SECTION XXXVIII
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ASTROLOGIE ET ASTROLATRIE
Les ouvrages d'Hermès Trismégiste renferment le sens exotérique, encore voilé pour tous, sauf pour les Occultistes, de l'Astrologie et de l'Astrolâtrie des Khaldi [Chaldée]. Les deux sujets ont d'étroits rapports entre eux. L'Astrolâtrie, ou adoration de la légion céleste, est le résultat naturel de l'Astrologie qui n'est qu'à demi révélée et dont les Adeptes ont soigneusement caché, aux masses non initiées, les principes Occultes, ainsi que la sagesse qui leur avait été communiquée par les Régents des Planètes – les "Anges". D'où la divine Astrologie pour les Initiés ; la superstitieuse Astrolâtrie pour les profanes. Saint Justin l'affirme :
Depuis l'invention des hiéroglyphes, ce ne fut pas le vulgaire, mais ce furent les hommes distingués et choisis qui furent initiés, dans le secret des temples, à la science de tous les genres d'Astrologie – même du genre le plus abject : cette Astrologie qui s'est trouvée plus tard prostituée dans les voies publiques.
Il y avait une énorme différence entre la Science Sacrée enseignée par Pétosiris et Nécepso – les premiers Astrologues que mentionnent les manuscrits égyptiens et que l'on croit contemporains du règne de Ramsès II (Sésostris) 48 – et le misérable charlatanisme des empiriques appelés Chaldéens, qui dégradèrent le Savoir Divin sous les derniers Empereurs de Rome. De fait on pourrait à juste titre définir ces deux genres comme "haute Astrologie cérémonielle" et "Astrolâtrie astrologique". La première dépendait de la connaissance qu'avaient les Initiés des Forces immatérielles (pour nous) ou Entités Spirituelles qui affectent la matière et la dirigent. Appelées par les anciens philosophes les Archontes [VI 27] et les Cosmocratores, elles constituaient les types ou paradigmes, sur les plans supérieurs, des êtres inférieurs et plus matériels sur l'échelle de l'évolution, que nous appelons des Elémentals et des Esprits de la Nature devant lesquels s'inclinaient les Sabéens et auxquels ils vouaient un culte, sans en soupçonner la différence essentielle. De là vient que l'Astrolâtrie astrologique, lorsqu'elle n'était pas un simple prétexte, ne dégénérait que trop souvent en Magie noire. C'était la forme favorite de l'Astrologie populaire ou exotérique, entièrement ignorante des principes apotélesmatiques de la Science primitive, dont les doctrines n'étaient communiquées qu'à l'Initiation. Aussi, tandis que les véritables Hiérophantes s'élevaient comme des Demi-Dieux jusqu'au sommet même du savoir spirituel, les hoi polloi, parmi les sabéens, se vautraient, se plongeaient dans la superstition – il y a dix mille ans comme aujourd'hui – dans l'ombre froide et mortelle des vallées de la matière. L'influence sidérale est double. Il y a l'influence physique et physiologique, celle de l'exotérisme ; et la haute influence spirituelle, intellectuelle et morale que confère la connaissance des Dieux planétaires. Bailly, parlant avec une connaissance très imparfaite de la première influence, appelait, déjà au XVIIIème siècle, l'Astrologie "la très folle mère d'une fille très sage" – l'Astronomie. D'autre part, Arago, une des lumières du XIXème siècle, soutient la réalité de l'influence sidérale du Soleil, de la Lune et des Planètes. Il pose cette question :
Où trouverons-nous l'influence lunaire réfutée par des arguments que la science oserait avouer ?
Mais Bailly lui-même, après avoir cru confondre l'Astrologie telle qu'elle est publiquement pratiquée, n'ose pas en faire autant pour la véritable Astrologie. Il dit :
L'Astrologie judiciaire était, à ses débuts, le résultat d'un Système profond, l'œuvre d'une nation éclairée, s'aventurant à vouloir trop pénétrer les mystères de Dieu et de la Nature.
Un savant d'une époque plus récente, membre de l'Institut de France et professeur d'Histoire, Ph. Lebas, découvre (inconsciemment) la source même de l'Astrologie, dans l'article plein d'érudition qu'il écrit sur ce sujet pour le Dictionnaire Encyclopédique de France. Il comprend bien, dit-il à ses lecteurs, que l'adhésion à cette Science de tant d'hommes d'intelligence élevée, constituerait par elle-même une raison suffisante pour admettre que l'Astrologie n'est pas tout entière une folie. [VI 28]
48 Sésostris, ou le Pharaon Ramsès II dont la momie fut découverte en 1886 par Maspéro, Directeur du Musée de Boulak ; et qui est reconnu comme le plus grand roi de l'Egypte et dont le petit-fils, Ramsès III, fut le dernier roi d'un antique royaume.
