devint ovoïde (et l'Univers aussi), "une longue traînée de poussière cosmique (ou brouillard de feu) s'agitait et se tordait comme un serpent dans l'Espace". "L'Esprit de Dieu se mouvant sur le Chaos" a été symbolisé, dans chaque nation, sous la forme d'un serpent ardent soufflant la flamme et la lumière sur les eaux primordiales, jusqu'à ce qu'il eût incubé la matière cosmique et lui eût fait prendre la forme annulaire d'un serpent se mordant la queue – ce qui symbolise, non seulement l'éternité et l'infini, mais aussi la forme globuleuse de tous les corps formés, dans l'Univers, par ce brouillard ardent. L'Univers, [I 53] la Terre et l'Homme rejettent périodiquement, comme fait le Serpent, leurs vieilles peaux, pour en prendre de nouvelles après un temps de repos. Le serpent n'est certes pas une image moins gracieuse ou moins poétique que la chenille ou la chrysalide d'où sort le papillon, emblème grec de Psyché, l'âme humaine ! Le "Dragon "fut aussi le symbole du Logos chez les Egyptiens, comme chez les Gnostiques. Dans le Livre d'Hermès, Pymandre, le plus ancien et le plus spirituel des Logoï du Continent occidental, apparaît à Hermès sous la forme d'un Dragon Ardent de "Lumière, de Feu et de Flamme". Pymandre, personnification de la "Pensée Divine", dit :
"La lumière c'est Moi : je suis Nous [le mental ou Manu] ; je suis ton Dieu, et je suis bien plus ancien que le principe humain qui s'échappe de l'ombre [les Ténèbres ou la Divinité cachée]. Je suis le germe de la pensée, le Verbe resplendissant, le Fils de Dieu. Tout ce qui voit et entend en toi, c'est le Verbe du Maître ; c'est la Pensée (Mahat) qui est Dieu, le Père 243. L'Océan céleste, l'Æther..., est le Souffle du Père, le principe qui donne la vie, la Mère, le Saint-Esprit... car ceux-ci ne sont pas séparés, et leur union est la Vie 244."
Nous trouvons ici l'écho évident de l'archaïque DOCTRINE SECRETE que nous exposons en ce moment. Seulement, cette dernière ne place pas à la tête de l'Evolution de la Vie le "Père", qui prend la troisième place et qui est le "Fils de la Mère", mais elle y place "le Souffle Eternel et Incessant du TOUT". Mahat (la Compréhension, le Mental Universel, la Pensée, etc.), avant de se manifester comme Brahmâ ou Shiva, apparaît comme Vishnou, dit la Sâmkhya Sâra245 ; il a donc plusieurs aspects, comme le Logos. Mahat est appelé le Seigneur, dans la Création Primaire, et il est, dans ce sens, la Cognition Universelle ou Pensée Divine mais "ce Mahat qui fut produit le premier est (plus tard) appelé Ego-isme, lorsqu'il est né comme (la sensation elle-même) ; "Moi" c'est là ce qu'on nomme la création seconde" 246. Et le traducteur (Brâhmane instruit et intelligent, non un Orientaliste européen) explique en note que (lorsque Mahat se développe en [I 54] la sensation de soi-conscience – Je – il prend le nom d'égoïsme", qui, traduit dans notre langage Esotérique, veut dire – lorsque Mahat est changé en Manas humain (ou même en celui des dieux finis) et revêt l'état d'Aham. On expliquera, plus loin (volume 2) pourquoi il est appelé le Mahat de la Création Secondaire(où la Neuvième, celle de Kumâra, dans le Vishnu-Purâna).
241 Livre de Sarparâjni.
242 [Voir Das Kaushitaki Brahmana (texte sanscrit) édité par B. Lindner. Ph. D., p. 132 (1887) et
Rigvedas Brahmanas, traduits par A. Berriedale Keith. D. Litt., p. 511, note 2 (1920).]
243 Par "Dieu, le Père", on veut certainement dire ici le septième principe dans l'Homme et dans le Kosmos, ce principe étant inséparable, dans son Essence et sa Nature, du septième principe Cosmique. Dans un sens, c'est le Logos des Grecs et l'Avalôkitéshvara des Bouddhistes ésotériques.
244 Voir The Divine Pymander, trad. Dr Everard (1660) et réédité par Hargrave Jennings (1884), pp. 8-9.
245 Edition de Fitzedward Hall, dans Bibliotheca Indica, p. 16.
246 Anugîtâ, ch. XXVI. Traduction de K.T. Télang, p. 333.
(c) La "Mer de Feu" est donc la Lumière Supra-Astrale (c.-à-d. nouménale), la première radiation de la Racine, Mûlaprakriti, la Substance Cosmique non Différenciée, qui devient la Matière Astrale. Elle est appelée aussi le "Serpent de Feu", comme on l'a déjà dit. Si l'étudiant veut bien se rappeler qu'il n'y a qu'Un Elément Universel qui est infini, non-né, ne mourant pas, et que tout le reste – comme dans le monde des phénomènes – n'est que des aspects variés, multiples, différenciés et transformés (ce qu'on appelle maintenant des corrélations) de cet Un, depuis les produits du macrocosme, jusqu'à ceux du microcosme, depuis les êtres surhumains jusqu'aux êtres humains et subhumains, en un mot la totalité de l'existence objective – alors la première et la plus grande difficulté disparaîtra, et la Cosmologie Occulte pourra être comprise 247.
Tous les Kabalistes et Occultistes, orientaux et occidentaux, reconnaissent (a) l'identité du "Père-Mère" avec l'Æther Primordial, ou Akasha (la Lumière Astrale) et (b) son homogénéité avant l'évolution du "Fils", le Fohat cosmique, car ce dernier est l'Electricité Cosmique. "Fohat durcit et éparpille les Sept Frères 248" ; ce qui veut dire que l'Entité Electrique Primordiale – car les Occultistes orientaux affirment que l'Electricité est une Entité – donne la vie par la force électrique, et sépare la substance primordiale ou la matière prégénétique en atomes qui sont eux-mêmes la source de toute vie et de toute conscience. "Il existe un agent unique Universel de toutes les formes et de la vie il s'appelle Od, Ob, et Aur 249, est actif et passif, positif et négatif, comme [I 55] le jour et la nuit : c'est la première lueur dans la Création" (Eliphas Lévi) – la première Lumière de l'Elohim primordial, l'Adam "mâle et femelle", ou (scientifiquement) l'ELECTRICITE ET LA VIE.
247 Ainsi, dans les Théogonies égyptienne et indienne, il y avait une Divinité Cachée, l'UN, et un dieu créateur Androgyne : Shu, le dieu de la création, et Osiris, qui, dans sa forme primaire originale, est le Dieu dont "le nom est inconnu". (Voir l'Abydos de Mariette, 11, 63, et 111, 413, 414, n° 1122.)
248. Livre de Dzyan, III.
249 Od est la Lumière pure qui donne la vie – le fluide magnétique Ob est le messager de la mort dont les sorciers se servent, le fluide néfaste ; Aur est la synthèse des deux, la vraie Lumière Astrale. Les Philologues peuvent-ils nous dire pourquoi Od – un terme dont Reichenbach s'est servi pour désigner le fluide vital – est aussi un mot Tibétain qui signifie lumière, éclat, brillance ? Dans un sens Occulte, il signifie aussi le "ciel". D'où vient la racine du mot ? D'autre part, Akâsha n'est pas exactement l'Ether, mais quelque chose de bien plus élevé, comme on le démontrera.
Les anciens le représentaient par un serpent, car "Fohat siffle en se glissant çà et là", en zigzags. La Kabalele désigne par la lettre hébraïque Teth, ט, dont le symbole est le serpent qui joua un rôle si important dans les Mystères. Sa valeur universelle est neuf, car c'est la neuvième lettre de l'alphabet et la neuvième des cinquante portes qui mènent aux mystères cachés de l'être. C'est l'agent magique par excellence, et spécifie, dans la philosophie Hermétique, "la Vie infusée dans la Matière Primordiale", l'essence qui compose toutes choses, et l'esprit qui détermine leur forme. Mais il y a deux opérations hermétiques secrètes : l'une spirituelle, l'autre matérielle-corrélative et à jamais unies. Comme le dit Hermès :
"Tu sépareras la terre du feu, le subtil de l'épais... ce qui monte de la terre au ciel et redescend du ciel sur la terre. Cela [la lumière subtile] est la force de toute force, car cela conquiert toute chose subtile, et pénètre tout solide. Ainsi fut formé le Monde."