Alors que nous proclamons, en politique, la souveraineté du peuple et de l'opinion publique, pouvons-nous admettre, comme on le faisait jusqu'à présent, que l'humanité se laissa radicalement tromper sur ce seul point : qu'une absurdité grossière et absolue dominait les cerveaux des peuples entiers pendant tant de siècles, sans avoir d'autre base que – d'une part l'imbécillité humaine et de l'autre le charlatanisme ? Comment, durant cinquante siècles et plus, la plupart des hommes auraient- ils pu être des dupes ou des fripons ?... Même si nous nous trouvons dans l'impossibilité de reconnaître et de séparer les réalités de l'Astrologie, d'avec les éléments dus à l'invention et aux vaines rêveries... n'en répétons pas moins avec Bossuet et tous les philosophes modernes, que "rien de ce qui a dominé ne peut être absolument faux". N'est-il pas vrai, en tous cas, qu'il existe une réaction physique des planètes entre elles ? N'est-il pas encore vrai que les planètes exercent une influence sur l'atmosphère et, par suite, une action au moins intermédiaire sur la végétation et les animaux ? La science moderne n'a-t-elle pas démontré ces deux faits de façon à ne plus laisser subsister le moindre doute ?... Serait-il moins vrai que la liberté d'action des hommes n'est pas absolue : que tout, les planètes et le reste, enchaîne chaque volonté individuelle et pèse sur elle ; que la Providence [ou Karma] agit sur nous et dirige les hommes dans les rapports qu'elle a établis entre eux et les objets visibles, l'univers tout entier ?... L'Astrolâtrie, dans son essence, n'est pas autre chose que cela ; nous sommes obligés de reconnaître qu'un instinct, supérieur à l'époque à laquelle ils vivaient, a dirigé les efforts des anciens Mages. Quant à l'accusation de matérialisme et d'annihilation de la liberté morale de l'homme que Bailly lance contre leur théorie (l'Astrologie), c'est un reproche qui n'a aucun sens. Tous les grands Astrologues, sans une seule exception, admettaient que l'homme pouvait réagir contre l'influence des étoiles. Ce principe est établi dans le Tetrabiblos de Ptolémée, véritables Ecritures Astrologiques, dans les chapitres II et III du premier volume 49.
Thomas d'Aquin avait corroboré les dires de Lebas par anticipation ; il avait dit :
Les corps célestes sont la cause de tout ce qui se produit dans ce monde sublunaire, ils agissent indirectement sur les actions humaines ; mais tous les effets qu'ils produisent ne sont pas inévitables 50.
Les Occultistes et les Théosophes sont les premiers à reconnaître qu'il y a une Astrologie blanche et une Astrologie [VI 29] noire. Néanmoins, l'Astrologie doit être étudiée sous ses deux aspects par ceux qui désirent y exceller et les résultats, bons ou mauvais, que l'on obtient, ne dépendent pas des principes, qui sont les mêmes dans les deux genres, mais de l'Astrologue lui-même. Ainsi Pythagore, qui établit tout le système de Copernic, grâce aux Livres d'Hermès, 2.000 ans avant la naissance du prédécesseur de Galilée, découvrit et étudia dans ces livres toute la Science de la Théogonie divine, des communications avec les Recteurs du monde – les Princes et les "Principautés" de saint Paul – et de leur évocation, de la nativité de chaque Planète et de l'Univers lui-même, des formules d'incantations et de la consécration de chaque partie du corps humain au signe zodiacal auquel elle correspond. Tout cela ne peut être considéré comme puéril et absurde – encore moins comme "diabolique" – sauf par ceux qui sont, et veulent demeurer, des apprentis en ce qui concerne la Philosophie des Sciences Occultes. Aucun penseur véritable, aucun de ceux qui reconnaissent la présence d'un lien commun entre l'homme et la Nature, tant visible qu'invisible ne consentirait à voir dans les reliques de la Sagesse Archaïque – comme, par exemple, le Papyrus de Petemenoph – "un enfantillage dépourvu de sens et une absurdité", ainsi que l'ont fait tant d'Académiciens et de Savants. Mais, en découvrant dans de tels documents anciens l'application des règles et de lois hermétiques comme la consécration des cheveux de quelqu'un au