Zénon, le fondateur des Stoïciens, ne fut pas seul à enseigner que l'Univers évolue, et que sa substance primaire est changée de l'état de feu en celui d'air, puis en celui d'eau, etc. Héraclite d'Ephèse maintint que l'unique principe sous-jacent à tout phénomène dans la Nature est le feu. L'intelligence qui met l'Univers en mouvement est le feu, et le feu est de l'intelligence. Et tandis qu'Anaximène dit la même chose de l'air, et Thalès de Milet (600 avant J.-C.) de l'eau, la Doctrine Esotérique réconcilie tous ces philosophes, en démontrant que, quoique chacun séparément ait raison, aucun de leurs systèmes n'est complet.
STANCE III (8)
§ 8. – Où était le Germe, où étaient alors les Ténèbres ? Où est l'Esprit de la Flamme qui brûle dans ta Lampe, ô Lanou ? Le germe est Cela, et Cela est la Lumière, le Blanc et Brillant Fils du Père Obscur et Caché. [I 56]
La réponse à la première question, suggérée par la seconde, qui est la réponse de l'instructeur à l'élève, contient, dans une seule phrase, une des vérités les plus essentielles de la Philosophie Occulte. Il indique l'existence de choses imperceptibles à nos sens physiques, choses qui sont bien plus importantes, bien plus réelles et bien plus permanentes que celles qui font appel à ses sens. Avant que le Lanou puisse espérer comprendre le problème de métaphysique transcendantale contenu dans la première question, il doit être capable de répondre à la seconde, et la réponse qu'il donnera à la seconde lui fournira l'indice pour trouver la réponse exacte de la première.
Dans le Commentaire sanscrit de cette STANCE, les termes employés pour le Principe caché et non révélé sont nombreux. Dans les premiers manuscrits de la littérature indienne, cette Divinité Abstraite et non Révélée n'a pas de nom. On l'indique ordinairement par "Cela" (en sanscrit, Tad), mot qui signifie tout ce qui est, fut, sera, ou ce qui peut être ainsi conçu par le mental humain.
Parmi ces appellations qui ne sont naturellement données que par la Philosophie Esotérique – expressions telles que "Ténèbres Insondables", "Tourbillon", etc. – se trouve aussi celle de "Cela du Kâlahamsa", "Kala- ham-sa" et même "Kâli-Hamsa" (Cygne Noir). Ici m et n sont interchangeables et tous deux ont le son nasal des syllabes françaises an ou am 250. Il arrive dans le Sanscrit, comme dans la Bible en Hébreu, que bien des noms mystérieux et sacrés ne disent pas plus à l'oreille profane qu'un mot quelconque, vulgaire même, parce que ces mots sont cachés par anagramme ou autrement. Le mot Hansa, ou Hamsa, en est un exemple. Hamsa est semblable à "A-ham-sa", trois mots qui signifient "Je suis Lui", tandis que, divisé d'une autre façon, on peut y lire "Sô-hain", "Lui [est] moi" – Soham équivalant Sah, "lui" et aham "Je" ou "Je suis lui". Dans ce seul mot est contenu, pour celui qui comprend le langage de la sagesse, le mystère universel, la doctrine de l'identité de l'essence de l'homme avec l'essence de dieu. De là, le glyphe et l'allégorie de Kâlahansa (ou Hamsa), et le nom donné à Brahman (neutre) et, plus tard, au Brahmâ mâle de Hamsa-Vâhana, "celui qui se sert de Hamsa comme véhicule". On peut lire aussi le même mot "Kâlaham-sa", ou "Je suis Moi", dans aussi l'éternité du temps, ce qui correspond à la phrase Biblique, ou plutôt Zoroastrienne, "Je suis ce que Je suis". La même doctrine se trouve dans la Kabale, comme en témoigne la [I 57] citation suivante d'un manuscrit non publié de M. S. Liddell McGregor Mathers, l'érudit kabaliste :
On se sert des trois pronoms,
ינא
,התא
,אוה, Hua, Ateh,
Ani – Il, Tu, Je – pour symboliser les idées de Macroposope et de Microposope dans la Qabale hébraïque. Hua, "Il", s'applique au Macroposope caché ; Ateh, "Tu", au Microposope, et Ani, "Je", à ce dernier, lorsqu'on le représente comme parlant. (Voir Lesser Holy Assembley, 204 et seq.). Il est à noter que chacun de ces noms comprend trois lettres Aleph א, A, forme la fin du premier mot, Hua, et le commencement de Ateh et de Ani, comme si c'était le lien entre eux. Mais Aleph, א, est le symbole de l'Unité et, par conséquent, de l'Idée invariable du Divin opérant à travers ces lettres. Derrière Aleph, א, dans Hua, sont les lettres Vau, ו, et Hé, ה, symbole des nombres Six et Cinq, le Mâle et la Femelle, l'Hexagramme et le Pentagramme. Et les nombres de ces trois mots, Hua, Ateh, Ani sont 12, 406 et 61, nombres résumés dans les nombres-clefs 3, 10 et 7, par la Qabale des Neuf Chambres, qui est une forme de la règle exégétique de Temura.
Il est inutile d'essayer d'expliquer entièrement ce mystère. Les matérialistes et les hommes de la Science moderne ne le comprendront jamais, puisque, pour en obtenir une perception claire, on doit, d'abord, admettre le postulat d'une Divinité éternelle, omniprésente et universellement répandue dans la Nature ; ensuite, avoir sondé le mystère de l'électricité dans sa véritable essence et, en troisième lieu, admettre que l'homme est le symbole septénaire, sur le plan terrestre, de la Seule Grande Unité, le Logos, qui est lui-même le signe aux sept voyelles, le Souffle cristallisé dans le Verbe 251. Celui qui croit à tout cela doit aussi croire à la combinaison multiple des sept planètes de l'Occultisme et de la Kabaleavec les douze signes du Zodiaque et attribuer, comme nous le faisons, à chaque planète et à chaque constellation une influence, qui, ainsi que le dit Ely Star (Occultiste français), "lui est propre, bonne ou mauvaise, et cela, selon l'esprit planétaire qui la gouverne, lequel, à son tour, est capable d'influencer les hommes et les choses qui se trouvent en harmonie avec lui, et avec qui il a des affinités." Pour ces raisons [I 58] et puisque peu de personnes croient en ce qui précède, tout ce qu'on peut dire maintenant, c'est que, dans les deux cas, le symbole de Hansa (que ce dernier soit Je, Lui, Oie ou Cygne) est un symbole important, représentant, par exemple, la Sagesse Divine, la Sagesse dans les Ténèbres au-delà de la portée des hommes. Pour tous les usages exotériques, Hansa, comme le sait chaque Hindou, est un oiseau fabuleux qui (dans l'allégorie), lorsqu'on lui offrait du lait mêlé à de l'eau, séparait les deux, buvait le lait et laissait l'eau, montrant ainsi une sagesse particulière – le lait représente symboliquement l'esprit, et l'eau la matière.
251 C'est encore semblable à la doctrine de Fichte et des Panthéistes allemands. Le premier vénère Jésus comme le grand instructeur qui insista sur l'unité de l'esprit de l'homme avec l'Esprit-Dieu ou Principe Universel (doctrine Advaïta). Il est difficile de trouver une seule spéculation dans la métaphysique de l'Occident qui n'ait pas été anticipée par la Philosophie Orientale archaïque. Depuis Kant jusqu'à Herbert Spencer, c'est presque toujours plus ou moins un écho déformé des doctrines Dvaïta, Advaita et Védântines.