Nil céleste ; celle de sa tempe gauche à l'Esprit vivant du Soleil et de sa tempe droite à l'esprit d'Ammon, il s'efforcera d'étudier et de mieux comprendre les "lois de correspondances". Il ne refusera pas non plus de croire à l'antiquité de l'Astrologie, sous prétexte que certains Orientalistes ont jugé à propos de déclarer que le Zodiaque n'était pas très ancien, car ce n'était qu'une invention des Grecs de la période macédonienne. En effet, cette affirmation, outre qu'un bon nombre d'autres raisons en ont établi le caractère erroné, peut être complètement réduite à néant par des faits qui se rattachent aux dernières découvertes opérées en Egypte et par une traduction plus exacte des hiéroglyphes et des inscriptions des premières dynasties. Les polémiques qui ont été publiées au sujet du contenu de ce que l'on appelle les Papyrus "Magiques" de la collection Anastasi, indiquent l'antiquité du Zodiaque. Comme le disent les Lettres à Letronne, les papyrus parlent longuement des quatre bases ou fondations du monde, sur l'identité desquelles, suivant Champollion, il est impossible de se tromper, car on est forcé de reconnaître en elles les Piliers du Monde de saint Paul. Ce sont eux qui sont invoqués avec les dieux de toutes les zones célestes qui sont, encore une fois, tout à fait analogues aux Spiritualia nequitiae in cælestibus du même Apôtre 51.
Cette invocation était faite dans les propres termes... de la formule reproduite bien trop fidèlement par Jamblique, pour qu'il soit possible de lui refuser plus longtemps le mérite d'avoir transmis à la postérité l'antique et primitif esprit des Astrologues égyptiens 52.
51 "Les principautés et les Puissances [nées] dans des lieux célestes" (Ephes, III, 10). Le verset : "Car s'il y a des élues qui sont appelés dieux, soit dans le ciel, soit sur la terre – connue il y a, en effet, plusieurs dieux et plusieurs seigneurs". (Corinth., VIII. 5), prouve au moins, que saint Paul reconnaissait une pluralité des "Dieux" qu'il appelle des "démons" (des "esprits" – jamais les diables). Principautés, Trônes, Recteurs, etc., ce sont tous les noms Juifs et Chrétiens donnés aux Dieux des anciens – leurs Archanges et leurs Anges sont en tous les cas les Dévas et les Dhyân- Chohans des religions plus anciennes.
52 Réponse de Reuvens à Letronne à propos de ses notions erronées au sujet du Zodiaque de Dendérah.
Comme Letronne s'était efforcé d'établir que les véritables Zodiaques égyptiens avaient été confectionnés pendant la période romaine, on met en avant la momie de Sensaos pour prouver que :
Tous, les monuments zodiacaux de l'Egypte étaient principalement astronomiques. Les tombes royales et les rites funéraires sont autant de tables des constellations et de leurs influences sur toutes les heures de chaque mois.
Ainsi, les tables généthliaques elles-mêmes prouvent qu'elles sont bien plus anciennes que l'époque à laquelle on fait remonter leur origine ; tous les Zodiaques des sarcophages des époques plus récentes, ne sont que de simples réminiscences de Zodiaques appartenant à la période mythologique (archaïque).
L'Astrologie primitive était aussi supérieure à l'Astrologie judiciaire moderne, que les guides (les Planètes et les signes du Zodiaque) sont supérieurs aux becs de gaz. Bérose établit la souveraineté sidérale de Bel et de Mylitta (le Soleil et la Lune) et seuls "les douze seigneurs des Dieux- Zodiacaux", les "trente-six Dieux Conseillers" et les "vingt-quatre Etoiles, juges de ce monde", qui supportent et guident l'Univers (notre système solaire), veillent sur les mortels et révèlent à l'humanité son destin et leurs propres décrets. L'Astronomie judiciaire, telle qu'elle est connue aujourd'hui est appelée avec raison par l'Eglise latine la [VI 31]
prophétisation matérialiste et panthéiste de la planète objective elle-même, indépendamment de son Recteur [les Mlac des Juifs, les ministres de l'Eternel chargés par lui d'annoncer sa volonté aux mortels] ; l'ascension ou la conjonction de la planète au moment de la naissance d'un individu décidant sa fortune, ainsi que le moment et le genre de sa mort 53.