Que cette allégorie soit très ancienne, et date d'une des première périodes archaïques, se voit à la façon dont on parle, dans la Bhâgavata Purâna, d'une certaine caste nommée Hamsa, ou Hansa, et qui était la "seule caste" par excellence, lorsque, bien loin en arrière, dans les brumes d'un passé oublié, il n'y avait, chez les Hindous, "qu'Un Véda, Une Divinité et Une Caste". Il y a aussi une partie de l'Himâlaya nommée Hamsa, décrite dans les vieux livres comme étant située au nord du mont Mérou, et reliée à certains épisodes appartenant à l'histoire des initiations et des mystères religieux. Quant à ce que Kâlahansa soit, comme le disent les textes exotériques et les traductions des Orientalistes, le Véhicule de Brahmâ-Prajâpati, c'est une erreur. Brahman le neutre est appelé par eux Kâla-Hansa, et Brahmâ le Mâle, Hansa-Vâhana, parce que, sans doute, "son véhicule est un cygne ou une oie" 252. C'est purement une glose exotérique. Esotériquement et logiquement, si Brahman, l'infini, est tout ce que les Orientalistes dépeignent, et en accord aussi avec les textes védântins, c'est-à-dire une divinité abstraite, nullement caractérisée par des attributs humains, si l'on soutient, en même temps, qu'il est appelé Kâla- Hansa – comment peut-il devenir le Vâhan dé Brahmâ, dieu fini et manifesté ? C'est juste le contraire. Le "Cygne ou l'Oie" (Hansa) est le symbole de la divinité mâle ou temporaire, Brahmâ, l'émanation du Rayon primordial et sert de Vâhan ou Véhicule pour ce Rayon Divin, qui, sans cela, ne pourrait pas se manifester dans l'Univers puisque, par antiphrase, il est lui-même une émanation des Ténèbres – du moins pour notre intelligence humaine. C'est Brahmâ, alors, qui est Kâlahansa, et le Rayon est Hansa-Vâhana.
252 Comparez avec le Dictionary of Hindu Mythology de Dowson, p. 57.
Quant à l'étrange symbole ainsi choisi, il est aussi très suggestif ; sa véritable signification mystique c'est l'idée d'une Matrice Universelle, figurée par les Eaux Primordiales de [I 59] l'Abîme ou l'ouverture pour la réception, et, plus tard, pour la sortie de ce Rayon Unique (le Logos) qui contient en lui les Sept autres Rayons ou Pouvoirs Procréateurs (les Logoï ou Constructeurs). C'est de là que vient le choix, comme symbole, par les Rose-Croix, de l'oiseau aquatique – que ce soit le cygne ou le pélican 253 – avec ses sept petits comme symbole modifié et adapté aux religions de tout pays. Le Livre des Nombres donne le nom de 254 Ain Soph à "l'Ame Ardente du Pélican". Apparaissant avec chaque Manvantara, comme Nârâyana, ou Svâyambhuva, le Soi-Existant, et pénétrant dans l'Œuf du Monde, il en sort à la fin de l'incubation divine comme Brahmâ, ou Prajâpati, le progéniteur de l'Univers futur dans lequel il s'épand. Il est Purusha (Esprit), mais il est aussi Prakriti (Matière). Donc, ce n'est qu'après s'être séparé en deux moitiés – Brahmâ-Vâch (la femelle) et Brahmâ-Virâj (le mâle) – que le Prajâpati devient le Brahmâ mâle.
253 Que l'espèce de l'oiseau soit cygnus, anser ou pelicanus, cela ne fait rien, du moment que c'est un oiseau aquatique nageant ou flottant sur les eaux, comme l'Esprit, et sortant ensuite de ces eaux pour donner naissance à d'autres êtres. La vraie signification du symbole du Dix-huitième Degré des Rose-Croix c'est précisément cela, bien que, plus tard, on l'ait poétiquement transformée en le sentiment maternel du pélican déchirant son flanc pour nourrir de son sang ses sept petits.
254 La raison pour laquelle Moïse défend qu'on mange le pélican et le cygne (Deutéronome, XIV, 16, 17), et classe ces deux oiseaux parmi les animaux impurs, tandis qu'il permet de manger "le scarabée et les sauterelles de toute espèce" (Lévitique, XI, 22), est purement physiologique, et ne se rapporte à la symbologie mystique qu'en ce que le mot "impur", comme tout autre mot, ne doit pas être pris dans son sens littéral, car il est ésotérique comme tout le reste et peut signifier aussi bien "sacré" que le contraire. C'est un "voile", particulièrement suggestif dans le cas de certaines superstitions – chez les Russes, par exemple, qui ne mangent pas le pigeon, non parce qu'il est "impur", mais parce qu'on dit que le "Saint-Esprit" est apparu sous la forme d'une colombe. Voir vol. 2, 2ème Partie, Section 5. Sur la Divinité Cachée, ses Symboles et ses Glyphes.
STANCE III (9)
§ 9. – La Lumière est la Flamme Froide, et la Flamme est le Feu, et le Feu produit la Chaleur qui donne l'Eau – l'Eau de la vie dans la Grande Mère255.
255 Le Chaos.
Il faut se rappeler que les mots "Lumière", "Flamme" et "Feu" ont été adoptés par les traducteurs du vocabulaire [I 60] des vieux "Philosophes du Feu" 256, afin de rendre plus clairement la signification des termes et symboles archaïques employés dans l'original. Sinon, ils auraient été entièrement incompréhensibles au lecteur européen. Pour un étudiant de l'Occulte, cependant, ces termes seront suffisamment clairs.
256 Pas les Alchimistes du moyen âge, mais les Mages et Adorateurs du Feu, à qui, Rose-Croix ou Philosophes per ignem, successeurs des Théurgistes, empruntèrent toutes leurs idées au sujet du Feu, comme élément mystique et divin.
La "Lumière", la "Flamme", le "Froid", le "Feu", la "Chaleur", l' "Eau" et l' "Eau de Vie" sont tous, sur notre plan, les rejetons ou, comme dirait un Physicien moderne, les corrélations de l'ELECTRICITE. Mot puissant, et symbole encore plus puissant ! Générateur sacré d'une progéniture non moins sacrée : du Feu, créateur, conservateur, destructeur de la Lumière, essence de nos ancêtres – divins de la Flamme, âme des choses. L'Electricité, c'est-à-dire la VIE Unie, sur l'échelon le plus élevé de l'Etre, et le Fluide Astral, l'Athanor des Alchimistes, sur le plus bas ; DIEU et le DIABLE, le BIEN et le MAL...
Pourquoi, maintenant, appelle-t-on dans les STANCES la Lumière la "Flamme Froide" ? Parce que, dans l'ordre de l'Evolution Cosmique (comme l'enseignent les Occultistes), l'énergie qui actionne la matière, après sa primitive formation en atomes, est générée sur notre plan par la Chaleur Cosmique : et parce que, avant cette période, le Kosmos, pris au sens de matière dissociée, n'était pas. La première Matière primordiale éternelle, coexistante à l'Espace, "qui n'a ni commencement ni fin, [n'est] ni chaude ni froide, mais possède une nature propre spéciale", dit le Commentaire. La chaleur et le froid sont des qualités relatives, et appartiennent au domaine des mondes manifestés, qui procèdent tous de l'Hylé manifesté ; ce dernier, dans son aspect absolument latent, est désigné sous le titre de "Vierge-Froide", et, lorsqu'il est réveillé à la vie, reçoit le titre de "Mère". Les anciens mythes des cosmogonies occidentales disent qu'au commencement il n'y avait que le brouillard froid (le Père) et la boue prolifique (la Mère, Ilus ou Hylé), d'où sortit le Serpent du Monde (la Matière) 257. La Matière Primordiale, donc, avant qu'elle sorte du plan de ce qui ne se manifeste jamais, et qu'elle se réveille à l'action vibratoire sous l'impulsion de Fohat, n'est qu'un "rayonnement froid, sans couleur, sans goût, dépourvu de qualité et d'aspect". Et ses premiers-nés sont de même – les "Quatre fils" qui "sont Un, et deviennent Sept" – les Entités dont les qualifications et les noms servirent [I 61] aux anciens Occultistes orientaux pour nommer quatre des sept "Centres de Force" primaires, ou atomes, qui se développent plus tard en les grands "Eléments" Cosmiques actuellement répartis dans les soixante-dix et quelques sous-éléments connus de la Science moderne. Les quatre "Natures Primaires" des premiers Dhyân-Chôhans sont appelées (faute de meilleurs noms) Akâshique, Ethérée, Aqueuse et Ignée, expressions correspondant, dans la terminologie de l'Occultisme pratique, à des définitions scientifiques de gaz qui – pour être compris à la fois des Occultistes et du public ordinaire – doivent être nommés Parabydrogéniques 258, Paraoxycréniques, Oxyhydrogéniques et Ozoniques ou peut-être Nitrozoniques (qui sont, en Occultisme, supra-sensibles, quoique atomiques), qui possèdent leur maximum d'activité lorsqu'elles œuvrent sur le plan d'une matière plus grossièrement différenciée. Ces éléments sont, à la fois, électropositifs et électronégatifs. [Chacun d'eux, et bien d'autres encore, sont probablement les liens manquants de la Chimie. Dans l'Alchimie et chez les Occultistes pratiques, ils sont connus sous d'autres noms. C'est en combinant et recombinant, ou dissociant les "Eléments" à l'aide du Feu Astral, qu'on produit les plus grands phénomènes.]