53 Salut Augustin (De Gen., I. III) et Delrio (Disquisit., Vol. IV, chap. III) sont cités par de Mirville, afin d'établir que "plus les astrologues disent la vérité, plus ils prophétisent avec exactitude et plus on doit se montrer méfiant, en constatant que leur accord avec le diable devient, par cela même, plus apparent". La fameuse déclaration de Juvénal (Satires, VI) "que l'on ne pourrait trouver un seul astrologue qui n'eût pas payé cher l'assistance qu'il recevait de son génie" – ne prouve pas plus que ce dernier ait été un diable, que la mort de Socrate ne prouve que son démon ait été, un natif du monde inférieur – s'il y en a un. Un pareil argument ne sert qu'à démontrer la stupidité et la méchanceté humaines, lorsqu'on asservit la raison au fanatisme et aux préjugés de toutes sortes. "La plupart des grands auteurs de l'antiquité, entre autres Cicéron et Tacite, croyaient à l'Astrologie et à la réalisation de ses prophéties" et "la peine de mort, prononcée presque partout contre ces mathématiciens [astrologues] à qui il arrivait de faire des prédictions fausses, ne diminua. ni leur nombre, ni leur tranquillité d'esprit."
Tous les étudiants de l'Occultisme savent que les corps célestes ont des rapports très étroits, durant chaque Manvantara, avec l'humanité de ce cycle spécial ; et certaines personnes croient que chaque grand personnage qui naît durant cette période a – comme l'ont tous les mortels, mais à un plus grand degré – sa destinée esquissée dans la constellation ou l'étoile qui lui est propre, qu'elle y est tracée comme une autoprophétie, comme une autobiographie anticipée, par l'Esprit qui demeure dans cette étoile. La Monade humaine, lors de ses premiers débuts, n'est autre que cet Esprit, ou que l'Ame même de cette étoile (planète). De même que notre Soleil projette sa lumière et ses rayons sur tous les corps de l'espace, dans les limites de son système, de même le Régent de chaque Planète-étoile, la Monade-Mère, fait jaillir de son sein la Monade de chaque Ame "pèlerine", née sous sa maison, dans son propre groupe. Les Régents sont, ésotériquement, au nombre de sept, que ce soit dans les Séphiroths, les "Anges de la Présence", les Richis ou les Amshaspends, "L'Un n'est pas un nombre", est-il dit dans tous les ouvrages Esotériques.
Des Kasdim et des Gazzim (Astrologues), la noble science primitive passa aux Khartumini Asaphim (ou Théologiens), ainsi qu'aux Hakamim (ou savants, les Magiciens de la classe inférieure) et, après ceux-ci, aux Juifs durant leur captivité. Les Livres de Moïse avaient été enfouis dans l'oubli pendant des siècles et lorsqu'ils furent découverts de nouveau par Hilkiah, ils avaient perdu leur véritable sens pour le peuple [VI 32] d'Israël. L'Astrologie Occulte primitive était à son déclin lorsque Daniel, le dernier des Initiés Juifs de l'ancienne école, devint le chef des Mages et des Astrologues de la Chaldée. A cette époque l'Egypte elle-même, qui puisait sa sagesse à la même source que Babylone, avait perdu de sa grandeur passée et sa gloire avait commencé à pâlir. La science de jadis avait cependant marqué le monde de son éternelle empreinte et les sept grands Dieux Primitifs régnaient à jamais sur l'Astrologie et sur la division du temps de toutes les nations de la terre. Les noms des jours de notre semaine (Chrétienne) sont ceux des Dieux des Chaldéens, qui avaient eux- mêmes traduit ceux des Aryens ; l'uniformité de ces noms antédiluviens chez toutes les nations, en remontant depuis les Goths jusqu'aux Indiens, resterait inexplicable, comme le pensait Sir W. Jones, si l'énigme ne nous avait pas été expliquée par l'invitation des oracles Chaldéens, enregistrée par Porphyre et citée par Eusèbe :
De communiquer d'abord ces noms aux colonies égyptienne et phénicienne, puis aux Grecs, en recommandant expressément de n'invoquer chaque Dieu que durant la journée à laquelle avait été donné son nom...
Ainsi Apollon dit, dans ces oracles : "Je dois être invoqué le jour du soleil, Mercure suivant ses instructions, puis Cronos [Saturne], puis Vénus et ne manquez pas d'appeler sept fois chacun de ces dieux 54."