257 Isis Unveiled, vol. 1, p. 146.
STANCE III (10)
§ 10. – Le Père-Mère tisse une Toile, dont l'extrémité supérieure est attachée à l'Esprit 259 – la Lumière des Ténèbres-Unes – et l'extrémité inférieure à son ombre, la Matière 260. Cette toile est l'Univers, tissé avec les Deux Substances combinées en Une, qui est Svabhâvat.
258 "Para", au sens de au-delà, en dehors.
259 Purusha.
260 Prakriti.
261 I-1-7.
Dans la Mândukya Upanishad261, il est écrit : "Comme une araignée étend et retire sa toile, comme les plantes surgissent de terre... de même, l'Univers est dérivé de Celui qui n'a pas de déclin", Brahmâ, car le "Germe des Ténèbres inconnues" est la matière dont tout évolue et se développe, "comme la toile vient de l'araignée et l'écume de l'eau", etc. Ce n'est expressif et vrai que si le terme Brahmâ, le "Créateur", est dérivé de la racine Brih, augmenter ou s'étendre. Brahmâ s' "étend" et devient l'Univers tissé de sa propre substance. [I 62]
La même idée a été bien exprimée par Gœthe lorsqu'il dit :
"Ainsi je travaille au rouet du Temps. Et je tisse pour Dieu le vêtement sous lequel tu Le vois."
STANCE III (11)
§ 11. – Cette toile s'étend lorsque le Souffle de feu 262 la couvre ; elle se contracte lorsque le Souffle de la Mère 263 la touche. Alors, les Fils 264 se séparent et se dispersent, pour rentrer dans le sein de leur Mère à la fin du Grand Jour et redevenir un avec elle. Lorsqu'elle 265 se refroidit, elle devient rayonnante. Ses Fils se gonflent et se contractent dans leur propre Soi et par leur Cœur ils embrassent l'Infini.
262 Le Père.
263 La Racine de la Matière.
264 Les Eléments avec leurs Pouvoirs ou Intelligences respectifs.
265 La Toile.
L'expansion de l'Univers sous le "Souffle du FEU" est très suggestive si on la considère à la lumière de la période du "brouillard de Feu" dont la science moderne parle tant et dont, en réalité, elle sait si peu.
Une grande chaleur sépare les éléments composés et résout les corps célestes en leur Elément Primordial Unique – voilà ce qu'explique le Commentaire :
"Du moment qu'un corps, mort ou vivant, s'est décomposé en ses constituants de base, en se mettant dans la zone d'attraction et d'action d'un foyer ou centre de chaleur (énergie) – et plusieurs de ces centres sont promenés çà et là dans l'espace – ce corps est réduit en vapeur et gardé dans le "Sein de la Mère" jusqu'à ce que Fohat, recueillant quelques-unes des parcelles de la Matière Cosmique (nébuleuse), lui donne une impulsion, le mette de nouveau en mouvement, développe la chaleur nécessaire, et le laisse suivre sa nouvelle croissance."