Ceci est légèrement erroné. La Grèce n'a pas reçu son instruction astrologique de l'Egypte ou de la Chaldée, mais directement d'Orphée, comme nous le dit Lucien 55. Ce fut Orphée, dit-il, qui communiqua les Sciences Indiennes à presque tous les grands monarques de l'antiquité et ce furent eux, les anciens rois favorisés par les Dieux Planétaires, qui enregistrèrent les principes de l'Astrologie comme le fit Ptolémée, par exemple. Ainsi Lucien écrit :
Le Béotien Tirésias acquit la plus grande réputation dans l'art de prédire l'avenir... A cette époque, la divination n'était pas traitée aussi légèrement qu'elle l'est aujourd'hui, et l'on n'entreprenait jamais rien sans avoir consulté, au préalable, les devins, dont tous les oracles étaient basés sur l'astrologie... A Delphes, la vierge chargée d'annoncer l'avenir était le symbole de la Vierge Céleste... et de Notre-Dame. [VI 33]
Sur le sarcophage d'un Pharaon égyptien, la mère de Ra, Neith, la génisse qui enfante le Soleil, dont le corps est parsemé d'étoiles et qui porte les disques solaire et lunaire, est aussi mentionnée comme étant la "Vierge Céleste" et "Notre Dame de la Voûte-Etoilée"...
L'Astrologie judiciaire moderne n'apparut sous sa forme actuelle qu'à l'époque de Diodore, ainsi que celui-ci l'apprend au monde 56. Mais l'Astrologie Chaldéenne était acceptée par la plupart des plus grands hommes de l'Histoire, tels que César, Pline, Cicéron – dont les meilleurs amis, Nigidius Figulus et Lucius Tarrutius, étaient eux-mêmes des Astrologues et le premier des deux étant fameux comme prophète. Marc Antoine ne voyageait jamais sans un Astrologue qui lui avait été recommandé par Cléopâtre. Auguste, lorsqu'il monta sur le trône, eut son horoscope établi par Théagènes. Tibère découvrit des prétendants à son trône au moyen de l'Astrologie et de la divination. Vitellius n'osa pas exiler les Chaldéens, parce qu'ils avaient annoncé que le jour de leur bannissement serait celui de sa mort. Vespasien les consultait journellement ; Domitien n'aurait pas bougé sans avoir pris l'avis des prophètes ; Adrien était lui-même un savant Astrologue et tous, y compris Julien (appelé l'Apostat parce qu'il ne voulut pas en devenir un), croyaient aux "Dieux" Planétaires et leur adressaient leurs prières. De plus, l'Empereur Adrien "prédit, depuis les calendes de janvier jusqu'au 31 décembre, tout ce qui lui arriva journellement". Sous les empereurs les plus sages, Rome possédait une Ecole d'Astrologie, où l'on enseignait secrètement les influences occultes du Soleil, de la Lune et de Saturne 57. L'Astrologie judiciaire est employée jusqu'à présent par les Cabalistes, et Eliphas Lévi, le Mage français moderne, en enseigne les rudiments dans son Dogme et Rituel de la Haute-Magie. Mais la clef de l'Astrologie cérémonielle ou rituelle, avec les téraphim, et les urim et thummim de la Magie, est perdue pour l'Europe. Aussi notre siècle de Matérialisme hausse-t-il les épaules et considère-t-il l'Astrologie comme un faux semblant.
Cependant tous les savants ne s'en moquent pas et l'on peut se réjouir en lisant dans le Musée des Sciences, la remarque suggestive et loyale faite par Le Couturier, savant de grand renom. Il trouve curieux de remarquer que tandis que les audacieuses spéculations de Démocrite sont justifiées par Dalton, [VI 34] les rêveries des alchimistes s'acheminent aussi vers une certaine réhabilitation. Les minutieuses investigations de leurs successeurs, les chimistes, leur infusent une vie nouvelle ; il est vraiment très remarquable de constater à quel point les découvertes modernes ont servi, récemment, à décharger les théories du Moyen Age de l'accusation d'absurdité lancée contre elles. Par exemple, si, comme l'a démontré le colonel Sabine, la direction d'un morceau d'acier suspendu à quelques pieds au-dessus du sol, peut être influencée par la position de la Lune, dont le corps se trouve à une distance de 240.000 milles de notre planète, qui donc oserait qualifier d'extravagante la croyance des anciens Astrologues [et des modernes aussi] à l'influence des étoiles sur la destinée humaine.
57 Tous ces détails peuvent être retrouvés, plus abondants et bien plus complets, dans l'Egypte de Champollion Figeac.