L'expansion et la contraction de la "Toile" – c'est-à-dire l'étoffe ou atomes dont est fait le Monde – exprime ici le mouvement de pulsation car c'est la contraction et l'expansion régulières de l'Océan infini et sans rivage de ce que nous pouvons appeler le noumène de la Matière, émané par Svabhâvat qui est la cause de la vibration universelle des atomes. [I 63] Mais cela suggère autre chose aussi. Cela montre que les anciens savaient ce qui intrigue de nos jours beaucoup de Savants, et surtout beaucoup d'Astronomes – la cause de la première ignition de la matière ou étoffe dont est composé le monde, le paradoxe de la chaleur produite par la contraction réfrigérante, et autres énigmes cosmiques – car cela démontre, à ne pas s'y méprendre, que les anciens avaient la connaissance de ces phénomènes. "Il y a, dans chaque atome, la chaleur interne et la chaleur externe", disent les Commentaires manuscrits dont l'auteur a eu communication : "le Souffle du Père [Esprit] et le Souffle [ou Chaleur] de la Mère [Matière]" et ces documents donnent des explications qui montrent que la théorie moderne de l'extinction des feux solaires, conséquence de la perte de chaleur due à la radiation, est erronée. Les savants eux-mêmes conviennent de la fausseté de l'assertion, car, ainsi que le fait remarquer le Professeur Newcomb 266, "en perdant sa chaleur un corps gazeux se contracte, et la chaleur générée par la contraction dépasse celle qu'il a eue à perdre pour produire la contraction". Ce paradoxe qu'un corps devient plus chaud à mesure que la contraction produite par le refroidissement devient plus grande a été la cause de bien des discussions. On a prétendu, en effet, que l'excès de chaleur se perd par radiation et que déclarer que cette température ne s'abaisse pas pari passu avec la diminution de volume, sous une pression constante, c'est abolir la loi de Charles 267. Il est vrai que la contraction développe de la chaleur mais la contraction (causée par le refroidissement) n'est capable ni de développer la quantité de chaleur existant à un moment donné dans la masse, ni même de maintenir un corps à une température constante, etc. Le professeur Winchell essaie d'expliquer le paradoxe – paradoxe qui n'est qu'apparent, comme le démontre J. Homer Lane 268 – en suggérant qu'il existe "quelque chose en dehors de la chaleur". "Ne serait-ce pas, dit-il, tout simplement une répulsion entre les molécules, qui varierait selon une loi des distances 269 ?" Mais l'accord ne pourra se faire que si ce "quelque chose qui existe en dehors de la chaleur" est appelé "la Chaleur sans Cause", le "Souffle de Feu", la Force omnicréatrice plus l'INTELLIGENCE ABSOLUE ; ce qui est peu probable que la Science physique accepte. [I 64]
Quoi qu'il en soit, la lecture de cette STANCE montre que, malgré sa phraséologie archaïque, elle est plus scientifique que la Science moderne elle-même.
266 Popular Astronomy, pp. 507-508.
267 Nébular Theory (Winchell).
268 American Journal of Science, juillet 1870.
269 World-Life or Comparative Geology, par Alexander Winchell LL. D., page 85 (1883).
STANCE III (12)
§ 12. – Alors Svabhâvat envoie Fohat pour durcir les Atomes. Chacun 270 est en partie de la Toile 271. Réfléchissant le "Seigneur Existant par Lui-même 272" comme un Miroir, chacun devient, à son tour, un Monde 273.
270 Des atomes.
271 L'Univers.
272 La Lumière primordiale.
273 Ceci se dit parce que la flamme d'un feu quelconque est en elle-même inépuisable, et que l'on pourrait allumer les Lumières de tout l'Univers à une simple veilleuse, sans en diminuer la flamme.
Fohat durcit les Atomes, c.-à-d. en leur infusant de l'énergie, il disperse les "Atomes", ou Matière Primordiale. "Il se disperse lorsqu'il disperse la Matière en Atomes" (Commentaires manuscrits).
C'est par le moyen de Fohat que les idées du Mental Universel sont imprimées sur la Matière. On peut avoir une faible idée de la nature Fohat en l'appelant "l'Electricité Cosmique", comme on le fait quelquefois ; mais il faut alors ajouter d'autres attributs à ceux qui sont ordinairement reconnus à l'électricité : y compris l'intelligence. Il est intéressant de noter que la Science moderne vient enfin de reconnaître que toute activité cérébrale est accompagnée de phénomènes électriques 274.
274 Pour plus de détails sur Fohat, voir STANCES et commentaires.